Déposé le 27 juin 2016 par : M. Mamère, M. Noguès, Mme Abeille, Mme Allain, Mme Attard, Mme Auroi, M. Coronado, Mme Duflot, M. Roumégas, Mme Sas, Mme Bonneton, M. Amirshahi, M. Lesterlin, Mme Chauvel.
I. – L'article 145‑4 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Tout enfant a droit au maintien des relations avec son parent détenu. Le juge d'instruction ne peut refuser de délivrer un permis de visite ou d'autoriser l'usage du téléphone à un enfant mineur de la personne placée en détention provisoire que par une décision écrite et spécialement motivée pour des motifs graves au regard des nécessités de l'instruction ou à l'intérêt supérieur de l'enfant.
« À partir de l'âge de seize ans révolus, un enfant de la personne placée en détention provisoire peut demander et exercer ce permis de visite ou téléphoner sans l'accord du titulaire de l'autorité parentale. » ;
2° Au début du quatrième alinéa, les mots : « Cette décision » sont remplacés par les mots : « La décision de refus ».
II. – L'article 35 de la loi n° 2009‑1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est ainsi modifié :
1° Après le troisième alinéa, sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Tout enfant a droit au maintien des relations avec son parent détenu. L'autorité administrative ne peut refuser un permis de visite à l'enfant mineur d'un condamné, suspendre ou retirer ce permis que pour des motifs graves relatifs à l'intérêt supérieur de l'enfant.
« À partir de l'âge de seize ans révolus, un enfant peut demander et exercer ce permis de visite sans l'accord du titulaire de l'autorité parentale. » ;
2° Le dernier alinéa est complété par quatre phrases ainsi rédigées :
« Cette décision est notifiée par tout moyen et sans délai au demandeur. En cas de décision de refus ou à défaut de réponse de l'autorité administrative dans un délai de vingt jours, le demandeur peut saisir le tribunal administratif. En cas de recours formé sur le fondement de l'article L. 521‑1 du code de la justice administrative, la condition d'urgence est présumée remplie. Lorsqu'il infirme la décision de l'autorité administrative, le tribunal peut enjoindre l'administration de délivrer le permis de visite ou l'autorisation de téléphoner.
Contrairement à ce que soutient le gouvernement, les récentes réformes n'ont pas permis de permettre de placer l'intérêt de l'enfant au centre des dispositions sur les permis de visite. De même, n'a pas été satisfaite de la présomption d'urgence des recours déposés sur le fondement de l'article L521‑1 du code de la justice administrative.
Cet amendement propose de préserver l'intérêt de l'enfant dont l'un des parents est placé en détention provisoire ou détenue.
La procédure prévue à l'article 145‑4 du code de procédure pénale et à l'article 35 de la loi pénitentiaire font l'objet de critiques régulières, et l'article 145‑4 vient d'être modifié suite à une QPC et l'article 63 de la loi n° 2016‑731 du 3 juin 201 sur la réforme de la procédure pénale. Cette procédure reste toutefois très préjudiciable pour les enfants mineurs des personnes détenus.
Le Défenseur des Droits, dans un rapport sur « l'intérêt supérieur de l'enfant et le maintien des liens familiaux à l'épreuve de l'incarcération » avait ainsi recommandé plusieurs modifications, dans l'intérêt de l'enfant.
Ainsi, le rapport note qu'il « est constaté de manière régulière que certains juges d'instruction ou magistrats du parquet refusent d'accorder des permis de visite aux enfants sur le seul motif de l'opportunité des visites au parloir en raison de l'âge des enfants. Les convictions qui guident chaque magistrat génèrent des pratiques hétérogènes et discriminantes. Il est à noter, également, l'absence fréquente de réponse écrite motivée du magistrat, ce qui enlève toute possibilité à la famille de faire appel d'une décision de refus ».
C'est pour cela que le Défenseur recommande de « mettre en conformité l'article 145‑4 du code de procédure pénale avec les exigences de l'article 9‑1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et obliger l'autorité judiciaire à motiver leur refus d'octroi à un enfant d'un permis de visite à son parent prévenu par les nécessités de l'enquête ou de l'instruction ou l'intérêt supérieur de l'enfant. »
Il doit donc être réaffirmé le droit pour les enfants de pouvoir rencontrer leurs parents. Dès lors il est proposé d'instaurer un droit au maintien des relations familiales, non pour la personne détenue (comme le fait déjà le premier alinéa de l'article 35 de la loi pénitentiaire) mais bien pour son enfant. Cela éviterait certains refus motivés uniquement par la crainte de certains magistrats de confronté un enfant avec la réalité carcérale, alors même que le maintien du lien parent-enfant doit être préservé dans la majorité des cas.
Par ailleurs pour l'enfant de 16 ans ou plus, il n'est pas nécessaire qu'il soit accompagné par une personne majeure également titulaire d'un permis de visite. Il est par cohérence proposé dans le 2° de l'amendement que cet enfant puisse lui-même demander ce permis sans l'accord écrit du titulaire de l'autorité parentale. C'est également ce que recommande le Défenseur des Droits.
Il est à noter qu'un amendement proposant cette réforme à l'article 145‑4 avait été adopté par l'Assemblée nationale en 2013, dans le cadre des débats sur la proposition de loi relative à l'autorité parentale et l'intérêt de l'enfant.
Enfin, le 2° du II aligne les garanties prévues pour les personnes condamnées et celles placées en détention provisoire.
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