Amendement N° 610 (Rejeté)

République numérique

Déposé le 18 janvier 2016 par : M. Paul, M. Amirshahi, M. Bies, Mme Linkenheld, Mme Martinel, M. Premat, Mme Capdevielle, M. Juanico, M. Valax, Mme Florence Delaunay, Mme Guittet, M. Sebaoun, M. Hanotin, Mme Marcel, Mme Chabanne, Mme Tallard, M. Cherki, Mme Carrey-Conte, M. Pouzol, M. Laurent.

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Le livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle est complété par un titre IV ainsi rédigé :

«  Titre IV
«  Les Communs
«  Art. L. 141‑1. – Relèvent du domaine commun informationnel :
«  1° Les informations, faits, idées, principes, méthodes, découvertes, dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une divulgation publique licite, notamment dans le respect du secret industriel et commercial et du droit à la protection de la vie privée ;
«  2° Les œuvres, dessins, modèles, inventions, bases de données, protégées par le code de la propriété intellectuelle, dont la durée de protection légale, à l'exception du droit moral des auteurs, a expiré ;
«  3° Les informations issues des documents administratifs diffusés publiquement par les personnes mentionnées à l'article L. 300‑2 du code des relations entre le public et l'administration et dans les conditions précisées aux articles L. 312‑1 et L. 312‑2 du même code, sans préjudice des dispositions de l'article L. 311‑4 du même code et des articles 10, 14 et 15 de la loi n° 78‑753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal.
«  Les choses qui composent le domaine commun informationnel sont des choses communes au sens de l'article 714 du Code civil. Elles ne peuvent, en tant que tel, faire l'objet d'une exclusivité, ni d'une restriction de l'usage commun à tous, autre que l'exercice du droit moral.
«  Les associations agréées ayant pour objet la diffusion des savoirs ou la défense des choses communes ont qualité pour agir aux fins de faire cesser toute atteinte au domaine commun informationnel. Cet agrément est attribué dans des conditions définies par un décret en Conseil d'État. Il est valable pour une durée limitée, et peut être abrogé lorsque l'association ne satisfait plus aux conditions qui ont conduit à le délivrer.
«  Art. L. 141‑2. – Le titulaire d'un droit de propriété intellectuelle, de quelque nature que ce soit, peut autoriser l'usage commun d'un objet auquel ce droit est rattaché par le choix d'une licence permissive autorisant notamment la copie, l'étude du fonctionnement, la modification ou la distribution, éventuellement à des fins commerciales, éventuellement sous condition de redistribution des modifications sous la même licence. Elle ne peut être valablement insérée dans un contrat d'édition tel que défini à l'article L. 132‑1. du code de la propriété intellectuelle.
«  Le titulaire de droits est libre de délimiter l'étendue de cette autorisation d'usage commun pour la faire porter uniquement sur certaines des prérogatives attachées à son droit de propriété intellectuelle. L'objet de cette manifestation de volonté fait alors partie du domaine commun informationnel, tel que défini à l'article L. 141‑1 du présent code, dans la mesure déterminée par le titulaire de droit.
«  Cette faculté s'exerce sans préjudice des dispositions de l'article L. 121‑1 du présent code relatives à l'inaliénabilité du droit moral. »

Exposé sommaire :

L'objet de cet amendement est de définir le « domaine commun informationnel » ainsi qu'un mécanisme permettant de l'alimenter volontairement.

Le domaine commun est composé, d'une part, des oeuvres élevées dans le domaine public. Ces oeuvres sont celles dont les droits patrimoniaux sont épuisés. Un exemple typique est celui d'un livre dont l'auteur est décédé depuis plus de 70 ans.

Le domaine commun est composé, d'autre part, des oeuvres dont les ayant droits concèdent certains droits, notamment ceux de copier, modifier ou redistribuer, éventuellement à des fins commerciales, et éventuellement sous condition de partage à l'identique

des modifications.

Le domaine public existe déjà, en négatif des droits exclusifs. L'adoption de cet amendement et la création de ce nouveau titre du Code de la Propriété Intellectuelle lui donneraient une reconnaissance positive. Cela n'entraînera pas l'entrée de plus d'oeuvres dans le domaine public. Les modalités d'extinction des droits exclusifs seraient inchangées.

Les autres oeuvres composant ce domaine commun informationnel sont ce que l'on appelle communément les « biens communs informationnels ». Les exemples les plus connus sont les logiciels libres, comme le noyau Linux ou la suite bureautique LibreOffice, ou les milliards de textes, musiques, vidéos placées sous licence créative commons.

L'irruption de ces « biens communs informationnels » est un des phénomènes sociaux majeurs de ces trente dernières années. En réaction au mouvement de restriction des droits d'usage et de modification des logiciels, Richard Stallman lança le projet GNU au début des années 80. Trente ans plus tard, les logiciels libres sont un élément clé de l'Internet et des systèmes d'information ouvert. Au tournant du XXIème siècle, Lawrence Lessig, professeur de droit à Harvard, s'éleva en réaction à l'appropriation toujours plus longue et toujours plus exclusive des biens culturels en lançant le mouvement et les licences Creative Commons.

Aujourd'hui, des millions de personnes à travers le monde co-construisent et partagent par défaut des textes, musiques, vidéos ou logiciel. Reconnaître le domaine commun informationnel, c'est - enfin - reconnaître en droit une évolution majeure de notre société.

Au-delà du symbole, aussi important soit-il, l'adoption de cet article permettra aux associations dont l'objet est la défense du domaine commun informationnel d'agir plus efficacement pour sa protection. Cela facilitera la défense des oeuvres sous licence libre, et cela rendra enfin possible une lutte plus efficace contre le « copyfraud ».

Le « copyfraud » est une pratique consistant à revendiquer indûment des droits de propriété intellectuelle sur une oeuvre du domaine public. Il est parfois le fait d'institutions publiques. Le service Gallica de la BNF demandait ainsi par exemple d'accepter des conditions d'utilisation non commerciales pour accéder à des oeuvres du domaine public. Le département de la Dordogne avait tenté d'empêcher la diffusion d'une photographie d'une peinture rupestre de Lascaux, dont l'auteur est, on peut le présumer, mort depuis plus de 70 ans.

Cet amendement propose une nouvelle réaction, corrigeant la principale critique adressée en commission : il précise les modalités d'alimentation volontaire du domaine commun informationnel en les réduisant à l'utilisation d'une licence permissive. Une telle licence autorise notamment la copie, l'étude du fonctionnement, la modification ou la distribution, éventuellement à des fins commerciales, éventuellement sous condition de redistribution des modifications sous la même licence.

L'intérêt de cette réduction est de bien indiquer que l'ayant droits ne procède à aucun abandon définitif de droit, mais plutôt à une concession de licence(s). Ces licences pourront être éventuellement révoquées, dans le respect du droit en vigueur.

Cette nouvelle rédaction apporte donc toutes les garanties souhaitables.

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