Amendement N° 603 (Rejeté)

Biodiversité

Déposé le 11 mars 2016 par : M. Chalus, M. Carpentier, M. Charasse, M. Claireaux, Mme Dubié, M. Falorni, M. Giacobbi, M. Giraud, Mme Hobert, M. Krabal, M. Jérôme Lambert, M. Maggi, M. Moignard, Mme Orliac, M. Robert, M. Saint-André, M. Tourret.

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Après la première occurrence de la référence :

«  I »,

rédiger ainsi la fin de l'alinéa 68 :

«  a lieu sur le territoire d'une collectivité où est présente une communauté d'habitants définie au 4° de l'article L. 412‑3, l'autorisation ne peut être accordée qu'au terme de la procédure définie aux articles L. 412‑8 et L. 412‑9, et aux I et III de l'article L. 412‑11. Au vu du procès-verbal, l'autorité administrative accorde ou refuse, en partie ou en totalité, l'accès aux ressources génétiques. Cette décision est notifiée au demandeur et fait l'objet de mesures de publicité dans des conditions fixées par décret, sous réserve du I de l'article L. 412‑14. »

Exposé sommaire :

Alors que le Protocole de Nagoya prévoit que soit obtenu le consentement préalable des communautés d'habitants pour l'accès aux ressources génétiques les concernant, cet amendement vise à instaurer, pour l'accès aux ressources génétiques à des fins commerciales, la consultation de toutes les communautés d'habitants concernées, et non des seuls parcs nationaux.

En Guyane, la consultation des communautés d'habitants est essentielle d'un point de vue politique. A défaut, ce manque de considération pour des communautés qui utilisent et préservent de longue date ces ressources risque de mettre à mal le dialogue entre les communautés et les institutions publiques et pourrait devenir un facteur de blocage. L'effet politique local du titre IV pourrait donc être très contreproductif et nourrir des positions et revendications radicales alors que, pourtant, ce titre pourrait être un facteur d'amélioration de l'articulation entre les communautés et la République.

L'article 18 fixe les modalités d'accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées en application du Protocole de Nagoya signé par la France le 20 septembre 2011 dans le cadre de la convention sur la diversité biologique du 22 mai 1992. L'article 6.2 du Protocole de Nagoya prévoit que l'État Partie prend “les mesures nécessaires pour s'assurer que le consentement préalable donné en connaissance de cause ou l'accord et la participation des communautés autochtones et locales sont obtenus pour l'accès aux ressources génétiques, dès lors que leur droit d'accorder l'accès à ces ressources est établi”.

Il paraît en effet légitime que les communautés d'habitants aient leur mot à dire sur l'exploitation commerciale de ressources génétiques qu'elles contribuent à préserver depuis des siècles voire des millénaires en gérant leur territoire de manière durable.

Or le projet de loi ne prévoit pas d'associer les communautés d'habitants à la procédure d'accès aux ressources génétiques : elles ne sont ni consultées, ni même informées. Leur consultation est prévue pour l'utilisation des connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques (paragraphe 4), mais pas pour l'accès aux ressources génétiques (paragraphe 3). Cela est contraire au Protocole de Nagoya.

Il serait souhaitable que le législateur trouve l'articulation juridique qui permette de transcrire en droit français le Protocole de Nagoya tout en respectant les principes fondamentaux de la République. C'est bien l'État qui exerce la souveraineté sur les ressources génétiques, patrimoine commun de la Nation, mais cet exercice doit se faire, lorsque les ressources concernent une ou plusieurs communautés d ́habitants, dans le respect de leurs droits.

A ce titre, le cas du Parc Amazonien de Guyane (PAG) peut constituer un précédent intéressant. Le PAG a été créé par la loi n°2006‑436 du 14 avril 2006 relative aux parcs nationaux et complété par le décret 2007‑266 du 27 février 2007. Ces deux textes reconnaissent la notion de « communautés d'habitants » et invitent à la coopération avec elles dans la gestion du parc. La loi de 2006 prévoit un régime d'autorisation pour l'accès aux ressources génétiques « des espèces prélevées dans le parc national ». Cette autorisation est délivrée par le président du conseil régional, après avis conforme du président du conseil général et consultation de l'établissement public du parc national. Le conseil d'administration du PAG comprenant les autorités coutumières et la charte du parc prévoyant la consultation du comité de vie locale – une instance consultative qui regroupe les 11 représentants des 11 bassins de vie du parc –, ce dispositif permet in fine de consulter les communautés d'habitants. Ce processus d'autorisation et de consultation ne remet nullement en cause le fait que ces ressources font partie du patrimoine commun de la Nation.

Les communautés d'habitants situées dans le Parc Amazonien de Guyane sont donc aujourd'hui consultées sur l'accès aux ressources génétiques prélevées dans le parc.

Le projet de loi initial supprimait purement et simplement ce dispositif, sans prévoir un régime général de consultation des communautés d'habitants pour l'accès aux ressources génétiques : le titre IV qui visait à transcrire en France le Protocole de Nagoya aurait alors conduit à une régression dans son application en France et à une régression du droit des communautés d'habitants du PAG. Pour éviter ces régressions, l'Assemblée Nationale a en quelques sortes étendu l'obligation de consultation du PAG à l'ensemble des parcs nationaux, dès lors que le prélèvement a lieu dans un parc national.

Mais cette consultation des seuls parcs nationaux n'a aucun sens puisque les communautés d'habitants présentes sur le territoire français ne sont pas confinées dans des parcs. Elle ne permet pas la consultation de toutes les communautés d'habitants présentes sur le territoire français et concernées par l'accès à des ressources qu'elles utilisent et entretiennent. En effet :

- les communautés répondant à la définition des communautés d'habitants de l'article 412‑3 et qui sont comprises dans le champ d'application des dispositions relatives à l'accès et l'utilisation des ressources génétiques sont : les amérindiens et bushinenge de Guyane, wallisiens et futuniens de Wallis-et-Futuna, mahorais de Mayotte (cf. Etude d'impact p 117 et 129).

 - Il n'y a pas de parc national à Mayotte ni à Wallis-et-Futuna

- le Parc Amazonien de Guyane ne couvre que 47 % du territoire guyanais, et il y a plus de 
communautés d'habitants hors du parc qu'à l'intérieur du parc. 


En conséquence, une grande partie des communautés d'habitants visées par la loi ne sera pas consultée ni même informée lors d'une procédure d'autorisation d'accès aux ressources génétiques les concernant, alors que le Protocole de Nagoya prévoit que soit obtenu leur consentement préalable. 


Cet amendement vise donc à permettre que toutes les communautés d'habitants concernées par les dispositions relatives à l'accès aux ressources génétiques de la présente loi, c'est-à-dire les communautés d'habitants de Guyane, Mayotte et Wallis-et-Futuna, puissent être consultées lorsque l'accès aux ressources génétiques implique un prélèvement in situ sur un territoire qu'elles contribuent à préserver de longue date. 
Il prévoit la consultation des communautés d'habitants selon la même procédure que celle prévue aux articles L. 412‑8, L. 412‑9, L. 412‑11-I, L. 412‑11-III pour l'utilisation des connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques. Cette procédure existant déjà pour l'utilisation des connaissances traditionnelles (création d'une personne morale de droit public), cet amendement ne crée pas de nouvelle structure. Il s'agit simplement d'utiliser une procédure et une structure existantes. 
Le présent amendement propose une articulation juridique qui respecte la souveraineté de l'État français (qui reste la seule partie contractante avec le demandeur) et le statut de patrimoine commun de la Nation des ressources génétiques tout en reconnaissant les droits des communautés d'habitants, à savoir le recueil de leur consentement.

Cette consultation ponctuelle des communautés d'habitants n'est donc pas incompatible avec la souveraineté de l'État sur les ressources génétiques. 
Cette consultation ne concerne que les communautés d'habitants telles que définies par la présente loi (Guyane, Mayotte, Wallis-et-Futuna), et ne concernera donc pas l'accès aux ressources génétiques sur l'immense majorité du territoire français.

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