Déposé le 16 novembre 2016 par : Mme Dalloz, M. Le Fur.
I. – Après l'article 231bis U du code général des impôts, il est inséré un article 231 bisU bis ainsi rédigé :
« Art. 231 bisUbis. – I. – Les organismes privés sans but lucratif et les centres de lutte contre le cancer mentionnés à l'article L. 6162‑1 du code de la santé publique peuvent bénéficier, à compter du 1er janvier 2017, d'un crédit d'impôt pour l'action solidaire établi en proportion des effectifs qu'ils emploient.
« II. – Le crédit d'impôt mentionné au I est assis sur les rémunérations que ces organismes versent à leurs salariés au cours de l'année civile. Sont prises en compte les rémunérations, telles qu'elles sont définies pour le calcul des cotisations de sécurité sociale à l' article L. 242‑1 du code de la sécurité sociale, n'excédant pas deux fois et demie le salaire minimum de croissance calculé pour un an sur la base de la durée légale du travail augmentée, le cas échéant, du nombre d'heures complémentaires ou supplémentaires, sans prise en compte des majorations auxquelles elles donnent lieu. Pour les salariés qui ne sont pas employés à temps plein ou qui ne sont pas employés sur toute l'année, le salaire minimum de croissance pris en compte est celui qui correspond à la durée de travail prévue au contrat au titre de la période où ils sont présents dans l'entreprise.
« Pour être éligibles au crédit d'impôt, les rémunérations versées aux salariés doivent avoir été régulièrement déclarées aux organismes de sécurité sociale.
« III. – Le taux du crédit d'impôt est fixé à 5 %.
« IV. – Le crédit d'impôt pour l'action solidaire des organismes privés sans but lucratif est utilisé pour le paiement de la taxe sur les salaires due au titre de l'année au titre de laquelle elle est constatée et pour le surplus le cas échéant, des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée. S'il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période.
« V. – Les organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale dues pour l'emploi des personnes mentionnées au I sont habilités à recevoir, dans le cadre des déclarations auxquelles sont tenus les organismes privés sans but lucratif auprès d'eux, et à vérifier, dans le cadre des contrôles qu'ils effectuent, les données relatives aux rémunérations donnant lieu au crédit d'impôt. Ces éléments relatifs au calcul du crédit d'impôt sont transmis à l'administration fiscale. »
II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Le I n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
Les organismes privés sans but lucratif et les centres de lutte contre le cancer gérant des établissements et services sanitaires, sociaux et médico-sociaux relevant de l'article L. 6111‑1 du code de la santé publique et du I de l'article L. 312.1 du code de la famille et de l'action sociale ont été les grands oubliés du CICE alors qu'ils participent au maintien dans notre pays d'un tissu sanitaire et social solidaire de premier rang.
Ecartés du CICE, ces organismes ont eu toutefois à en acquitter le coût très élevé avec des augmentations lourdes de la TVA, que ces organismes ne récupèrent pas.
Pire une majorité d'entre eux ont vu leurs tarifs et leurs budgets baisser au nom d'une compensation des effets bénéfiques des baisses de cotisation sociale en 2015 et de 2016 au titre du pacte de responsabilité, baisses de recettes parfois supérieures aux baisses de charges. Ils s'en sont trouvés appauvris, avec une capacité amoindrie de déployer leurs actions et initiatives dans le cadre de leurs activités de service public hospitalier ou d'intérêt général social et médico-social, et de préserver voire de développer les emplois qui les permettent.
Les 8 organisations de référence du secteur privé non lucratif (APAJH, CNAPE, Croix-Rouge Française, FEHAP, FNARS, UNAPEI, UNICANCER, UNIOPSS) ont évidemment accueilli avec beaucoup d'intérêt les déclarations du Premier ministre, dans l'Express le 24 août dernier, pour une « mesure spécifique » en direction de l'ensemble du secteur privé non lucratif non bénéficiaire du CICE. Elles ont salué, dans un communiqué de presse conjoint du 10 octobre les annonces du Premier ministre intervenues à Matignon le Vendredi 8 Octobre au soir. Ces organisations ont bien noté que la structure de la mesure envisagée – une imputation en réduction de la taxe sur les salaires- correspond au schéma qu'elles ont proposé dans le cadre des travaux parlementaires du projet de loi de finances pour 2016 – le CIAS (crédit d'impôt pour l'action solidaire). Cette proposition avait été adoptée par le Sénat le 23 novembre 2015 (Amendement I-226), mais hélas supprimé par l'Assemblée Nationale le 11 décembre, de quelques voix.
En réalité, il existe aujourd'hui près de 40 crédits d'impôt bénéficiant aux structures privées commerciales qui acquittent l'impôt sur les sociétés, dont par exemple aussi le crédit d'impôt recherche ou le crédit d'impôt innovation. Le secteur privé non lucratif est toujours exclu de ces mécanismes assis sur l'impôt sur les sociétés, comme encore sur le soutien aux investissements. Tandis qu'il acquitte une taxe sur les salaires qui s'avère un impôt très pénalisant pour des activités à très forte composante de masse salariale qualifiée. Taxe sur les salaires qui est une charge fixe, acquittée même si l'on est en tension budgétaire voire en déficit. Tandis que l'impôt sur les sociétés est une charge variable, nettement diminuée en fonction des résultats économiques, des provisions constituées, des crédits d'impôt mobilisés.
Le secteur privé non lucratif est parfois indûment présenté comme « non fiscalisé ». Il est en réalité bien plus assujetti à des prélèvements obligatoires, sociaux et fiscaux (nationale et locale), que les acteurs publics et privés de statut commercial œuvrant dans le même champ.
Sur le versant public des comparaisons pour des activités similaires, les gestionnaires privés non lucratifs constatent que les établissements publics de santé et médico-sociaux bénéficient de cotisations sociales moins fortes pour les mêmes missions et tarifs ou budgets (retraite, chômage), ou encore d'une exonération générale de la taxe foncière et de la taxe d'habitation. Cela s'intègre dans le contexte actuel de la sécurité « statutaire » des établissements publics sanitaires et médico-sociaux, qui bénéficient de la garantie de l'État et ne peuvent connaître la cessation de paiement et la barre du tribunal, à l'instar des gestionnaires privés non lucratifs en cas de déficits chroniques ou de ruptures de trésorerie.
La comparaison la plus étonnante se situe du côté des activités sanitaires, sociales et médico-sociales des centres communaux et intercommunaux d'action sociale qui bénéficient à la fois :
- D'une exonération totale de la taxe foncière et de la taxe d'habitation,
- D'une exonération totale de la taxe sur les salaires,
- D'une exonération totale de la TVA,
- Tout en bénéficiant des financements du fond de compensation de la TVA.
L'objet du présent amendement n'est en rien d'atténuer les soutiens à l'emploi, l'activité et l'investissement dont bénéficient les autres secteurs publics ou privés de statut commercial mais, dans une dynamique d'égalité devant les charges publiques, de faire en sorte qu'une mesure de crédit d'impôt similaire dans sa conception à celle du CICE puisse bénéficier aux organismes privés sans but lucratif et aux centres de lutte contre le cancer exerçant leur activité dans le secteur sanitaire, social et médico-social, sous la forme d'une réduction de la taxe sur les salaires.
Compte-tenu des déclarations du Premier ministre, cette rédaction vise l'ensemble des employeurs de statut privé non lucratif. Bien évidemment, les indications reçues vendredi 8 octobre à Matignon portent sur un taux de 4 %, mais renvoyant à un texte parlementaire d'amendement qui n'est pas encore connu. Le présent amendement est donc déposé à titre conservatoire, dans l'attente d'une visibilité plus complète du dispositif et de la concertation avec la FEHAP et les 7 organisations nationales qu'elle rassemble.
4 % serait déjà une mesure significative et elle a été saluée comme telle, mais les organisations signataires plaident toutefois pour un rapprochement avec le taux du CICE de 7 % envisagé pour les structures de droit commercial à compter du 1er janvier 2017. Ne serait-ce que parce qu'il serait très étonnant d'établir un écart facial de 4 % de soutien fiscal plus favorable à des maisons de retraite privées commerciales par exemple, par rapport à des maisons de retraite privées non lucratives, ces dernières étant par ailleurs très majoritairement habilitées à l'aide sociale à 100 % et ainsi engagées à l'accessibilité financière pour tous.
Il est logiquement proposé de compenser cette mesure par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
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