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Madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, c’est une loi d’humanité que nous allons voter. J’ai à l’esprit ceux qui sont en prison à tort, qui ont été victimes d’une erreur judiciaire, qui ont souffert dans leur chair, qui ont été injustement privés de liberté. Des combats acharnés ont été menés avant nous pour réhabiliter, ici Calas avec Voltaire, là Dreyfus avec Zola. Le législateur s’est ému de ces situations, et depuis la Révolution, même depuis Louis XIV, six lois ont été votées, les dernières le 23 juin 1989 et le 15 juin 2000. Mais le législateur, madame la garde des ...
...mettre cela alors que le parquet général a exigé qu’il y ait, en plus de la rétractation, des éléments objectifs ? Je félicite la cour de révision d’avoir pris la décision qu’elle a prise et qui permettra que se tienne un nouveau procès. Je tiens à dire ici que toute ma vie professionnelle m’a conduit à me poser cette question fondamentale : comment peut-on admettre dans notre droit que l’erreur judiciaire soit confortée par un système judiciaire et par un système juridique, qui nous enferme dans une seringue dont on ne peut sortir ? J’ai lu avec beaucoup d’intérêt les interpellations très fortes de la Cour de cassation et les rapports qu’année après année, elle a pu rendre. Elle nous instamment demandé de changer la loi. Nous avons reçu, dans le cadre d’un rapport d’information instruit par Georg...
Madame la présidente, madame la garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il aura fallu que Roland Agret se mutile, se coupe deux doigts, pour forcer l’attention sur l’erreur judiciaire commise à son encontre et pour obtenir la révision de son procès. Condamné à tort en 1973, il est enfin acquitté en 1985, douze ans après. La présente proposition de loi présentée par Alain Tourret est d’une nécessité évidente. En effet, la révision effective des condamnations pénales reste d’une rareté extrême. Comme l’a rappelé Mme la garde des sceaux, depuis 1989 seules neuf condamnations cri...
...dans lequel notre collègue Alain Tourret s’est engagé résolument, accompagné par notre collègue Georges Fenech. Au nom du groupe SRC, je vous félicite, monsieur le rapporteur, pour votre engagement total dans cette cause, pour votre force de conviction, pour la qualité de vos travaux, minutieux et très complets, et pour la pertinence des solutions que vous nous proposez. Nous le savons, l’erreur judiciaire est une tragédie, un naufrage, c’est tout l’édifice judiciaire qui s’écroule. C’est gravissime tant pour le condamné, la ou les victimes que pour la société tout entière. C’est bien la force de notre justice contemporaine que de reconnaître, enfin, qu’elle n’est pas infaillible malgré toutes les précautions prises, qu’elles soient techniques, scientifiques, technologiques, visant le respect du co...
Nous examinons aujourd’hui la proposition de loi du groupe RRDP relative à la révision des condamnations pénales définitives entachées d’erreur judiciaire. L’erreur judiciaire entame gravement la confiance de nos concitoyens dans leur système judiciaire, et cela de manière durable, à travers les générations, quelquefois les siècles. Qui ne se souvient de l’affaire Calas, de l’affaire Lesurques, de l’affaire Dreyfus et de l’affaire Seznec ? À la fameuse formule de Goethe, « je préfère une injustice à un désordre », je réponds qu’une injustice ne p...
...nce Justice et son président Denis Seznec. Nous voilà donc rassemblés aujourd’hui, au-delà des sensibilités politiques, pour faire oeuvre commune de justice : une justice, mes chers collègues, qui s’honorera de reconnaître plus aisément ses éventuelles erreurs et d’en réparer autant que possible les conséquences. Notre histoire fut longue et difficile pour faire triompher le primat de la vérité judiciaire, tout en préservant le principe de l’autorité de la chose jugée. J’en suis conscient, nous allons écrire une nouvelle et importante page historique : celle d’une justice plus respectueuse non seulement de la présomption d’innocence, mais également de l’innocence injustement bafouée. Ce texte est issu de nombreuses contributions des plus hauts magistrats de la Cour de cassation, d’avocats, de che...
...ver de la procédure rénovée prévue par cette proposition de loi. Nous avons là un exemple concret des effets de ce texte, monsieur le rapporteur. S’inspirant des préconisations de la mission d’information sur la révision des condamnations pénales publié le 4 décembre 2013, la proposition de loi de notre collègue Alain Tourret a pour ambition d’améliorer l’effectivité de la réparation des erreurs judiciaires. Réformer ainsi notre procédure pénale implique de concilier deux impératifs à première vue contradictoires mais inhérents au fonctionnement même de notre système judiciaire : d’une part, préserver l’ordre juridique par l’autorité de la chose jugée, d’autre part, éviter l’erreur judiciaire et savoir la réparer lorsqu’elle survient. Évidemment, l’autorité de la chose jugée, une fois que la just...
..., chers collègues, permettez-moi de commencer par les remerciements d’usage, et néanmoins sincères, d’abord au groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, qui a décidé de donner une suite législative à la mission d’information sur la révision des condamnations pénales, confiée le 24 juillet 2013 à nos deux collègues Alain Tourret et Georges Fenech, relative à la réparation des erreurs judiciaires ou au réexamen des décisions pénales à la suite d’une condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme. Cette mission d’information a donné lieu à un rapport, dont le contenu a été salué par l’ensemble des membres de la commission des lois. Je me joins d’ailleurs aux félicitations qui ont été adressées à nos deux collègues. Cette proposition de loi, M. le rapporteur l’a ra...
...un caractère général et absolu. Ce caractère général et absolu établit la présomption de vérité qui s’attache à la chose jugée et qui conduit à tenir pour vrai un jugement devenu définitif ; il est la condition de l’extinction des litiges, de la paix sociale et de la stabilité de l’ordre juridique. Pourtant, chacun sait que le jugement des hommes n’est pas infaillible et que dans toute procédure judiciaire, le manque de preuves ou une erreur de procédure peut conduire à une injustice. Lorsqu’une erreur de fait survient, il devient nécessaire de faire triompher la vérité en permettant la révision du procès, afin de disculper le condamné victime de cette erreur : c’est l’objet de la révision d’une condamnation pénale définitive pour un crime ou un délit. Lorsqu’une erreur de droit a été commise, au m...
...’autres poursuites ou condamnations qui justifieraient le maintien de ses empreintes dans ces fichiers. Nous proposerons également la prise en compte, pour la révision d’une condamnation, d’éléments anciens n’ayant pas été débattus lors du procès, car dans différentes affaires, un élément contenu dans le dossier, mais non débattu, a pu jeter un doute sérieux sur le verdict prononcé. « Une erreur judiciaire est une force en marche : des hommes de conscience sont conquis, sont hantés, se dévouent de plus en plus obstinément, risquent leur fortune et leur vie, jusqu’à ce que justice soit faite. » Cet hommage aux indignés de l’injustice, que Zola exprime dans sa « Lettre à la jeunesse » de 1897, prouve que la lutte contre l’erreur judiciaire est l’un des grands combats pour le respect des droits de l’h...
... bien expliqué, à la fois par les différents orateurs et par Mme la garde des sceaux. Comprendre la portée de ce texte nécessite également d’en mentionner les éléments structurants. Il est utile de s’interroger sur le chemin qu’il trace et qui devra être parcouru pour obtenir un changement pérenne. Toutes les affaires qui font l’objet ou devraient faire l’objet d’une révision évoquent une erreur judiciaire qui a souvent pour origine plusieurs raisons ou plusieurs causes. La procédure de révision permet de rejuger une affaire qui avait été définitivement jugée, faisant ainsi exception à l’autorité de la chose jugée qui rend a priori irrévocable une décision de justice définitive. La possibilité d’une révision, qui donne l’opportunité de faire reconnaître l’erreur de fait qui a conduit à une condamna...
... se trouve tiraillée entre deux nécessités contradictoires exposées à maintes reprises : le besoin de justice, qui suppose de pouvoir revenir sur une décision de justice définitive qui serait entachée d’une erreur de fait ou de droit de nature à en vicier le bien-fondé, et le maintien de la sécurité juridique. D’un côté, le principe de sécurité juridique exige de ne pas bouleverser les décisions judiciaires, sauf à répondre à des critères très stricts définis par la loi. La confiance des justiciables tient en la stabilité des décisions judiciaires et en leur prévisibilité. L’apaisement social exige aussi de ne pas constamment rouvrir les plaies qui ont été douloureusement pansées. Les grandes affaires, les plus médiatiques, qui touchent l’opinion publique, méritent-elles d’être en sursis permanent ...
...ndes exigences dans laquelle doit s’inscrire la justice des hommes dans un État de droit et démocratique, c’est de ne jamais oublier qu’elle n’est que la justice des hommes. Elle ne peut donc pas s’éloigner de son inspiration humaniste qui place le doute au coeur de ses décisions – plusieurs d’entre nous, dont la garde des sceaux, l’ont noté. La présomption d’innocence, le souci d’éviter l’erreur judiciaire, l’autorité de la chose jugée, l’intime conviction, les lourdes conséquences de l’insécurité juridique, la nécessité qu’une fois que la justice est passée, l’apaisement revienne, tout cela est au coeur du processus de l’oeuvre de justice. Elle ne peut pas être mise de côté, quel que soit l’état de l’opinion publique à un instant donné. Notre confrère Georges Fenech a raison de soulever la questi...