Intervention de Jean-Arnold Vinois

Réunion du 12 juillet 2016 à 15h00
Commission des affaires européennes

Jean-Arnold Vinois, conseiller pour l'énergie à l'Institut Jacques Delors :

Au cours des interventions, il a été question de la confiance mutuelle qui est nécessaire si nous voulons approfondir l'intégration européenne et améliorer la sécurité d'approvisionnement. Il existe un obstacle majeur au déploiement de cette confiance mutuelle : nombre d'États membres n'ont pas de stratégie énergétique à moyen et long terme. La Belgique, par exemple, fait du stop and go sur le nucléaire et ne donne absolument aucune visibilité aux investissements. Beaucoup de pays européens sont dans ce cas. Si l'on veut essayer de faire converger les systèmes et optimiser les ressources, il est essentiel de résoudre ce problème dans le cadre d'une amélioration de la gouvernance au plan européen.

Les énergies renouvelables sont souvent critiquées. Pour m'être beaucoup occupé de la sécurité d'approvisionnement en gaz, je puis vous dire que les subventions accordées aux énergies renouvelables ont permis notamment de réduire considérablement la consommation et les importations de gaz. L'économiste en chef de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) m'a indiqué que, pour 80 milliards d'euros de subventions aux énergies renouvelables, nous avions une réduction d'autant de la facture gazière annuelle. En termes d'indépendance énergétique de l'Union, nous avons ainsi favorisé des ressources domestiques au détriment de ressources importées. C'est un élément extrêmement important à considérer dans la politique générale.

S'agissant de l'acceptation publique des énergies renouvelables, un règlement de l'Union européenne de 2013 essaie de promouvoir les bonnes pratiques en matière de consultation des populations pour des projets d'infrastructures énergétiques. Il y a de bonnes pratiques : au Danemark, la plupart des investissements en éolien se font à travers des communautés ; les gens constatent un bénéfice immédiat en électricité, et ils sont à la fois investisseurs et consommateurs.

Quant au système communautaire d'échange de quotas d'émission (SCEQE), dit « ETS », il n'est pas une grande réussite. La tonne de CO2 est à 5 euros alors qu'on attendait un prix de 30 euros en 2009. Le problème est collectif : tout le monde est coupable d'avoir largement distribué des allocations libres. La réforme en cours vise à faire baisser le nombre de ces permis de polluer gratuits. La Suède a décidé de racheter des permis de polluer pour un montant de 700 millions d'euros, afin de soutenir le prix du CO2. On peut discuter des mérites respectifs d'un mécanisme de marché comme celui du SCEQE ou d'une taxe carbone. Sur le plan européen, soyons clairs, il n'y aura jamais l'unanimité des États membres, nécessaire pour imposer une taxe carbone.

Tout le monde veut exclure le charbon mais ce sont les banquiers qui sont en train de s'imposer dans cette affaire. La Banque européenne d'investissement indique ainsi qu'elle ne financera plus les projets qui dégagent plus de 650 grammes de CO2 par kilowattheure produit. Dans ces conditions, aucune centrale à charbon ne pourra être financée. En France, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) suit. La Kreditanstalt für Wiederaufbau (KfW) va-t-elle faire de même en Allemagne ? C'est la grande question. Quoi qu'il en soit, on est quand même sur une voie de verdissement et de complément au SCEQE. Cela ne soutiendra pas le prix du CO2 mais c'est une autre approche.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion