J'évoquerai pour ma part l'université de Toulouse, qui a aussi un centre important d'études de genre, avec l'émergence de premiers groupements de recherche dès les années soixante-dix. Le colloque de Toulouse en 1982, intitulé « Femmes, féminisme et recherche » a constitué une étape importante dans l'institutionnalisation des études sur le genre. À la suite de ce colloque, plusieurs études sur le féminisme, les femmes et les rapports sociaux entre les hommes et les femmes ont été financées par le CNRS.
En tant que maîtresse de conférences à l'université de Toulouse, je m'inscris dans cet héritage depuis dix ans. Mon poste de sociologue sur les rapports sociaux de sexe est l'héritage d'un poste créé en 1991 par le ministère de l'enseignement supérieur sous la pression de groupes comme l'Association nationale des études féministes (ANEF), qui faisait dès les années quatre-vingt remonter les besoins en enseignement concernant les études sur le genre. Ces postes, peu nombreux, ont réussi peu ou prou à perdurer au fil des années.
L'équipe de recherche « Simone – SAGESSE », qui signifie « Savoir, genre et rapports sociaux de sexe », a structuré les études sur le genre de façon interdisciplinaire entre 1986 et 2006. Elle travaillait sur des questions de politique et de travail et regroupait essentiellement des sociologues, mais aussi des historiens. Au milieu des années deux mille, il a fallu regrouper des laboratoires qui avaient une taille trop restreinte. Notre laboratoire étant trop petit avec dix chercheurs, il a dû intégrer le Centre d'étude et de recherche « Travail, organisation, pouvoirs » (CERTOP) au sein du CNRS. Nous sommes passés du statut d'équipe de recherche avec un statut dédié à un axe d'un laboratoire de recherche. Nous avons été bien accueillis mais cela a été mal vécu car au fil des années, cela a impliqué des baisses de crédits et des départs à la retraite non remplacés. Nous sommes très actifs, mais peu nombreux alors que la demande n'a cessé d'augmenter sur ces sujets depuis dix ans. On constate un véritable engouement et une forte demande venant de la France et de l'étranger. Compte tenu du contexte actuel de la recherche et de l'évolution de l'enseignement supérieur, nous sommes assez pessimistes sur la possibilité de création de postes.
À Toulouse, nous avons toujours été partie prenante de structures nationales. Nous avons ainsi beaucoup contribué à l'activité de l'Association nationale des études féministes (ANEF) depuis les années quatre-vingt en faisant en sorte d'avoir systématiquement une représentante toulousaine au conseil d'administration et en tentant de mobiliser les pouvoirs publics sur ces questions. On a participé à des réseaux de diffusion de la recherche comme le réseau interdisciplinaire national sur le genre (RING) ou le réseau « Marché du travail et genre » (MAGE), qui est un groupement de recherche existant depuis plus de vingt ans et dont je suis coprésidente. Nous participons aussi à l'Institut du genre.
Nous avons essayé de structurer la recherche sur le genre à Toulouse. L'équipe « Simone Sagesse » a fait preuve d'un vrai dynamisme qui a permis au fil du temps à d'autres disciplines de s'emparer de cette question. Nous sommes structurés depuis une dizaine d'années, toutes disciplines confondues, autour d'un réseau qui s'appelle l'Arpège – qui signifie « approche pluridisciplinaire du genre » – qui réunit quatre-vingt enseignants et chercheurs et quarante docteurs essentiellement dans le domaine des sciences sociales. Nous avons des difficultés pour faire vivre ce réseau dans un monde régi par le financement par projet. Cela constitue cependant un lieu de rencontre pour les chercheurs mais aussi pour les doctorants qui traitent des études sur le genre, qui ont souvent plus de points communs entre eux qu'avec les autres doctorants de leur discipline. Nous organisons également un séminaire doctoral. On essaye de faire pérenniser cette structure. Cela nous a mené à créer un master à la carte sur ces questions.