Intervention de Jean-Paul Bacquet

Réunion du 5 juillet 2016 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Bacquet :

J'ai, tout d'abord, apprécié, que vous ayez évoqué sans retenue les difficultés qui nous attendent et, surtout, que vous ayez exprimé un certain nombre de doutes. Je préfère cela à ceux qui s'expriment, ou s'exprimaient, avec des certitudes. Je préfère de loin le langage que vous avez tenu avec tous les doutes que vous avez exprimés.

Quelque chose m'a étonné. Le lundi qui a suivi le Brexit, on a eu l'impression que tout le monde était étonné, que ce soient les Anglais ou les Français, que personne n'avait imaginé que cela pouvait se produire. Cela me semble d'une naïveté sans pareil. La même naïveté que les sondages expriment en disant que s'il y avait un référendum en France, il y aurait 30 % pour la sortie. Je pense que le résultat serait le même en France. D'ailleurs, il suffit d'analyser le résultat du vote. Vous avez parlé de mensonge, de populisme, du problème de l'immigration, comme vient de l'évoquer notre collègue. Cela ne touchait pas le milieu de la finance, qui ont voté pour le maintien mais les quartiers populaires, les quartiers pauvres, ceux qui vivent des difficultés. Je me rappelle de la phrase de François Mitterrand qui disait que « la France est notre patrie, l'Europe est notre avenir ». Ces personnes, quel avenir voient-elles dans l'Europe ? De la même façon, en France, les mêmes populations ne voient aucun avenir dans l'Europe et auraient la même réaction.

A chaque fois que j'exprimais mes doutes, j'ai toujours été remis en place par l'« eurobéatitude » qui devait être la position commune. L'« eurobéatitude » aujourd'hui, est à un croisement : soit nous allons vite, et je pense qu'il faut aller vite, soit on accentuera la déception et l'Europe ne sera jamais notre avenir. Quand je dis aller vite, ce n'est pas, comme on entend dans les médias, de savoir si la place financière future restera à Londres ou à Paris, où elle n'ira jamais d'ailleurs. Le peuple se soucie des aspects économiques mais il faut aussi que l'Europe retrouve une âme. Or, actuellement, il n'y en a pas. C'est incontestablement un échec. Personnellement, je considère que l'Europe est morte à Maastricht, non pas à cause du traité de Maastricht mais de sa non application. Maastricht contenait la monnaie unique, je considère que c'est une réussite mais, Maastricht prévoyait aussi une harmonisation sociale et fiscale. Aujourd'hui, nous avons les travailleurs détachés, les délocalisations d'entreprise en Europe, l'argent dans les îles anglo-normandes, au Luxembourg, etc… Maastricht prévoyait une politique européenne des affaires étrangères et une politique européenne de défense. Aujourd'hui, c'est la France qui assure seule la politique européenne de défense. Les autres ne paient même pas.

Il faut donc aller vite. Je crois qu'il ne faut pas s'embarrasser des réticences des uns et des autres car, sinon, nous aurons d'autres référendums et d'autres déceptions.

Enfin, sur la Russie, je vous remercie car vous nous avez donné des éléments qui diffèrent de la timidité habituelle qui consiste à dire qu'on ne peut rien faire. Vous avez dit que les Etats-Unis sont difficiles à comprendre en la matière et que la France est à l'initiative. Il y a une urgence à recréer une relation avec la Russie et notamment une relation économique forte.

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