Intervention de Jacques Myard

Réunion du 14 septembre 2016 à 10h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Myard :

Je rappelle que le commerce international n'a pas forcément besoin de tels accords : il croît, en dehors des périodes de crise, de 7 % par an. Il n'y a donc pas péril en la demeure et tout réglementer n'est pas une obligation.

Pour ce qui est, ensuite, de la transparence, je suis tout de même étonné de votre réaction. Vous dites que vous avez oeuvré pour rendre accessibles les documents relatifs à la négociation. Soit, mais, à un moment donné, on prend ses responsabilités et on les rend vraiment accessibles ! Ce n'est pas nous qui sommes soumis à la Commission européenne mais la Commission qui nous est soumise. Or l'accord qu'elle a pris avec les Américains est parfaitement scandaleux. C'est la Commission qui donne des injonctions aux États alors que c'est l'inverse qui doit être.

En ce qui concerne la possibilité ou non de poursuivre les négociations, je rappelle que le compromis de Luxembourg est toujours en vigueur et prévoit ce qui s'appelle un veto. Aussi, si vous avez raison d'exprimer fortement la position de la France, il faut, à un moment donné, frapper du poing sur la table.

Admettons qu'on aboutisse à un accord, tout dépendra du degré de son approbation par le congrès américain, car, faute d'un vote à majorité qualifiée, les États fédérés resteront libres. C'est donc le point qu'il faut éclaircir : l'accord sera-t-il approuvé par les deux tiers du congrès des États-Unis ou non ? Sinon, nous revivrons ce qui s'est passé avec la Société des nations (SDN).

J'en viens au CETA et au tribunal arbitral que vous avez institué. Les décisions de ce dernier seront-elles directement applicables en droit français ou relèveront-elles de la procédure de l'exequatur ? Car je vous assure que pour « canaliser » la justice des États-Unis, il faut se lever de bonne heure. Il faut donc bien border l'affaire et préciser que les tribunaux nationaux ne s'en occuperont pas, ce qui n'est pas gagné d'avance avec les cabinets américains.

Toujours concernant le CETA, reste l'important problème de la réciprocité. Avez-vous levé l'obligation, pour les entreprises françaises, d'entrer dans une entreprise conjointe pour pouvoir soumissionner à des marchés publics ? Comme vous savez, Bombardier, en France, répond directement aux appels d'offres tandis qu'Alstom doit, pour la même opération au Canada, passer par une entreprise conjointe. Ce handicap a-t-il bien été levé ?

Enfin, il est bon de disposer d'instruments de défense commerciale mais c'est encore mieux de s'en servir. Nous avons constaté que, à l'occasion de certaines récentes affaires, nous nous sommes couchés face à la Chine pour la seule raison que l'Allemagne s'était mise en travers. Il ne faut pas rêver, monsieur le secrétaire d'État, vous êtes à la tête d'une coalition et, comme le disait Foch : « Depuis que j'ai commandé une coalition, j'admire beaucoup moins Napoléon. »

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