Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 20 septembre 2016 à 15h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Alain Vidalies, secrétaire d'état chargé des transports, de la pêche et de la mer :

Je vous présente aujourd'hui une étape importante dans la réalisation du projet Charles-de-Gaulle Express, un service indispensable pour améliorer le lien entre le centre de Paris et son principal aéroport, au service du dynamisme de l'agglomération parisienne. Il permettra, à la fin de l'année 2023, de relier directement en vingt minutes l'aéroport Charles-de-Gaulle et la gare de l'Est.

Ce projet répond à deux enjeux : l'attractivité économique et touristique de l'Île-de-France et le développement durable.

Concernant l'attractivité économique et touristique, il n'est nul besoin de rappeler que l'agglomération parisienne est la deuxième métropole européenne ouverte sur le monde. Son activité économique est en grande partie tournée vers l'international, et l'activité touristique y est essentielle.

Paris est la première destination touristique du monde, avec 15 millions de visiteurs étrangers chaque année. Cette place a besoin d'être consolidée. L'aéroport Paris-Charles de Gaulle, le deuxième par sa taille en Europe, le neuvième à l'échelle mondiale par son trafic, est la principale porte d'entrée pour rejoindre Paris. L'amélioration de la liaison par un service rapide, direct et efficace vise donc à mieux répondre aux voyageurs venant à Paris et à donner une meilleure image, plus moderne, de notre pays. Une telle liaison existe déjà dans de nombreux aéroports internationaux comme Londres, Stockholm, Rome ou Hong-Kong.

La mise en service de cette liaison, prévue pour fin 2023, s'intègre par ailleurs dans la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, et de l'Exposition universelle de 2025, pour lesquels Paris est candidate. Le projet Charles-de-Gaulle Express est clairement un atout pour ces candidatures.

Le nombre de passagers de l'aéroport Paris-Charles de Gaulle connaît une croissance d'environ 3 % par an depuis 1995, et les perspectives de croissance à venir sont du même ordre. En revanche, les accès à l'aéroport, autoroutes A1, A3 et RER B, sont déjà fortement congestionnés. Alors que la durée nominale des trajets actuels entre Paris et l'aéroport est supérieure à trente minutes, elle peut atteindre jusqu'à une heure trente par l'autoroute en fonction des aléas. Sur le RER B, la cohabitation entre les voyageurs du quotidien et les voyageurs aériens souffre de la congestion aux heures de pointe, des nombreux arrêts et du manque d'espace pour les bagages. Créer la liaison Charles-de-Gaulle Express, c'est proposer aux voyageurs aériens venant à Paris une alternative attractive qui favorisera l'usage des transports en commun face à la route tout en soulageant le RER B.

Les études de trafic confirment l'intérêt de la liaison dans une logique de report modal, avec une prévision de 6 à 7 millions de voyageurs par an sur le nouveau service dès les premières années d'exploitation, alors que la part de la route dans la desserte de l'aéroport passerait de 56 % aujourd'hui à 40 %. Pour autant, cette nouvelle liaison s'inscrit en complémentarité avec l'ensemble des autres projets de transport en commun dans le cadre du nouveau Grand Paris. Charles-de-Gaulle Express, pensé pour les voyageurs aériens, avec des emplacements pour les bagages, des informations multilingues, permettra aux autres lignes, notamment le RER B et la nouvelle ligne 17 du Grand Paris Express, de bénéficier pleinement aux voyageurs du quotidien.

Les travaux, sur trente-deux kilomètres d'infrastructures, dont vingt-quatre sur le réseau existant, sont évalués à 1,4 milliard d'euros hors taxe, aux conditions économiques de 2014. Ce coût intègre notamment un véritable engagement du projet, à hauteur de plus de 130 millions, en faveur de la qualité des transports du quotidien. Ils correspondent notamment à des travaux substantiels sur le réseau existant pour assurer la robustesse et la régularité du RER B, de la ligne K du Transilien et du TER Picardie.

Ces travaux viennent s'ajouter aux considérables efforts d'investissement, réalisés il y a seulement quelques années, sur le RER B Nord et au nouveau schéma directeur du RER B qui est en cours de mise en oeuvre. Rappelons que le RER B possède ses voies dédiées et n'utilise pas nominalement les voies qui accueilleront le Charles-de-Gaulle Express. Les investissements prévus permettent de limiter la coexistence aux situations exceptionnelles.

Je veux ici saluer le travail partenarial mené avec le Syndicat des transports d'Île-de-France (STIF) pour s'assurer que le projet Charles-de-Gaulle Express permettra, en particulier, le maintien de la qualité de service du RER B. Les études vont se poursuivre en concertation avec le STIF et les exploitants du RER et du Transilien, pour affiner les investissements de robustesse inclus dans le projet CDG Express, dans le cadre de la délibération prise par le STIF.

Par ailleurs, l'insertion architecturale et urbaine du projet fait l'objet d'une attention particulière afin de préserver et d'améliorer le cadre de vie des riverains. Les élus et les populations concernées sont et seront étroitement associés à la définition des aménagements. Concernant plus spécifiquement le secteur de la Porte de la Chapelle, je voudrais saluer l'important travail réalisé avec la Ville de Paris pour définir les travaux d'accompagnement du projet qui ont été inscrits dans l'enveloppe globale. Je peux vous garantir ici que, grâce à ce travail, le projet du CDG Express est cohérent avec l'ensemble des projets d'aménagement de la Ville de Paris dans le secteur.

Le projet a bénéficié d'une déclaration d'utilité publique en 2008. Depuis, il n'a pas connu de modification sur son tracé, ses emprises et ses fonctionnalités, même si le travail continue, notamment sur les aspects que je viens de citer.

Compte tenu des évolutions intervenues par ailleurs sur le montage, le coût et le financement, une enquête publique modificative a eu lieu entre le 8 juin et le 12 juillet derniers. L'avis de la commission d'enquête est attendu pour la fin de ce mois, et la déclaration d'utilité publique modificative pour début 2017.

Concernant la maîtrise de l'impact sur l'environnement, je tiens à préciser que la société de projet devra déposer un dossier afin d'obtenir une autorisation environnementale unique. Ce dossier comprendra à ce titre une nouvelle étude d'impact sur l'environnement, qui inclura notamment une étude acoustique complémentaire, un bilan faune-flore complémentaire, de nouvelles cartes prenant en compte la ligne 17. Elle sera soumise à l'appréciation du public au cours d'une enquête publique, après avis de l'Autorité environnementale. Cette enquête est prévue dans le courant de l'année 2018.

Il résulte de ce qui précède que le public a disposé et bénéficiera encore de l'ensemble des informations nécessaires à l'exacte appréhension du projet et à l'évolution de certaines de ses composantes, et que le dossier d'enquête publique a été actualisé en cohérence avec la position du Conseil d'État.

Concernant le montage financier, prenant acte de l'échec de la concession privée en 2011, la nouvelle approche repose aujourd'hui sur la séparation des missions de construction de l'infrastructure et d'exploitation du service de transport ferroviaire.

La mission de conception, de construction, de financement et d'entretien de l'infrastructure sera attribuée à une société de projet, filiale à créer entre SNCF Réseau et Aéroports de Paris (ADP). La mobilisation et l'engagement de ces deux acteurs sont apparus incontournables pour la réussite de ce projet. Et pour Aéroports de Paris, gestionnaire de l'aéroport, ce projet est une condition fondamentale de son développement. Pour ce qui est de la mission d'exploitation du service de transport ferroviaire, elle sera attribuée par l'État à un tiers.

Le projet de loi qui vous est soumis vise à donner les fondements législatifs qui rendront possible ce projet.

L'article 1er ratifie l'ordonnance publiée en février de cette année, suite à l'avis favorable de la Commission européenne sur ce montage. L'ordonnance permet principalement à l'État de signer en gré à gré un contrat de concession de travaux avec la société de projet à créer, associant SNCF Réseau et ADP et, le cas échéant, un tiers investisseur. Elle encadre les obligations des parties et s'assure que la société s'appuie sur les compétences des gestionnaires que sont SNCF Réseau, Aéroports de Paris et SNCF Mobilités, notamment à travers Gares & Connexions.

L'article 2 permet à l'État de désigner l'exploitant par voie d'appel d'offres, selon les mêmes modalités que celles retenues pour le réseau de transport du Grand Paris Express qui sera progressivement mis en service au même horizon que CDG Express. De fait, les spécificités du nouveau service en font une liaison non comparable aux services de transport ferroviaire de personnes actuellement assuré par SNCF Mobilités sur le réseau national.

Un mot sur le modèle économique de ce projet, même s'il n'est pas directement visé par ce projet de loi.

Je vous confirme, tout d'abord, que la construction de ce projet sera financée sans subvention publique. Un financement, dans le cadre du plan Juncker, a été par ailleurs sollicité.

Le plan de financement repose essentiellement sur la billetterie, qui permettra de payer les coûts d'exploitation du service et les péages ferroviaires aux gestionnaires d'infrastructure. Toutefois, les résultats de la modélisation indiquent que les ressources financières tirées de la billetterie pourraient ne pas être suffisantes. C'est pourquoi il est envisagé d'affecter à la société de projet le produit d'une taxe dédiée, prélevée sur les voyageurs aériens. Elle ne s'appliquerait ni aux passagers de l'aéroport de Paris-Orly, ni aux passagers en correspondance à l'aéroport Paris-Charles de Gaulle.

Cette piste reste à l'étude aujourd'hui et n'a pas fait l'objet de décision définitive à ce jour, sachant qu'elle devra, le moment venu, être préalablement autorisée par la Commission européenne. J'ai entendu les réactions occasionnées par cette hypothèse, en particulier celles des compagnies aériennes. Le travail se poursuit donc afin de trouver une solution acceptable par tous.

Je termine en soulignant que nous avons une occasion historique de réaliser ce projet, et cette responsabilité nous oblige collectivement. Au cours des derniers mois, des étapes importantes de ce projet ont pu être franchies, avec la mobilisation de tous les acteurs concernés. Mais ce texte donne le véritable « top départ » pour préparer et réussir la mise en oeuvre de cette liaison dans la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Si nous manquons cette occasion, l'amélioration de la liaison entre l'agglomération parisienne et son plus grand aéroport international ne pourra être envisagée avant de nombreuses années, voire des décennies.

J'espère vous avoir convaincus de l'importance de voter ce projet de loi pour la réussite de ce projet.

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