Intervention de Bertrand Pancher

Réunion du 20 septembre 2016 à 15h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

Certes, il s'agit d'un beau projet. Certes, il faut que cette voie soit mise en place le plus rapidement possible. La question est de savoir si l'on doit donner un chèque en blanc à l'État pour l'engager avec un financement aussi farfelu, dont on ne connaît pas précisément les conditions. Jamais je n'avais imaginé qu'on puisse, comme parlementaires, voter des projets avec des analyses d'impact aussi réduites !

La question du financement est d'ailleurs moins farfelue que scandaleuse, à entendre ce qu'en ont dit les orateurs qui m'ont précédé. Comment engager un tel projet, quand on connaît l'état d'endettement du système ferroviaire français ? De 40 milliards, sa dette devrait passer, selon le rapport que le Gouvernement a envoyé ce matin au Parlement, à 50 milliards voire à 70. C'est comme si on pouvait laisser cette dette à vie au secteur ferroviaire parce que ce n'est pas notre affaire !

Et on va lancer un projet qui date de dix ans comme à la belle époque du XXe siècle, en le faisant financer par la branche ferroviaire de la SNCF que l'on fait entrer dans le capital de la société de projet à hauteur de 50 %. En cas de problème, SNCF Réseau paiera comme l'autre co-actionnaire. Or le risque est réel. Les exemples d'échec sont nombreux, à commencer par celui de la ligne Perpignan-Figueras.

Beaucoup s'interrogent sur la contribution des passagers. Certes, un billet à 24-25 euros correspond à la moyenne internationale, mais en France, où personne ne paie la réalité du coût du transport, cela semble tout de même assez élevé. Quant au coût des travaux, estimé à 1,4 milliard d'euros, tout le monde sait qu'il sera dépassé.

Et puis, que fait-on de la « règle d'or » ? Monsieur le secrétaire d'État, le groupe UDI vous a beaucoup aidé sur la réforme ferroviaire, qui instituait la « règle d'or » afin que l'on ne s'engage plus dans des investissements créant de nouveaux déficits et de nouvelles dettes. Or le premier engagement qu'on nous appelle à voter trahit cette « règle d'or » ! Pourquoi solliciter SNCF Réseau à hauteur de 200-250 millions d'euros ? C'est choquant !

Qui devrait financer cette infrastructure ? Comme partout ailleurs, l'État et les collectivités. Mais en dehors de quelques-uns, notamment au groupe socialiste, auxquels je tiens à rendre hommage, personne ici n'a défendu la taxe poids lourds, et l'AFITF n'a plus de ressources. On n'a pas non plus voulu augmenter la taxe sur les carburants au moment où leur niveau était très bas. Pourtant, 1 centime d'euro d'augmentation aurait rapporté 300 millions d'euros et on aurait pu trouver des financements sans problème. Tout le monde, élus comme Gouvernement, est d'accord pour voter ce projet génial – je dois dire que si j'étais élu francilien, je voterais pour. Reste qu'on ne sait pas très bien qui va payer. SNCF Réseau ? Air France ? Mais que vient faire Air France dans cette affaire ? Nulle part au monde une compagnie aérienne n'est autant taxée !

Il faut évidemment avancer dans la mise en place de cette infrastructure, mais pas comme cela. Je souhaite que le Gouvernement puisse nous rassurer avant le débat public, en nous proposant un financement très clair, qui ne fasse pas peser de risques sur des sociétés publiques, ou à participation publique, aussi déficitaires.

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