Intervention de Alain Ballay

Réunion du 21 septembre 2016 à 17h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Ballay, rapporteur :

L'article 166 du projet de loi de modernisation de notre système de santé habilitait le Gouvernement à légiférer par ordonnances, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, pour prendre toutes mesures visant à instituer un nouvel établissement public : l'Agence nationale de santé publique, dénommée Santé publique France.

Cette agence, dont l'existence est effective depuis le mois de mai dernier, a vocation à reprendre les missions exercées jusqu'alors par l'Institut de veille sanitaire, l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé et l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires. Elle s'inscrit donc dans le continuum des missions de ces trois établissements, dans une optique de service à l'ensemble de la population.

Sans revenir sur l'historique de la création de l'Agence nationale de santé publique, il me semble néanmoins important de rappeler en quelques mots la raison d'être de Santé publique France.

La création de l'Agence fait suite au constat de l'existence d'un trop grand nombre d'acteurs en matière de prévention et de veille sanitaire, la plupart des agences de santé ayant été créées en réaction aux crises sanitaires, sans cohérence d'ensemble.

Compte tenu des enjeux, notamment humains, les trois agences regroupant plus de 600 agents, le Gouvernement a confié à M. Bourdillon un vaste travail de concertation. Celui-ci a débouché, en juin 2015, sur un rapport de préfiguration qui fixait les grandes orientations de l'Agence et énonçait un ensemble de recommandations relatives notamment à sa gouvernance et à ses modalités de fonctionnement.

L'ordonnance du 14 avril 2016 est conforme à l'habilitation et aux préconisations du rapport de préfiguration, et je vais vous en donner plusieurs illustrations.

Tout d'abord, elle respecte le souhait d'une création à droit constant. L'Agence reprend ainsi l'intégralité des missions anciennement dévolues à l'InVS, à l'INPES et à l'EPRUS, c'est-à-dire la prévention, l'éducation et la promotion de la santé, la surveillance et l'observation permanentes de l'état de santé de la population, la veille et la vigilance sanitaires, la gestion de la réserve sanitaire et des stocks stratégiques, et la participation au système d'alerte sanitaire. Elle est donc bien un centre de référence porteur d'une excellence scientifique garante de l'intérêt général et de l'équité envers les populations.

Avec l'épidémiologie, la prévention est l'un des principaux chevaux de bataille de l'Agence. C'est aussi l'aspect le plus visible de son action puisqu'elle se traduit le plus souvent par des campagnes de prévention, comme la campagne « Moi(s) sans tabac », qui se déroulera au mois de novembre prochain.

Mais l'importance de certaines missions de l'Agence reste parfois méconnue. C'est le cas, par exemple, de la réserve sanitaire, qui a été mobilisée, au cours des six derniers mois, autant que sur la période 2007-2013, et sur des terrains très différents. Des réservistes ont, par exemple, été envoyés dans les maternités de Guyane et de Martinique pour prévenir des risques du virus Zika ; d'autres ont été envoyés en urgence à Nice, pour apporter une assistance psychologique aux victimes de l'attentat du 14 juillet et à leurs proches.

Si le regroupement des missions au sein d'une agence unique s'est fait à droit constant, cela ne signifie pas que les compétences respectives des trois anciennes agences ont été simplement juxtaposées. Au contraire, la création de l'Agence vise à encourager le développement de synergies, pour améliorer la cohérence et l'efficacité des actions en matière sanitaire, ainsi que le service offert aux populations.

Le rapport de préfiguration avait particulièrement insisté sur la nécessité d'ancrer l'action de l'Agence au niveau régional, ainsi qu'en outre-mer. Le message est passé, puisque l'ordonnance précise que l'Agence peut s'appuyer sur un réseau national de santé publique, qu'elle organise et anime, et surtout qu'elle dispose de seize cellules d'intervention en région. Ces cellules sont déjà opérationnelles. Elles permettent véritablement de décliner, au niveau régional, les actions de prévention et de veille sanitaire de l'Agence. Le travail se fait en lien étroit avec les agences régionales de santé (ARS).

S'agissant des modalités de gouvernance de l'Agence, l'ordonnance a également suivi les préconisations du rapport Bourdillon. La gouvernance s'articule ainsi autour de quatre instances, qui sont sur le point d'être constituées : le conseil d'administration, le conseil scientifique, qui aura notamment pour mission de développer les activités de recherche de l'Agence, le conseil d'éthique et de déontologie, garant de l'indépendance de l'Agence et de ses recommandations, et le conseil d'orientation et de dialogue, qui a vocation à marquer l'ouverture de l'Agence sur la société civile.

Voici, pour les prochains mois, les priorités de l'Agence telles qu'elles m'ont été présentées par le directeur général. D'abord, la prévention, qui se focalise à la fois sur les déterminants – tabac, alcool, suicide – et sur la population, avec pour cible la petite enfance et la jeunesse, mais aussi les personnes âgées, au regard de la perte d'autonomie, de l'isolement et de la prévention des chutes. Ensuite, la mobilisation de la réserve sanitaire dont j'ai déjà parlé, ainsi que la surveillance, notamment des maladies transmissibles et des grandes maladies, telles que le diabète, les maladies pulmonaires ou la maladie d'Alzheimer. Enfin, dans les volets santé-travail et santé-environnement, l'Agence se préoccupera de la pollution des sols, de la pollution atmosphérique ou encore de l'émergence des troubles musculo-squelettiques (TMS) ou du burn out, sur lequel la Commission travaille actuellement.

L'ordonnance n'appelle donc pas de modification particulière à ce stade. J'en veux pour preuve l'absence d'amendements déposés à ce jour sur le projet de loi.

Pour conclure, l'Agence nationale de santé publique est un formidable outil de prévention, de veille sanitaire et d'intervention sanitaire d'urgence. Comme la plupart des pays industrialisés, la France est désormais dotée d'une structure solide qui a vocation à connaître, expliquer, préserver, protéger et promouvoir l'état de santé des populations, et a la capacité d'intervenir rapidement en cas de crise sanitaire. Pour préserver cet outil, il nous appartiendra collectivement de veiller à ce que l'Agence dispose des moyens suffisants pour accomplir au mieux ses missions.

Mes chers collègues, je vous invite donc à voter ce projet de loi.

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