Madame la présidente, monsieur le rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, mesdames, messieurs les députés, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui est une étape importante dans la réalisation du projet Charles-de-Gaulle Express – CDG Express – ainsi que l’a souhaité le Gouvernement. CDG Express est un service indispensable pour améliorer le lien entre Paris et son principal aéroport au profit du dynamisme de l’agglomération parisienne. Il permettra, fin 2023, de relier directement, en vingt minutes, l’aéroport Charles-de-Gaulle et la gare de l’Est.
Le projet répond à deux enjeux principaux : l’attractivité économique et touristique de l’Île-de-France et le développement durable. concernant l’attractivité économique et touristique, il n’est nul besoin de rappeler que l’agglomération parisienne est la deuxième métropole européenne, ouverte sur le monde. Son activité économique est en grande partie tournée vers l’international et l’activité touristique y est essentielle. Paris est en effet la première destination touristique au monde, avec 15 millions de visiteurs étrangers chaque année, et doit consolider cette place. L’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, le deuxième d’Europe par sa taille et le neuvième à l’échelle mondiale par son trafic, est la principale porte d’entrée pour rejoindre Paris.
L’amélioration de la liaison par un service rapide, direct et efficace vise donc à mieux satisfaire les voyageurs arrivant à Paris et à donner une image plus moderne de notre pays. Une telle liaison existe déjà dans de nombreux aéroports internationaux tels que ceux de Londres, Stockholm, Rome ou Hong Kong. La mise en service de cette liaison, prévue pour fin 2023, s’intègre par ailleurs dans la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, pour l’organisation desquels Paris est candidat, et de l’Exposition universelle de 2025. Le projet CDG Express est clairement un atout pour ces candidatures.
Le nombre de passagers aériens de l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle connaît une croissance d’environ 3 % par an depuis 1995 et les perspectives de croissance sont du même ordre. En revanche, les accès à l’aéroport par les autoroutes Al et A3 ou par le RER B sont déjà très largement congestionnés. Alors que la durée nominale du trajet actuel entre Paris et l’aéroport est supérieure à trente minutes, elle peut atteindre une heure trente par l’autoroute aux heures de pointe selon les aléas. Sur le RER B, la cohabitation entre voyageurs du quotidien et voyageurs aériens souffre déjà de la congestion aux heures de pointe, des nombreux arrêts et du manque d’espace pour les bagages.
Créer la liaison CDG Express, c’est proposer aux voyageurs aériens arrivant à Paris une solution alternative attractive qui favorisera l’usage des transports en commun face à la route tout en soulageant le RER B. Les études de trafic confirment l’intérêt d’une telle liaison s’inscrivant dans une logique de report modal et avancent une prévision de 6 à 7 millions de voyageurs par an sur le nouveau service dès la première année d’exploitation, alors que la part de la route pour la desserte de l’aéroport passera de 56 % à 40 %. Pour autant, cette nouvelle liaison s’inscrit en complémentarité avec l’ensemble des autres projets de transports en commun dans le cadre du Nouveau Grand Paris. CDG Express, pensé pour les voyageurs aériens qui profiteront d’emplacements pour les bagages et d’informations multilingues, permet aux autres lignes, notamment le RER B et la nouvelle ligne 17 du Grand Paris Express, de bénéficier pleinement aux voyageurs du quotidien.
Le coût des travaux sur les 32 kilomètres d’infrastructure, dont 24 sur le réseau existant, est évalué à 1,4 milliard d’euros hors taxes aux conditions économiques de 2014. Ce coût intègre notamment un véritable engagement, à hauteur de près de 130 millions d’euros, pour les transports du quotidien correspondant notamment à des travaux substantiels sur le réseau existant visant à assurer la robustesse et la régularité du RER B, de la ligne K du Transilien et des TER Picardie. Ces travaux viennent s’ajouter au considérable effort d’investissement réalisé il y a seulement quelques années sur le RER B Nord+ et au nouveau schéma directeur du RER B qui lui succède et qui est en cours de mise en oeuvre.
Rappelons à ce titre que le RER B possède ses voies dédiées et n’utilise pas nominalement les voies qui accueilleront CDG Express. Les investissements prévus permettent de limiter la coexistence des deux services sur les mêmes voies aux seules situations exceptionnelles. Je salue ici le travail de partenariat mené avec le Syndicat des transports d’Île-de-France – STIF – pour s’assurer que le projet CDG Express permettra le maintien de la qualité de service du RER B en particulier.
Les études seront poursuivies en concertation avec le STIF et les exploitants du RER et du Transilien afin d’affiner les investissements de robustesse inclus dans ce projet dans le cadre de la délibération menée par le STIF. La concertation avec les acteurs du territoire mérite d’être poursuivie afin de les rassurer sur ce point. Par ailleurs, l’insertion architecturale et urbaine du projet fait l’objet d’une attention particulière afin de préserver et d’améliorer le cadre de vie des riverains. Les élus et populations concernés sont et seront étroitement associés à la définition des aménagements.
Concernant plus spécifiquement le secteur de la Porte de la Chapelle, je salue l’important travail réalisé avec la Ville de Paris pour définir les travaux d’accompagnement du projet, qui ont été inscrits dans l’enveloppe globale. Je peux vous garantir ici que, grâce à ce travail, le projet CDG Express est cohérent avec l’ensemble des projets d’aménagement de la ville dans le secteur. La concertation avec les acteurs locaux mérite également d’être poursuivie.
Le projet a bénéficié d’une déclaration d’utilité publique en 2008. Depuis, ni son tracé, ni ses emprises, ni ses fonctionnalités n’ont connu de modification, même si le travail continue, notamment sur les aspects que je viens d’évoquer. Par ailleurs, compte tenu des évolutions du montage, du coût et du financement du projet, une enquête publique modificative a eu lieu entre le 8 juin et le 12 juillet derniers. L’avis de la commission d’enquête est attendu pour la fin du mois et la déclaration d’utilité publique modificative pour début 2017.
Au sujet de la maîtrise des impacts sur l’environnement, je tiens à préciser que la société de projet devra déposer un dossier afin d’obtenir une autorisation environnementale unique. Ce dossier comprendra une nouvelle étude d’impact sur l’environnement qui inclura notamment une étude acoustique complémentaire, un bilan faune-flore complémentaire et de nouvelles cartes prenant en compte la ligne 17. Elle sera soumise à l’appréciation du public au cours d’une enquête publique, actuellement prévue pour 2018, après avis de l’Autorité environnementale. Il résulte de ce qui précède que le public a disposé et disposera encore de l’ensemble des informations nécessaires à l’exacte appréhension du projet et de l’évolution de certaines de ses composantes et que le dossier d’enquête publique a été actualisé en cohérence avec la position du Conseil d’État.
S’agissant du montage économique, la nouvelle approche, prenant acte de l’échec de la concession privée survenu en 2011, repose désormais sur la séparation des missions de construction de l’infrastructure et d’exploitation du service de transport ferroviaire. D’une part, c’est à une société de projet, filiale à créer entre SNCF Réseau et Aéroports de Paris – ADP –, que sera confiée l’attribution de la mission de conception, de construction, de financement et d’entretien de l’infrastructure. La mobilisation et l’engagement de deux acteurs ont semblé incontournables pour la réussite du projet, en particulier le gestionnaire de l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle, pour qui ce projet est une condition fondamentale de développement. D’autre part, la mission d’exploitation du service de transport ferroviaire sera confiée à un opérateur ferroviaire.
Le projet de loi qui vous est soumis, mesdames, messieurs les députés, vise à créer les fondements législatifs qui rendront possible ce projet. L’article 1er ratifie l’ordonnance du 18 février 2016 suite à l’avis favorable de la Commission européenne sur ce montage. Celle-ci permet principalement à l’État de signer en gré à gré un contrat de concession de travaux avec la société de projet à créer, associant SNCF Réseau et ADP, et le cas échéant un tiers investisseur. Elle encadre les obligations des parties et s’assure que la société s’appuie sur les compétences des gestionnaires que sont SNCF Réseau, Aéroports de Paris et la branche Gares et Connexions de SNCF Mobilités.
L’article 2 permet à l’État de désigner l’exploitant par voie d’appel d’offres selon les mêmes modalités que celles retenues pour le réseau de transport du Grand Paris Express qui sera progressivement mis en service au même horizon que CDG Express. De fait, les spécificités du nouveau service CDG Express en font une liaison qui n’est pas comparable aux services de transport ferroviaire de personnes actuellement assurés par SNCF Mobilités sur le réseau ferré national.
Enfin, je dirai un mot du modèle économique de ce projet, même s’il n’est pas directement visé par le texte de loi. Je confirme tout d’abord que ce projet sera financé sans subvention publique. Un financement dans le cadre du plan Juncker a par ailleurs été sollicité. Le plan de financement repose essentiellement sur la billetterie qui financera les coûts d’exploitation du service et les péages ferroviaires confiés aux gestionnaires d’infrastructure. Toutefois, les résultats de la modélisation indiquent que les ressources financières tirées de la billetterie pourraient ne pas être suffisantes. C’est pourquoi il est envisagé d’affecter à la société de projet le produit d’une taxe dédiée prélevée sur les voyageurs aériens. Cette taxe ne s’appliquerait ni aux passagers de l’aéroport Paris-Orly ni aux passagers en correspondance à l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle.
Cette piste reste à l’étude, et n’a pas fait l’objet de décision définitive à ce jour, sachant qu’elle devra, le moment venu, être préalablement autorisée par la Commission européenne. J’ai entendu les réactions à cette hypothèse, en particulier celles des compagnies aériennes. Le travail se poursuit afin de trouver une solution acceptable par tous.
S’agissant de la possibilité pour SNCF Réseau d’investir dans cette société de projet, la loi portant réforme ferroviaire impose désormais l’application d’une règle d’or au financement par SNCF Réseau des projets de développement. Afin d’éviter tout risque juridique, et comme j’ai eu l’occasion de l’indiquer lors de l’examen de ce texte en commission, le Gouvernement a déposé un amendement, que je soutiendrai, visant à explicitement faire en sorte que la règle d’or ne s’applique pas à ce projet, compte tenu de sa spécificité.
En effet, ce projet comprend une part importante d’investissements de renouvellement et d’amélioration de la performance du réseau existant, tant sur les voies empruntées par le CDG Express que sur d’autres voies. Par ailleurs, la participation de SNCF Réseau prend la forme de fonds propres à une société de projet, avec un montant et des risques très réduits par rapport à ce qui aurait été le cas si l’EPIC SNCF Réseau avait dû assumer lui-même l’investissement.
Au cours des derniers mois, des étapes importantes de ce projet ont pu être franchies, avec la mobilisation des acteurs concernés. Mais cette loi donne le véritable top départ pour préparer et réussir la mise en oeuvre de cette liaison dans la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Si nous manquons cette occasion, l’amélioration de la liaison entre l’agglomération parisienne et son plus grand aéroport international ne pourra être envisagée avant de nombreuses années.
Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, j’espère vous avoir convaincus de l’importance de voter ce texte, pour la réussite de ce projet majeur.