Intervention de François de Rugy

Séance en hémicycle du 27 septembre 2016 à 15h00
Liaison ferroviaire entre paris et l'aéroport paris-charles-de-gaulle — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

Contrairement à beaucoup de collègues qui se sont exprimés avant moi dans ce débat, je ne suis pas directement concerné par ce projet. Mais je tiens à rappeler à cette occasion que l’Île-de-France est sans doute la région où les investissements en matière d’infrastructures de transports, en particulier de transports ferroviaires, sont les plus nombreux, et ce depuis très longtemps. C’est normal au vu du nombre de Franciliens. Il ne serait toutefois pas inintéressant de comparer le soutien public national aux infrastructures et à l’exploitation des transports rapporté à la population de la région Île-de-France avec celui des autres régions.

En tout état de cause, je considère que nous sommes tous concernés par la desserte du seul aéroport véritablement international, du seul hub international qu’est Roissy. Il est tout à fait logique que nous débattions de ce sujet à l’Assemblée nationale, bien qu’il soit rare, et vous pourrez le confirmer, monsieur le secrétaire d’État, que nous discutions ici d’une infrastructure de transports, quels que soient sa localisation, son type ou son importance. Contrairement à certains collègues qui critiquent la méthode, le recours aux ordonnances, je vois donc dans ce texte un motif de satisfaction, dans la mesure où il nous permet d’en discuter alors que les autres infrastructures ne font jamais l’objet d’un débat parlementaire.

J’aimerais rappeler les objectifs des écologistes en matière de transports. Notre premier objectif est que la France dispose d’infrastructures ferroviaires performantes, ce qui nécessite de veiller au bon fonctionnement des infrastructures existantes et d’en construire de nouvelles lorsque c’est nécessaire. Il faut par ailleurs favoriser l’intermodalité, c’est-à-dire la complémentarité entre les modes de transports. Cela peut paraître évident, mais il est bon de rappeler que pour les transports très grande distance, l’international, voire l’intercontinental, s’agissant de Roissy, la voie aérienne est la plus pertinente ; pour l’échelle nationale, régionale ou locale, c’est le ferroviaire.

Si nous voulons favoriser l’usage du train, ce n’est pas par fétichisme : c’est parce que tous les bilans écologiques montrent que c’est le mode de transport qui a l’impact écologique le plus faible par rapport aux autres, en particulier en termes d’empreinte carbone, une donnée dont on parle beaucoup aujourd’hui dans le cadre de la lutte contre l’effet de serre.

Cependant, pour que le transport ferroviaire soit une solution crédible – en temps qu’adjoint au maire de Nantes en charge des transports et des déplacements pendant sept ans, j’ai pu le vérifier quelle que soit l’échelle – il faut qu’il soit rapide et fiable. Il est important à la base qu’il soit ponctuel : les transports, notamment en Île-de-France, ont parfois quelques problèmes de ponctualité, et il est important d’y faire face concrètement. Il faut cependant surtout qu’il soit rapide, et j’y insiste : pour que le transport ferroviaire soit compétitif par rapport à la voiture, qui est son principal concurrent, y compris sur un axe comme celui-là, il faut que le temps de parcours garanti soit nettement inférieur. Par ses caractéristiques, le projet CDG Express répond selon nous à ces objectifs que nous voulons favoriser.

Examinons la desserte des aéroports, en France et à l’étranger. À Brême, par exemple, certes une ville de taille plus modeste que Paris et son agglomération, on trouve à la sortie de l’aéroport d’un côté les taxis, et de l’autre le tramway qui mène directement au centre-ville. Plus près de nous, à Lyon, la métropole, le département et la région ont investi voilà quelques années dans une liaison express directe de type tram-train, dénommée Rhônexpress, qui permet de relier l’aéroport Saint-Exupéry à la gare de la Part-Dieu, dans le centre-ville, en trente minutes.

A contrario, l’aéroport de Nantes – je parle de l’aéroport existant, et non pas du projet que l’on traîne comme un boulet depuis des années ! – dispose certes d’une double desserte ferroviaire, mais qui n’est malheureusement pas activée : il n’y a pas de gare permettant de le relier au centre-ville. Je suis le premier à le regretter, monsieur le secrétaire d’État : ce serait simple, efficace, et cela permettrait d’éviter de construire un autre aéroport ailleurs, selon une proposition qui n’est assortie d’aucun projet de desserte, si vous voyez de quoi je veux parler.

Concernant l’aéroport de Roissy, nous partageons l’objectif, évoqué par d’autres collègues avant moi, de faire baisser le trafic automobile, ou du moins d’en contenir la croissance, sur l’autoroute A1, une nécessité qui saute aux yeux.

Se pose toutefois la question du financement, sur laquelle je terminerai, car il faut être concret quand on parle des projets d’investissement et se demander qui les finance et comment.

Il est prévu une part d’autofinancement. Le tarif du billet, de 24 euros, est considéré par certains comme élevé, mais si on le compare à celui d’une course en taxi ou d’autres navettes, il est tout à fait compétitif. En tout état de cause, il est moins cher que le taxi, et c’est très bien.

Toutefois, nous savons que cette source de financement ne suffira pas, et il faut clairement répondre à la question des autres sources, monsieur le secrétaire d’État. Mes collègues écologistes et moi-même plaidons pour que ce soient les utilisateurs de Roissy, les passagers des avions, qui paient – c’est-à-dire pour que la taxe sur les billets d’avion soit la contribution pérenne au financement de cet investissement et couvre l’éventuel déficit d’exploitation.

En effet, disons-le : la SNCF ne pourra pas financer ce projet sur ses fonds propres, pas plus qu’Aéroports de Paris ou les collectivités locales. Il ne doit pas non plus y avoir d’effet d’éviction par rapport à d’autres investissements dans le transport ferroviaire de voyageurs dans ce secteur de l’agglomération parisienne ou dans la région dans son ensemble. Je soutiens donc ce projet sous réserve qu’il y ait des assurances claires quant à son financement.

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