Intervention de Alain Vidalies

Séance en hémicycle du 27 septembre 2016 à 15h00
Liaison ferroviaire entre paris et l'aéroport paris-charles-de-gaulle — Discussion générale

Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche :

Pour ce qui est du financement, nous avons choisi de constituer une société de projet, dont on connaît aujourd’hui les actionnaires – du moins pour l’essentiel, à savoir SNCF Réseau et ADP –, avec la possibilité de leur adjoindre un tiers, ce qui est même souhaitable et qui est du reste le sens du texte qui vous est soumis. Certains – c’est, je crois, le cas de M. le rapporteur – ont évoqué à ce propos la Caisse des dépôts et consignations. Une chose est certaine, en tout cas, c’est que SNCF Réseau et ADP feront partie de ceux qui construiront l’infrastructure et devront – c’est tout le problème ! – se tourner vers le système bancaire pour compléter par l’emprunt les fonds propres qu’ils apporteront, du fait de la décision que nous avons prise de ne pas apporter de financement public.

J’ajoute, sans trop y insister, que ce projet a une histoire et que, si nous reprenons un projet ancien qui était certes une bonne idée, les travaux pratiques avaient échoué : nous reprenons un travail qui avait abouti à l’échec du précédent projet. Il va donc falloir se tourner vers le marché pour emprunter les sommes nécessaires. Tout le débat porte donc – le terme est affreux, mais il résume bien la question – sur la « bancabilité » du projet, c’est-à-dire sur la manière dont les banquiers approchés s’engageront à financer une opération de ce genre.

Les modèles montrent qu’il faut de toute évidence assurer des recettes en complément des recettes commerciales. Soutenir le contraire serait ignorer la réalité. Comme je l’ai dit, le Gouvernement a travaillé sur l’idée d’une taxe sur les voyageurs qui s’appliquerait au seul aéroport Charles-de-Gaulle, mais aucune décision n’a été arrêtée à ce jour et il peut y avoir d’autres solutions – dont une a été évoquée aujourd’hui dans cette enceinte.

Cette liaison sera ensuite confiée par appel d’offres à un exploitant. Cette exploitation se fera-t-elle au détriment du transport du quotidien ou du RER B ?

Permettez-moi un rapide retour en arrière sur le cours de nos débats, pour revenir sur la proposition évoquée par M. Gilles Savary d’établir l’assiette des recettes sur les parkings plutôt que sur les voyageurs. Il se trouve en effet que les parkings figurent déjà dans le contrat de régulation et qu’avec une telle assiette, ce seraient en réalité les compagnies qui paieraient. D’autres modifications d’assiette que vous avez évoquées et que je ne reprends pas à mon compte feront également partie du débat, mais je tenais à souligner que celle-ci était une mauvaise solution.

Se pose ensuite la question de la cohabitation ou de la comparaison – comme s’il s’agissait d’un choix que nous aurions à faire – entre la ligne B du RER et cette initiative. Je rappelle à ce propos qu’il s’agit ici d’un investissement de 1,4 milliard d’euros, alors que le nouveau Grand Paris représente quant à lui 32,5 milliards d’euros d’investissements et prévoit la modernisation et le prolongement des lignes existantes. Avec le contrat de plan pour la période 2015-2020, signé en juillet 2015, ce sont 7,5 milliards d’euros qui sont consacrés à l’amélioration du réseau existant dans le cadre du Grand Paris. La RATP et la SNCF ont en outre, comme vous le savez, inscrit parmi leurs priorités l’amélioration des transports du quotidien, prévoyant 20 milliards d’euros pour couvrir le fonctionnement des réseaux sur la durée des contrats et plus de 12 milliards d’euros d’investissements.

Pour le RER B, 900 000 voyageurs du quotidien circulent désormais, vous l’avez dit, en mode nominal sur des voies dédiées, distinctes de celles du Charles-de-Gaulle Express. Le RER B a déjà bénéficié et bénéficiera encore d’efforts importants au titre du projet « RER B Nord », nouvelle offre mise en place à l’été 2013 qui assure une meilleure desserte de la proche banlieue, notamment entre le Stade de France et Aulnay-sous-Bois, et une meilleure ponctualité – avec aujourd’hui cinq points de plus, à cet égard, dès la mise en service – et comporte des investissements importants : 250 millions d’euros pour les infrastructures et 300 millions pour la rénovation des matériels roulants.

Le nouveau schéma directeur du RER B approuvé par le STIF en juillet 2013 vise à aller au-delà et à améliorer le quotidien des voyageurs à court et moyen terme, avec un investissement total de 1 milliard d’euros pour les infrastructures, qui figure en partie au contrat de plan État-région que j’ai cité et auquel l’État apporte son financement.

Des aménagements sont également apportés dans le cadre de ce projet, avec des investissements supplémentaires pour le RER B à hauteur de 125 à 130 millions d’euros en vue exclusivement d’augmenter en vue de la résilience du RER B aux situations dégradées, en particulier au moyen d’installations de retournement. Des aiguillages supplémentaires sont également prévus. Des études se poursuivent, en concertation avec le STIF et les exploitants et en cohérence avec la délibération du STIF du 1er juin 2016, qui portent exclusivement sur les règles de priorité et de circulation en cas de difficultés – il s’agit là en effet du seul point en débat, d’une ampleur limitée, mais d’une grande importance compte tenu de du nombre de voyageurs.

Comme je l’ai dit en commission, ce travail qui suppose des décisions techniques importantes pour savoir comment les choses se passent, mais le Gouvernement, dans ces décisions qui résulteront de la concertation menée notamment avec le STIF, est bien engagé sur la feuille de route visant à donner la priorité, y compris dans ces situations exceptionnelles, aux trains du quotidien. Ce sera le marqueur du travail que nous voulons faire. Les situations exceptionnelles que nous évoquons et pour lesquelles il nous faut élaborer une réponse construite sont en effet le seul moment où les deux réseaux pourront être en coexistence. La feuille de route que je viens de rappeler répond ainsi à votre préoccupation. Le Gouvernement ne peut être plus clair sur ses engagements.

Monsieur Vaillant, vous m’avez déjà interrogé sur la compatibilité avec les projets urbains et, tout simplement, avec la vie des habitants de la circonscription que vous représentez. Sur le plan de la méthode, je nuancerai vos propos en rappelant que de nombreuses réunions sont organisées avec les hauts responsables de l’administration de mon ministère et avec les élus de la Ville de Paris.

Pour ce qui concerne le secteur de la Porte de la Chapelle, je répondrai avec précision à votre question. Les études relatives aux ouvrages de franchissement ont été conduites en relation étroite avec la Ville de Paris afin d’en assurer la compatibilité avec le projet d’aménagement et de préciser les conditions dans lesquelles les travaux pourront être réalisés, notamment vis-à-vis des circulations routières et de la ligne du tramway T3. L’enjeu du bruit est également pris en compte : les ouvrages métalliques actuels seront remplacés par des ouvrages de génie civil neufs équipés de dispositifs destinés à réduire la diffusion du bruit. Les choix architecturaux et d’aménagement concernant ces ponts restent à préciser et seront définis en concertation étroite avec la Ville de Paris et les acteurs locaux.

Pour le site Condorcet, la réalisation d’ici à 2021 d’un campus de 4 000 étudiants tient déjà compte du projet. Des réunions ont été conduites avec la Ville de Paris et le maître d’ouvrage du futur campus. La création de transparences sous les voies du Charles-de-Gaulle Express au droit des deux mails piétons prévus permettra de faciliter la circulation piétonne dans le secteur.

Dans le secteur de Chapelle Charbon, le projet est compatible avec celui de la Ville de Paris qui prévoit d’ouvrir un parc urbain sur des emprises ferroviaires non exploitées. Une démarche de concertation préalable a été lancée par la Ville de Paris en vue de créer une zone d’aménagement concerté – ZAC. La concertation avec la Ville se poursuivra afin de préciser les modalités d’insertion urbaine du projet, en portant une attention particulière aux circulations des piétons.

Pour ce qui est du secteur de la Halle Pajol, je vous confirme que les concertations menées avec la Ville de Paris permettent de localiser le futur site de maintenance des rames sur des emprises qui ne font pas directement face à la Halle Pajol. Je me suis efforcé d’être précis, car je connais vos préoccupations en la matière.

Je serai plus court, mais tout aussi précis, pour répondre à M. Hanotin à propos du bruit, sur lequel il a appelé notre attention. Une étude complémentaire est planifiée en 2017 pour préciser ces éléments, compte tenu de l’ancienneté des études existantes. Pour intervenir sur ces situations, le maître d’ouvrage a prévu une enveloppe de 15 millions d’euros permettant de traiter les « points noirs bruit » engendrés par la mise en circulation du Charles-de-Gaulle Express. Cette enveloppe permettra également de participer au traitement des « points noirs bruit » préexistants.

À Saint-Denis, l’ouvrage franchissant le boulevard Wilson que vous avez évoqué, dit « Pont de Soissons », ouvrage métallique propageant fortement le bruit, sera remplacé dans le cadre du programme de modernisation du réseau Île-de-France. Ce remplacement est programmé par SNCF Réseau à l’horizon du projet et permettra de réduire le niveau sonore au droit de cet ouvrage. Plus globalement, des protections acoustiques complémentaires pourront être intégrées au projet de régénération du Pont de Soissons.

Je me suis efforcé d’être précis dans ma réponse, mais j’ai déjà été beaucoup trop long. Je tiens à remercier tous ceux qui ont soutenu ce projet. Il me semble assez logique que nous ayons débattu d’autres questions. Comme j’aurai l’occasion de le dire lors de l’examen du budget des transports, je ne souhaite pas que nous nous enfermions dans une opposition entre les modes de transport ou entre de telles initiatives, nécessaires pour notre économie et pour Paris, et les transports du quotidien. Une bonne politique des transports – celle du moins que, comme d’autres sur tous les bancs de cette assemblée, je m’efforce de défendre – est une politique équilibrée, qui retient aussi les exigences de la transition énergétique pour le report de la route sur le rail. C’est également l’une des qualités de ce projet.

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