Je voudrais pour ma part féliciter le Haut Conseil : il tient, ce que nous devrions tous faire, un discours sérieux sur les finances publiques et sur la sincérité du projet de loi de finances pour 2017.
Comme d'habitude, je commence par vous interroger – c'est un tableau qui figure à la page 8 de l'avis que vous nous avez remis – sur l'écart constant entre 2014 et 2017, de 1,6 point de PIB, entre le solde effectif et le solde structurel. Ce n'est pas possible ! Le concept de solde structurel renvoie à la théorie des cycles ; or il n'y a plus de cycles. Cela confirme ce que je me tue à répéter – et qui commence à « percoler » dans diverses sensibilités politiques : l'idée même de solde structurel n'a plus aucun sens. Seul le solde effectif en a un. Partagez-vous cette analyse ?
Vous estimez que la réduction du déficit à 2,7 % en 2017 est tout à fait improbable, et que nous ne sommes même pas sûrs de passer en dessous des 3 % – que le Président de la République s'était, je le rappelle, engagé à atteindre en 2013… Cela ne fait que quatre ans de retard !
J'ai fait de petits calculs pour comprendre pourquoi nous n'arriverons pas à l'objectif de 2,7 %.
D'après vous, l'écart de croissance prévisible pourrait se situer entre 0,3 et 0,5 point de PIB. À un niveau de 0,4 point, cela représenterait une perte de recettes pour l'ensemble du bloc public de 4 milliards d'euros environ.
Vous pointez également diverses mesures dont les conséquences ne seront mesurées qu'en 2018, à commencer par le renforcement du CICE. Vous évaluez le coût de ces dépenses différées à 5 milliards d'euros. Vous estimez le coût d'un nouveau crédit d'impôt pour l'emploi à domicile en faveur des retraités non imposables à un milliard, et celui de cinq autres mesures à 1,3 milliard.
En bonne comptabilité, nous perdons donc 11,3 milliards.
Quant aux dépenses, les sommes dépensées pour Areva – 5 milliards – et EDF – 3 milliards – ne pourront pas être entièrement considérées comme des dotations en capital ; en fait, elles servent à boucher des trous, et seront requalifiées. J'ai considéré comme des dépenses la moitié de ces sommes – estimation très bienveillante de ma part. Comptons-les donc pour 4 milliards. Quant aux réductions de dépenses de l'UNEDIC, personne ne peut contester que le chiffre de 1,6 milliard n'est pas sérieux. S'agissant de l'ONDAM, il faudrait un effort d'économies de 4,1 milliards, et nous n'en avons réalisé – avec de grandes difficultés – que pour 3,2 milliards. Et je vous rappelle que les déficits des hôpitaux augmentent… J'ai donc compté 0,9 milliard d'euros de dépenses supplémentaires.
Nous en sommes donc à 6,5 milliards. Et je ne compte pas les sous-budgétisations, que vous pointez, sans les évaluer. Il serait d'ailleurs intéressant que vous nous en donniez un ordre de grandeur.
Autrement dit, avec 11,3 milliards d'euros de recettes perdues et 6,5 milliards d'euros de dépenses supplémentaires, nous arrivons à 17,8 milliards, soit 0,75 % du PIB. Ajoutés aux 2,7 % annoncés, on arrive à une hypothèse de déficit de 3,4 %.
On me qualifie souvent de « petit comptable », ce que j'assume bien volontiers. Est-ce un petit calcul de ce type – que vous ne faites pas dans votre avis – qui vous a menés à estimer « incertain » un passage du déficit sous la barre des 3 % ?