Intervention de Michel Sapin

Réunion du 28 septembre 2016 à 12h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Michel Sapin, ministre de l'économie et des finances :

Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, de votre présence pour la présentation de ce dernier projet de loi de finances de la législature – mais ce n'est pas la dernière fois que nous nous voyons cette année...

La présentation d'un budget est toujours un moment important. S'y trouvent résumés les projets du Gouvernement pour l'année suivante, parfois même pour plusieurs années. Nous avons effectivement intérêt à inscrire nos propres décisions, y compris annuelles, dans des perspectives pluriannuelles : il faut pouvoir montrer les orientations, les continuités et les éventuelles ruptures.

Nous présentons ce dernier budget avant des échéances électorales importantes, des scrutins qui se tiendront du mois d'avril au mois de juin prochains. Cela ne doit pas être une raison pour faire ni dire n'importe quoi. Cela vaut évidemment pour le Gouvernement, qui a la responsabilité de présenter ce texte, et ainsi la politique qu'il souhaite voir menée tout au long de l'année 2017. Cela vaut aussi pour ceux qui, se présentant – c'est légitime – à une élection, parfois d'abord à une élection primaire, doivent faire connaître leurs projets à venir.

Je veux le dire très clairement : ce que, les uns et les autres, nous disons n'est pas simplement un sujet de politique intérieure, un sujet de débat entre nous. Nous sommes observés par nos partenaires européens, car c'est la France, pas tel ou tel gouvernement, qui prend des engagements et doit montrer si elle est capable, ou non, de les respecter. Nous sommes également observés par les marchés ; soyez-y attentifs car, au-delà de ce vocable qui paraît presque négatif, les marchés, ce sont ceux qui nous prêtent de l'argent, et nous avons besoin que l'on nous en prête, ne serait-ce que pour rembourser les masses assez faramineuses d'emprunts souscrits dans les années 2009, 2010 et 2011 et qui arrivent aujourd'hui à échéance.

Aujourd'hui, nous avons la chance de jouir d'une crédibilité considérable vis-à-vis des marchés, qui nous permet, dans le cadre, par ailleurs, de la politique menée par la Banque centrale européenne (BCE), de bénéficier de taux d'intérêt extrêmement faibles. Il ne s'agit d'ailleurs pas seulement d'une chance, mais du résultat d'une politique. Vous l'avez d'ailleurs souligné au cours de l'année, et même l'année précédente : ces taux d'intérêt très faibles nous permettent des économies considérables, qui nous permettent à leur tour de financer des dépenses utiles. Payer des intérêts, c'est nécessaire ; payer des professeurs ou des militaires supplémentaires, c'est utile. Faisons donc très attention dans nos déclarations. J'entends parfois tel ou tel, au sein de l'opposition, dire qu'il ne se sent pas engagé par la règle des 3 %, annoncer que nous pourrons maintenir demain des déficits supérieurs à 3 % du produit intérieur brut (PIB) : ces propos sont écoutés, car, en démocratie, nul ne peut préjuger de l'identité de ceux qui gouverneront demain. Nous, on sait ce que nous voulons et ce que nous faisons, mais d'autres… On sait ce qu'ils disent aujourd'hui, on ne sait pas ce qu'ils feront demain. Je ne veux pas avoir l'air de faire un sermon, mais il se pose une question de responsabilité globale, de responsabilité de la France, de responsabilité de ceux qui animent le débat politique français.

Je voudrais présenter succinctement les caractéristiques de ce budget. Il répond à trois préoccupations, qui sont nos trois priorités dans la gestion de la France.

Première préoccupation, nous devons continuer à réduire les déficits publics. Ils étaient, chacun s'en souvient, de l'ordre de 5 % du PIB au moment de l'alternance, ils sont aujourd'hui aux alentours de 3,3 % du PIB – c'est l'objectif pour 2016, que nous atteindrons très probablement, le Haut Conseil des finances publiques ne se pose d'ailleurs plus de questions pour 2016. Nous avons donc engagé une très forte réduction des déficits. On nous compare souvent – en particulier dans l'opposition, mais c'est légitime – à l'Allemagne, qui, par sa puissance économique, par les masses de son budget, nous est effectivement comparable. Quelle était la situation de nos deux pays il y a cinq ans ? À la fin de l'année 2011, au début de l'année 2012, le déficit public français était d'environ 5 % du PIB, tandis que les comptes publics allemands étaient à l'équilibre. Aujourd'hui, les comptes publics allemands sont toujours à l'équilibre, et le déficit français est d'environ 3 %. Qui a fait le plus grand chemin ? Qui a fait le plus gros effort ? Celui qui est resté au même niveau, parce qu'il avait auparavant mené des réformes lui donnant la capacité de résorber les très forts déficits créés pour faire face à la crise financière ? Ou la France qui, budget après budget, réduit ses déficits depuis 2012 ? Nous devons continuer sur cette voie ; ce n'est pas une question de dogme, c'est une question de crédibilité globale. Il est bon pour la France de continuer à réduire ses déficits.

Il est légitime, dans toute démocratie, que des doutes s'expriment, que des questions se posent sur la manière dont on veut atteindre un objectif. Aussi sommes-nous sommes prêts à répondre à toutes les questions, y compris aux doutes qui ont pu être exprimés par le Haut Conseil des finances publiques – qui, en fait, est là pour cela, depuis que nous l'avons créé, à la fin de l'année 2012. Le Haut Conseil est là plutôt pour tirer des sonnettes d'alarme que pour faire des compliments, ne lui en faisons pas grief. Certes, il est agréable de recevoir des compliments quand on fait des efforts, mais nous ne sommes plus à l'école, ce n'est plus le sujet.

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