Par deux fois en moins de cinq ans, Alstom aura fait aux pouvoirs publics le « coup » d'une annonce tonitruante. La première fois pour annoncer qu'elle se mutilait de sa branche énergie – et les membres de notre commission se souviennent de tous les épisodes. La seconde fois, maintenant, pour annoncer qu'elle se mutile de son site historique de Belfort, qui compte 500 salariés après en avoir compté 8 000.
En 2015, lors de son audition ici même, M. Patrick Kron nous a laissé, si j'ose dire, un excellent souvenir, tant il savait incarner l'arrogance française – un produit excellent, mais difficile à exporter. Il s'est présenté comme le sauveur d'Alstom Transport, comme le leader capable de prendre une décision courageuse : celle de céder la branche énergie pour sauver son groupe.
Moins d'une année après cette terrible scission et quelques succès pour l'entreprise Alstom Transport, dont le contrat américain et le partenariat avec la SNCF pour le TGV du futur, vous annoncez maintenant, Monsieur le président-directeur général, la fermeture du site historique d'Alstom à Belfort, après avoir démenti les rumeurs de façon réitérée pendant près d'une année, et sans même consulter l'actionnaire principal qu'est l'État.
En mai 2015, à la suite de la visite faite par M. Emmanuel Macron à Belfort pour rassurer les salariés et les assurer de la mobilisation de l'État, vous avez déclaré : « Aujourd'hui, notre carnet de commandes est de 28 milliards d'euros ». Que s'est-il passé depuis qui justifie cette décision brutale, que vous nous avez confirmée dans votre propos liminaire en nous indiquant qu'elle n'était pas, en réalité, du fait d'Alstom, mais qu'elle était de la faute des autres ? Non : vous portez une responsabilité ! Les entreprises ne sont pas « hors sol » : elles s'inscrivent dans des projets industriels, sauf à considérer que c'est uniquement la financiarisation qui vous intéresse. Fermer cette usine de construction en raison d'un « trou » de commandes durant trois années, alors que des solutions alternatives existent, est un choix plus politique qu'économique.
Enfin, il manque une chose dans vos annonces : vous n'avez annoncé aucun effort des dirigeants en matière de rémunérations ou de stock-options pour participer à la réorganisation !