Le Premier ministre Manuel Valls a décidé d'attribuer le label « grande cause nationale » pour l'année 2016 au collectif d'associations Adoptons les comportements qui sauvent. La promotion de ces gestes qui sauvent constitue l'enjeu de cette proposition de loi.
Près de 50 000 personnes meurent chaque année inopinément, victimes d'un arrêt cardiaque. Ce chiffre n'est pas une fatalité ; prises en charge dans les minutes qui suivent l'accident, ces personnes pourraient être sauvées. On estime le taux de survie à 35 % lorsque la victime est défibrillée. Dès lors, une plus grande sensibilisation aux gestes qui sauvent et plus de défibrillateurs implantés sur tout le territoire constituent bien un enjeu de santé publique.
Notre collègue Alex Turk, sénateur du Nord, que je tiens à associer à nos travaux, et moi-même, avons déposé cette proposition de loi en 2015. Nous proposons trois mesures.
La première prévoit des sanctions pénales dissuasives lorsque des actes de vandalisme ou de vol portent atteinte à ces défibrillateurs. Alors que l'intérêt de ce dispositif réside dans son accessibilité, les appareils sont malheureusement exposés à des comportements répréhensibles. Nous proposons d'aggraver les peines encourues pour le vol et de punir de peines d'emprisonnement et d'amendes conséquentes toute personne qui se livrerait à un acte de vandalisme contre ces appareils. Cette question n'est pas anecdotique.
La deuxième mesure vise à renforcer la formation des jeunes aux gestes qui sauvent, en la rendant obligatoire et en y incluant expressément l'usage d'un défibrillateur. Ce point est particulièrement important, car il ne suffit pas de diffuser des appareils, il faut aussi sensibiliser la population à leur maniement. Depuis 1961, la Norvège enseigne à ses élèves de sept à seize ans les gestes élémentaires de survie. Le résultat est là : 95 % de la population est formée aux gestes de premier secours. Grâce à cette formation précoce à la prise en charge de l'arrêt cardiaque, la sensibilisation à l'âge adulte est plus grande.
Enfin, la troisième mesure impose l'équipement en défibrillateurs de certains locaux. Nous proposons que les entreprises de plus de cinquante salariés, les locaux commerciaux de plus de 1 000 mètres carrés en soient pourvus. Il en sera de même dans les établissements recevant du public, salles de spectacle, équipements sportifs ou administrations. De même, les immeubles d'habitation à usage collectif seront équipés. Il faut savoir que 70 % des arrêts cardiaques ont lieu au domicile. Je laisse au pouvoir réglementaire le soin de fixer des seuils et des conditions d'application.
Dès 2007, l'Académie nationale de médecine avait préconisé une plus grande diffusion des défibrillateurs automatisés externes dans les lieux publics, les lieux de travail, les lieux à forte densité résidentielle et les centres commerciaux. S'agissant du lieu de travail, il est pour le moins paradoxal que l'employeur soit soumis à une obligation générale de mise en sécurité de ses salariés et que l'entreprise doive disposer d'un matériel de premiers secours, sans que pour autant la présence d'un défibrillateur soit obligatoire.
Deux départements pilotes, le Nord et la Côte d'Or, ont mené des politiques volontaristes et choisi de diffuser largement des défibrillateurs dans des endroits stratégiques. Les taux de survie suite à un arrêt cardiaque y sont supérieurs à la moyenne. Dans le Nord, l'ancienne sénatrice Sylvie Desmarescaux et le sénateur Alex Turk ont effectué un excellent travail en contribuant avec leur réserve parlementaire à l'achat de défibrillateurs qui ont été mis à la disposition des communes du département. Les collectivités intéressées participent à hauteur de 50 % à l'achat des matériels. Depuis 2006, ce sont ainsi plus de 1 800 appareils qui ont été implantés sur le territoire de plus de 450 communes. Un véritable réseau a été mis en place, associé à une sensibilisation aux gestes de premiers secours.
Là est bien la preuve de l'intérêt de la présence d'un tel équipement et de la sensibilisation qui doit l'accompagner. Le sens de la proposition de loi est d'étendre ces pratiques à tout le territoire.