Je ne reviendrai pas sur le débat qui concerne Alstom, mais je m'interroge sur la notion d'État stratège, car la question est là. Existe-t-il véritablement une stratégie nationale de développement de l'industrie ferroviaire ?
À l'initiative de mon groupe, une commission d'enquête a rendu ses conclusions il y a quelques années sur ce sujet. Quelle est la maîtrise des grands groupes stratégiques de notre pays ?
Nous constatons que le problème de fond est constitué par cette déconnexion existant entre l'industrie ferroviaire française et le service des transports, la mobilité, la SNCF. Faut-il rappeler que certains pays, dont l'Allemagne, développent une stratégie toute différente de la nôtre ?
En Allemagne, la Deutsche Bahn et Siemens agissent toujours de concert lorsqu'il s'agit de qualification et d'homologation des matériels made in Germany, et l'État intervient sur le long terme dans le domaine du développement. Un lien très étroit a été tissé entre le service du transport et la production industrielle. Nous devons rétablir des liens étroits entre la SNCF et les grandes entreprises de l'industrie ferroviaire.
Or ce n'est pas ce qui s'est produit : des choix politiques ont été opérés dans le domaine de la politique des transports, et par plusieurs gouvernements. Nous sommes passés d'une priorité au ferroviaire à une politique privilégiant le routier, ce qui ne peut être sans conséquence sur l'industrie et l'environnement. Ces questions appellent des politiques portant sur le long terme ; certes, il y a urgence, et vous avez tenté d'habiller les choses. Je rappellerai néanmoins, qu'après le rapport de M. Philippe Duron, le renouvellement de certaines lignes avait été annoncé ; vous en avez d'ailleurs cité trois, dont Clermont-Ferrand-Paris.
À cette époque, 1,2 milliard d'euros avait été réservé sur le budget de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), mais la volonté de passer des commandes pour des trains existants a fait défaut. Le Régiolis fabriqué par Alstom ne pouvait être qu'un palliatif, et les TGV ne correspondaient pas vraiment aux besoins des lignes d'équilibre du territoire puisqu'il avait été envisagé de les recycler pour cet usage.
On se trouve alors condamné à agir dans l'urgence, qui n'apporte que des solutions provisoires. Nous devons avoir une vision à plus long terme du développement de l'industrie ferroviaire ainsi que du type de transports que nous voulons pour notre pays.