En droit français, il n’est pas possible, pour des raisons constitutionnelles et conventionnelles, de priver de liberté un être humain pendant quinze jours sans le contrôle d’un juge. La version initiale de la proposition de loi, la deuxième version, que vous avez tenté de nous proposer en commission des lois après l’avoir complètement réécrite, comme la troisième, que vous nous proposez aujourd’hui, montrent toutes que vous n’y arrivez pas, et vous le savez très bien.
Les dispositions que vous proposez à l’article 1er portent atteinte à deux dispositions, et non des moindres : l’article 66 de la Constitution du 4 octobre 1958 et l’article 8 de la Convention des droits de l’homme et du citoyen. De grâce, cessez cette comparaison sans raison avec l’hospitalisation d’office ! Cette pratique obéit à un régime juridique complètement différent et n’a rien à voir avec la rétention administrative. C’est encore une atteinte à nos principes généraux du droit que cette proposition baroque qui consisterait à créer un nouveau fichier des personnes radicalisées, dont on voit mal la finalité, la plus-value et surtout les contours, et dont les critères seraient parfaitement arbitraires. Les autres dispositions de ce texte visent spécifiquement et uniquement les personnes de nationalité étrangère, pour des infractions de droit commun, en aggravant les peines complémentaires d’interdiction du territoire français à l’encontre des étrangers déclarés coupables d’un crime ou d’un délit puni d’une peine d’au moins cinq ans d’emprisonnement, c’est-à-dire, dans la pratique, la plupart des délits. En demandant aux juges de motiver leur décision dans le cas où ils n’auraient pas recours à cette peine complémentaire, vous leur donneriez encore plus de travail. C’est une mesure populiste et discriminatoire puisqu’en ciblant spécifiquement les personnes étrangères, vous portez atteinte au principe d’égalité devant la loi.
Comme hier, avec la motion de rejet que le groupe Les Républicains avait déposée lors de la dernière lecture du texte relatif à la justice du vingt et unième siècle, nous perdons notre temps.