Intervention de Jacques Bompard

Séance en hémicycle du 13 octobre 2016 à 9h30
Prédication subversive — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Bompard :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je suis extrêmement dérangé par ce texte. Je reconnais en effet à Mme Koscisusko-Morizet le courage d’avoir porté quelques propositions cinglantes sur l’interdiction du salafisme et la lutte contre les prêches islamistes. C’est un point de départ courageux, dont nous savons qu’il a valu des persécutions insupportables à nombre de penseurs audacieux du Proche-Orient et même à quelques pamphlétaires en Europe.

Je tiens d’ailleurs à partager avec vous une pensée pour Nahed Hattar, chrétien jordanien assassiné à son sortir du tribunal d’Amman pour avoir critiqué le djihad. C’est aussi en solidarité avec ces minorités orientales abandonnées à l’explosion de leur région que nous devons agir et légiférer.

Pour le reste, ce texte n’est pas satisfaisant. Il n’est pas satisfaisant par son titre même : « Proposition de loi pénalisant la prédication subversive ». Reportons-nous à la définition du mot « prédication » : « La prédication est l’action de parler publiquement des choses de Dieu aux non-croyants et d’enseigner les croyants ». Si l’on fait un instant d’histoire religieuse, le simple fait de prêcher sa religion fut de tout temps subversif. Le Christ est subversif en Palestine, Luther fut subversif pour l’unité catholique européenne, mais Siddhartha et Bouddha le furent également.

Subvertir, c’est s’attaquer à la vertu d’un temps et d’un monde donné. Je dois l’avouer : je pense que le nouvel ordre moral imposé à notre société et notre monde politique aurait grand besoin de subversion.

Madame la rapporteure, pourquoi utilisez-vous ce terme ? Vous l’avez dit au cours des auditions : par volonté de ne pas discriminer entre les religions. Mais c’est l’islamisme politique qui s’en prend à notre pays. Ce n’est pas la radicalisation qui pose problème, mais la radicalisation islamiste. Ce n’est pas l’exclusion sociale. Ce n’est pas un traumatisme post-colonial. C’est l’adoption fanatique par des jeunes gens des imprécations guerrières d’une partie du Coran.

En refusant de nommer l’ennemi, nous en arrivons à des dispositions particulièrement dangereuses. Je rappelle que le préambule de la Constitution de la Ve République n’est pas neutre, et que nombre de philosophes et d’intellectuels n’hésitent pas à en disputer. Faudrait-il les enfermer, les interdire ? Faudrait-il envoyer Éric Zemmour en prison quand il revendique la volonté de sortir de l’État de droit pour combattre l’islamisme ?

1 commentaire :

Le 15/10/2016 à 12:24, laïc a dit :

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"Faudrait-il envoyer Éric Zemmour en prison quand il revendique la volonté de sortir de l’État de droit pour combattre l’islamisme ?"

Si sortir de l'Etat de droit, c'est commettre des infractions, toute personne qui revendique de sortir de l'Etat de droit pour en finir avec l'islamisme flirte en effet dangereusement avec la prison.

Le problème, c'est que l'Etat de droit n'est pas appliqué pour en finir avec l'islamisme. Les Français connaissent les lois, car "nul n'est censé ignorer la loi", et quel n'est pas leur désespoir de voir la loi de 1905 ignorée par ceux-là même qui ont comme mission de l'appliquer ? De voir les articles 31 et 35 de la loi de 1905 quasiment jamais appliqués ? De voir l'islamisme revendicatif et subversif se répandre et se développer sous le nez et comme en se jouant de ceux qui ont comme mission de l'éradiquer, et parfois même avec la complicité active de certains maires, voir ce qui se passe au Havre ? Cette situation n'est plus supportable. L'Etat de droit doit se reprendre en main, et ne plus chercher des motifs pour dire qu'il ne sait pas si une prédication est subversive ou non, en s'interdisant de réfléchir, car si on se donne la peine de réfléchir, on parvient assez facilement à savoir si une prédication appelle à enfreindre une loi ou l'ordre public.

Les Français ont bien compris que ne pas appliquer l'article 35 de la loi de 1905 sous prétexte que l'on ne sait pas si une prédication est subversive ou non est une autorisation tacite pour les prédicateurs à dire ce qu'ils veulent à la mosquée, sans se soucier de savoir s'ils tombent ou non sous le coup de l'article 24 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse, qui entraînera par suite l'application de l'article 35 de la loi de 1905.

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