Intervention de Rudy Salles

Réunion du 5 octobre 2016 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRudy Salles :

Alors que nous achevons ce matin l'examen en commission de la proposition de loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias, il faut bien convenir que notre perplexité augmente de jour en jour. L'examen en procédure accélérée laissait entendre qu'un danger imminent planait sur les médias. Pourtant, à de très rares exceptions, sévèrement condamnables, force est de constater que les rédactions françaises travaillent et éditent librement. Les rédactions de Libération, d'iTélé, de L'Express ou encore du Monde, pour n'en citer que quelques-unes, s'organisent et se sont déjà mobilisées afin que les organes de presse demeurent indépendants de leurs actionnaires respectifs. La présente proposition de loi témoigne d'une conception désuète de la mission de régulation dans un paysage audiovisuel bouleversé par le développement de l'économie numérique et électronique.

Depuis longtemps, les députés du groupe UDI émettent de sérieuses réserves sur l'indépendance du CSA en raison notamment des modalités de nomination de ses membres. En effet, aucune exigence de compétence, de qualité, de légitimité ne leur est opposée ; vous nous permettrez donc de douter de l'absolue impartialité de cette institution, dont le texte fait le nouveau garant de l'honnêteté, de l'indépendance et du pluralisme de l'information et des programmes.

Sur le fond, l'extension à tous les journalistes du principe de l'indépendance rédactionnelle est discutable, dans la mesure où les journalistes bénéficient d'ores et déjà du recours à la clause de conscience en cas de désaccord avec la ligne éditoriale. Par ailleurs, le journaliste connaît et a priori adhère à la ligne éditoriale du journal ou de la chaîne dont il décide de rejoindre la rédaction. Plutôt que de créer de nouvelles règles à la constitutionnalité discutable et des structures ex nihilo, nous aurions préféré que l'on fasse confiance aux principaux concernés.

Enfin, le temps du monopole de la presse et de l'audiovisuel apparaît aujourd'hui révolu. Internet et les réseaux sociaux ne jouissent toujours d'aucun contrôle en matière d'indépendance ou de pluralisme. Or c'est principalement à partir de ces supports que la nouvelle génération s'informe. Hélas, il n'y a rien, dans votre proposition de loi, sur la crise du modèle économique de la presse, rien sur la précarisation croissante des journalistes…

Seule l'introduction de la protection du secret des sources des journalistes nous conduit aujourd'hui à ne pas voter contre ce texte. En effet, prévue dans un projet de loi en 2013, la protection du secret des sources des journalistes n'a jamais été inscrite à l'ordre du jour de notre Assemblée malgré l'accord unanime de notre commission.

Il nous apparaît essentiel que la protection du secret des sources soit améliorée, afin d'assurer une prévention suffisamment efficace et prévisible contre les atteintes injustifiées. Aussi saluons-nous l'inscription dans la loi, de manière plus claire et plus limitative, des conditions permettant de porter atteinte à ce secret. Sur un tel sujet, on peut regretter que nos deux assemblées ne soient pas parvenues à un accord.

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