Intervention de Jacqueline Fraysse

Réunion du 11 octobre 2016 à 17h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacqueline Fraysse :

J'ai bien noté la satisfaction manifestée devant le fait que seule la branche maladie demeurerait déficitaire de 400 millions d'euros en 2017, contre 4,3 milliards en 2016. J'aimerais partager cet enthousiasme, mais ce n'est pas tout à fait le cas, et ceci pour deux raisons.

La première est que si l'on ajoute aux 400 millions de déficit du régime général les 3,8 millions du déficit du Fonds de solidarité vieillesse, le déficit global pour l'année 2017 s'élève à 4,2 milliards d'euros.

La seconde est que les économies effectivement réalisées le sont au prix d'importants reculs de la protection sociale de nos concitoyens. Ainsi, l'excédent de la Caisse nationale d'assurance vieillesse est-il dû au recul de l'âge de la retraite de soixante à soixante-deux ans et à l'allongement de la durée de cotisation permettant de percevoir une retraite à taux plein.

L'équilibre de la branche famille s'explique par la modulation des allocations familiales instaurées en 2015 et le transfert de l'allocation logement au budget de l'État.

Quant aux 700 millions d'euros d'excédent de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, ils s'expliquent d'abord par la sous-déclaration des maladies et accidents du travail, qui n'est un secret pour personne, et par le fait que de nombreuses maladies professionnelles, notamment certains cancers, ne sont pas retenues comme telles et sont donc supportées par la branche maladie.

Cette dernière est censée économiser 4 milliards d'euros, d'une part, pour réduire son déficit à 2,6 milliards contre 4,1 milliards l'an dernier et, d'autre part, pour participer au financement du fameux pacte de responsabilité, auquel l'assurance maladie doit contribuer à hauteur de 10 milliards entre 2015 et 2017, dont 3 milliards supportés par les seuls hôpitaux, qui sont déjà, pour la plupart d'entre eux, au bord de l'asphyxie. On peut se demander jusqu'où ira la dégradation de nos hôpitaux publics quand on connaît le nombre de postes actuellement vacants et l'impact des décisions autoritaires souvent incohérentes imposées par les ARS dans le cadre des groupements hospitaliers de territoires. Le malaise est patent ; je ne développe pas.

Ces questions se posent d'autant plus que tout cet argent public distribué aux grandes entreprises n'a pas permis d'enrayer la montée du chômage : avec 6,6 millions de chômeurs, la preuve est faite de l'inefficacité de ces mesures sur le front de l'emploi. En revanche, tout cet argent prélevé sur la santé et sur l'ensemble des services publics va cruellement manquer à nos concitoyens.

Par ailleurs, nous regrettons, une fois de plus, que vous n'ayez pas cherché des recettes nouvelles permettant un meilleur accès aux soins, en particulier dans certaines spécialités. Hormis une petite taxe sur le tabac, ce PLFSS ne contient aucune nouveauté en la matière.

Si je me félicite que certains articles envisagent de lutter plus efficacement contre le travail illégal et la fraude patronale aux cotisations sociales, je m'interroge sur les moyens dont disposeront les agents de l'URSSAF pour relever ce défi, qui représente encore aujourd'hui entre 20 et 25 milliards d'euros de manque à gagner par an.

Dans le même ordre d'idées, les articles 6 et 7 soumettent à condition de ressources plusieurs niches sociales, ce qui permet de réaliser 15 millions d'euros d'économies. On peut toutefois se demander pourquoi le Gouvernement a choisi de se limiter à ces mesures, alors que l'annexe 5 de la loi de finances pour 2016 recense quatre-vingt-douze niches sociales.

S'agissant du virage ambulatoire, je ne vois pas comment les hôpitaux pourraient économiser d'emblée, sans avoir investi préalablement dans la mise en oeuvre de cette médecine ambulatoire. Or ce PLFSS ne parle que d'économies – 640 millions d'euros en 2016 ; 845 millions en 2017. Sans investissements, permettez-moi de douter de la réalité de ces économies.

Enfin, je souhaiterais que vous nous explicitiez le contenu de l'article 44, qui traite de l'extension de la T2A pour les prises en charge ambulatoires.

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