Intervention de Général Pierre de Villiers

Réunion du 12 octobre 2016 à 11h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Général Pierre de Villiers, chef d'état-major des armées :

De manière générale, le MCO est une préoccupation. Ce n'est pas pour rien que nous avons augmenté ses crédits de 6 % dans la LPM. On s'aperçoit en effet que les vieux matériels coûtent de plus en plus cher en MCO et que les matériels neufs coûtent dès le départ beaucoup plus cher que les anciens.

Sur le MCO « aéro », qui représente à lui tout seul le double des deux autres, nous avons des problèmes que le ministre a évoqués sans équivoque. Je pourrais effectivement vous parler des hélicoptères ou de l'Atlantique 2 (ATL2). Oui, des mesures doivent être prises en matière de gouvernance ou en ce qui concerne les pièces de rechange dans le cadre du projet supply chain. La coordination entre la DGA, l'industriel, le Service industriel de l'aéronautique (SIAé) et la Structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère la Défense (SIMMAD) s'améliore. Ce n'est pas pour rien qu'il y a deux ans, j'ai lancé un plan d'urgence consacré aux hélicoptères. Nous nous réunissons très régulièrement avec le DGA et EADS, dans sa version globale et dans sa version hélicoptères. Nous avons élaboré un plan d'action qui comprend une série de mesures, et nous avançons.

Mais regardez les Rafale : nous sommes parvenus à augmenter de 10 % leur disponibilité. Le MCO progresse, mais nous n'améliorerons pas de manière spectaculaire, en deux ans, la disponibilité des hélicoptères ou des ATL2. Pour ces derniers, par exemple, nous agissons en deux temps : tout d'abord, le rétrofit actuel de l'ensemble du parc, puis la modernisation de quinze avions, à l'horizon 2022-2023. Malheureusement, il faut du temps, mais je ne nie pas le problème.

S'agissant de la radicalisation, vous avez raison de souligner que c'est un problème général.

En revanche, je ne partage pas l'appréciation que vous portez sur l'opération Sentinelle. C'est un débat très politique, avant d'être militaire. La mission première des forces armées est de protéger les Français là où ils se trouvent. Je ne suis donc pas choqué que, dans le contexte actuel, elles interviennent sur le sol national. Après, il me revient de faire en sorte que ces forces armées apportent leur spécificité et la plus-value la plus efficace possible aux forces de sécurité intérieure. C'est ce que nous sommes en train de faire.

Toutefois, votre appréciation illustre mes propos, car elle date de la mi-août. Or, depuis, tout a changé. Nous n'avons pas suffisamment communiqué, c'est vrai. Mais, à la mi-août, le colonel dont je vous ai parlé m'aurait dit la même chose que votre béret rouge. Interrogez celui-ci aujourd'hui, et il vous dira qu'il préfère, certes, être engagé en Afrique, mais il reconnaîtra aussi que ce qu'il fait est utile et n'a plus rien à voir avec la situation précédente. Depuis cet été, les hommes de Sentinelle sont répartis à égalité entre Paris et la province, alors qu'auparavant, 70 % d'entre eux étaient à Paris. Mesurez le choc qu'a produit ce changement en province, notamment sur les élus, qui veulent tous garder l'opération Sentinelle. De fait, notre dispositif « mobilité » nous a permis de décupler notre efficacité. C'est simple : nous avons envoyé 60 militaires dans un département qui n'en comptait aucun auparavant, et la population a eu l'impression qu'ils étaient 600, tant ils étaient présents partout dans le département. Je crois donc à l'efficacité du dispositif Sentinelle repensé et modernisé. Ce n'est cependant que le début de la transformation, car celle-ci est, certes, un état de fait, mais c'est d'abord un état d'esprit. Cette transformation doit être permanente pour s'adapter à l'adversaire et à ses modes d'action. Quoi qu'il en soit, ce débat est très intéressant et légitime.

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