Intervention de Laurent Collet-Billon

Réunion du 12 octobre 2016 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement :

Monsieur Villaumé, le lancement de la phase de réalisation de Syracuse 4 a eu lieu à la fin de l'année 2015. La DGA a notifié le contrat de réalisation du segment spatial à deux industriels, Airbus Defence and Space et Thales Alenia Space. On prévoit de débuter la réalisation du segment sol à la fin de l'année 2017 et de mettre en orbite des satellites en 2021 et 2022. Il fut compliqué de mettre ce programme au point en raison des querelles entre les industriels français opérant dans les satellites de télécom, nourries par l'avance de l'un d'entre eux dans la propulsion ionique des plateformes. Aujourd'hui, une paix armée règne sous la haute autorité de la DGA et le programme se déroule normalement. Cette affaire nous a coûté beaucoup d'énergie, mais on y attache beaucoup d'importance car on connaît très précisément la date de la fin de vie des satellites. Les nouvelles générations de satellites disposeront de capacités d'antibrouillage très fortement accrues. Seront-ils exportables ? La question se pose, car il s'agit de « bêtes de course » dont le prix est élevé et qu'il convient de ne pas vendre à n'importe quel pays au vu de la qualité supérieure de l'antibrouillage.

À l'été 2015, M. Enders s'est engagé auprès M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, à livrer avant la fin de l'année 2016 six avions A400M dotés de capacités tactiques initiales, concernant l'autoprotection, les terrains sommaires et l'aérolargage. Trois de ces avions doivent être mis à niveau dans les usines du constructeur à Getafe, près de Madrid, et les trois autres seront neufs. Quinze jours après l'entretien entre MM. Enders et Le Drian est survenue l'affaire des boîtes relais des réducteurs d'hélices (PGB – Propeller Gear Box) qui nous occupe depuis un certain temps et a connu de nombreux remous.

Aujourd'hui, une solution de changement du boîtier réducteur d'hélice, sans déposer le moteur, a été validée par les nations. On sait en effet à présent changer ce réducteur sans démonter complètement le moteur, ce qui permet de réduire la durée d'immobilisation de l'avion d'une vingtaine de jours à quelques jours environ.

Ensuite, une solution transitoire a été définie sur les actuelles PGB, qui consiste à réaliser une modification nommée truncated plug, en raccourcissant un des pignons ce qui permet de déplacer les fréquences de résonance de la boîte relais. Cette modification est validée, qualifiée, et certifiée par l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) depuis le 7 juillet dernier. Cette solution nous permet de décaler la première inspection de chaque boîte relais, à 650 heures au lieu de 50 heures actuellement. En même temps, la définition de la solution définitive est en cours, une solution qui doit nous porter à quelques milliers d'heures. Nous verrons cela ultérieurement ; la priorité pour l'instant est de remettre la flotte en état de vol.

Nous faisons ce qui est nécessaire pour être les premiers bénéficiaires des boîtes relais modifiées, pour une raison très simple, c'est que nous sommes les premiers utilisateurs de l'avion, des utilisateurs massifs et des utilisateurs en opérations.

Nous allons sortir d'une situation pénible. Cela permettra-t-il à M. Enders de respecter son engagement vis-à-vis du ministre à la fin de l'année ? Il reste encore deux mois et demi pour le savoir. Nous le souhaitons car cet avion, quand il vole en Afrique, représente un apport tout à fait remarquable. Dernièrement ont eu lieu les premiers posés tactiques sur des terrains non préparés : l'avion s'est révélé bien meilleur sur ces terrains qu'un C-130.

Il faut que l'industriel trouve les moyens d'assurer la production au rythme prévu dans le contrat, dans des conditions de qualité normales. Or, aujourd'hui, nous ne sommes pas certains que le rythme sera celui qui est attendu par les nations. Je pense néanmoins que la situation à la fin de l'année sera moins terrible que celle en début d'année.

Sur les transferts de technologie, Monsieur Le Bris, nous faisons extrêmement attention. Dans les derniers contrats Rafale, par exemple, il n'y a pas de transfert de technologie du tout. Ce qui était prévu dans le cadre des 126 Rafale, en Inde, n'a pas lieu sur les trente-six ; ce sont des offset qui regardent les industriels mais ne concernent pas des transferts de technologies propres au Rafale.

Je n'ai pas de commentaire à faire sur l'annulation du marché d'hélicoptères par la Pologne. Le niveau d'offset était très important parce que la Pologne faisait valoir que l'appel d'offres concernant les hélicoptères avait été lancé avant son entrée dans l'Union européenne et que, par conséquent, les règles prohibant les offset au sein de l'Union ne s'appliquaient pas. S'il y a un nouvel appel d'offres, les règles de l'Union devront forcément s'appliquer. Je suis sûr que le ministre de la Défense et ses équipes seront extrêmement attentifs à la manière dont les choses se passeront.

S'agissant de l'Inde, les trente-six Rafale sont une « tête de gondole ». Quand ils les auront essayés, ils les apprécieront. La facilité de mise en oeuvre de l'avion est exceptionnelle, le nombre de personnes nécessaires pour la mise en oeuvre est très réduit par rapport à ce que nous avons pu observer sur des avions américains ou russes. Les performances du radar sont extraordinaires. Ce lot de trente-six appareils a été conçu comme une réponse immédiate à un besoin réel des forces indiennes. L'acquisition de ces avions leur permet de constituer un noyau autour duquel les Indiens pourront construire une force aéronautique complémentaire moderne. Ils nous connaissent déjà car ils possèdent une flotte de Mirage 2000, en cours de modernisation, et qui fonctionne très bien. Je pense donc que nous irons assez largement au-delà des trente-six. Dans ce cas se posera peut-être de nouveau la question du transfert d'une chaîne d'intégration en Inde.

L'évolution du dossier KNDS, Monsieur Fromion, est bonne. Les deux équipes s'entendent de mieux en mieux et l'on constate des débuts de coordination sur l'exportation : KMW accepte de ne pas aller sur des marchés où nous proposons des équipements Nexter. Le futur char lourd sera l'occasion de s'assurer que l'on obtient effectivement le meilleur des savoir-faire français et allemands. Je souligne également le bon fonctionnement du conseil de surveillance de l'ensemble, avec une personnalité active et très efficace en son sein, Antoine Bouvier.

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