Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du 11 octobre 2016 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Jean-Yves le Drian, ministre de la Défense :

En effet.

Venons-en à la proposition italienne de créer une force multinationale européenne. S'agissant de l'Europe de la défense, je prône le pragmatisme : dans ce domaine où le grand soir ne se produira jamais, mieux vaut avancer pas à pas. Nous avons accompli de nombreux progrès : les opérations de formation en Afrique, l'opération Sophia, la mission EUTM en République centrafricaine, par exemple. D'autres progrès ont été réalisés concernant la création de capacités communes. Je constate cependant que ceux qui réclament le plus fort une armée européenne sont ceux qui rechignent en pratique. L'armée européenne est sans doute un beau concept théorique, mais il n'est pas près de prendre corps. En revanche, les conditions favorables à la génération de forces rapides fondées sur l'identification préalable d'unités prêtes à se déployer sur-le-champ ainsi qu'à la constitution d'un centre opérationnel européen pourraient être créées à très court terme.

Procédons plutôt par étapes. J'ajoute que si ces progrès ne peuvent être accomplis à 28 États, ils pourront l'être dans le cadre de coopérations renforcées, par exemple à quatre États – ce que nous permettent désormais les traités. Nous sommes déjà prêts à prendre une telle initiative, et je crois comprendre que la Pologne ne s'y rallierait pas – bien que nous ayons contribué à la présence renforcée de l'OTAN sur son territoire. Quoi qu'il en soit, telle est ma démarche ; le reste n'est que discours.

M. Destot m'a interrogé sur le moral des troupes : il demeure en 2016 une grande tension due au fait que les 7 000 à 10 000 femmes et hommes déployés sur le territoire national sont aussi ceux qui effectuent des rotations en opérations extérieures, au Mali par exemple, voire pour le compte des Nations Unies au Liban ou ailleurs. Dans ces conditions, certains d'entre eux se sont absentés jusqu'à 230 jours de leur domicile en 2016, sachant que des permissions – y compris déjà entamées – ont dû être supprimées après l'attentat de Nice. En effet, les onze mille recrutements en faveur de la force opérationnelle terrestre qui ont été annoncés dans la loi de programmation puis en avril 2016 par le Président de la République ne sont pas encore effectifs : il faut six mois pour former les nouvelles recrues, et leur arrivée est étalée dans le temps. Néanmoins, nous connaîtrons au début 2017 une situation d'allégement des contraintes, et le moral remontera. C'est déjà le cas : l'annonce de nouveaux recrutements signifie que tel régiment, composé de quatre compagnies, en comptera désormais cinq, ce qui s'accompagne d'effets positifs sur le moral. Je salue naturellement la détermination dont on fait preuve les hommes et les femmes engagés au cours de l'été 2016, car la protection du territoire national a exigé d'eux une mobilisation difficile, étant entendu que les militaires, en outre, préfèrent souvent exercer dans le cadre des opérations extérieures.

S'agissant de l'information du Parlement et de l'article 35 de la Constitution, je m'en tiens à la déclaration du Premier ministre : le dispositif peut certes évoluer mais à ce stade, la France mène une action de soutien en Irak. Nous avons déployé à Qayyarah une unité d'artillerie forte de 150 hommes, en soutien à l'opération de Mossoul lorsqu'elle débutera. Ce soutien n'est pas différent de notre soutien aérien : il consiste en bombardements.

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