Intervention de Hagi Hasan Brita

Réunion du 18 octobre 2016 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Hagi Hasan Brita, président du Comité civil d'Alep :

Alep subit depuis fin 2013 le bombardement systématique du régime Assad, décuplé ces derniers temps par l'aviation russe. À l'époque, la ville comptait 2 millions d'habitants ; aujourd'hui, seuls 325 000 civils y demeurent. Ils sont totalement assiégés depuis le 8 juillet, c'est-à-dire depuis une centaine de jours, et manquent des produits les plus nécessaires.

Le Comité civil fait de son mieux pour les leur fournir, compte tenu des moyens dont il dispose. Nous fournissons aux civils des services d'électricité, d'eau, d'assainissement, d'infrastructures – y compris routières – et de nettoyage de la voirie. Nous coopérons avec les associations qui exercent dans la ville assiégée.

Il reste 100 000 enfants à Alep, mais le système éducatif est gelé à 70 % en raison du bombardement incessant de l'aviation du régime et de l'aviation russe, qui prennent pour cible les infrastructures essentielles : fours à pain, points de rassemblement des civils, centres de défense civile, bureaux du Comité civil, hôpitaux et cliniques, réserves de denrées alimentaires et de médicaments. Pendant la récente trêve, un convoi du Croissant-Rouge et de l'ONU a été pris pour cible : douze personnes ont été tuées. Telle est la stratégie du régime syrien, qui entend resserrer l'étau autour de la ville d'Alep et faire pression sur les civils afin qu'ils se rendent.

Plusieurs directions de notre Comité – celle de l'éducation, celle des soins et la défense civile – sont chargée d'apporter les premiers secours suite aux bombardements. Les services fournis par le Comité permettent à la population de tenir bon malgré le siège. Pourtant, la situation d'Alep demeure catastrophique : chaque jour, des dizaines de personnes sont tuées ou blessées et les centres névralgiques de la ville sont pris pour cible. Au fond, le véritable problème est moins le siège que le bombardement incessant de l'aviation russe et de celle du régime. Les civils souffrent le martyre. Nous avions d'abord lancé le slogan « Alep brûle » mais, désormais, Alep est anéantie. Parmi les quelque 300 000 habitants encore présents dans la ville, 20 000 enfants ont moins de deux ans et 70 % des enfants en âge d'être scolarisés ne le sont pas. Les services les plus élémentaires font défaut, de même que les denrées alimentaires indispensables. La station de pompage d'eau a été ciblée par les bombardements, et les puits qui subsistent contiennent des eaux contaminées qui pourraient provoquer un grave problème sanitaire. De même, les principales centrales électriques ont été bombardées. Encore une fois, l'aviation russe cible tous les services publics.

La trêve décrétée par la Russie et les États-Unis n'a duré que quarante-huit heures avant d'être rompue. À peine une heure et demie plus tard, 48 personnes ont trouvé la mort dont douze travaillaient pour le Croissant-Rouge et acheminaient de l'aide destinée aux civils. Le régime syrien et les forces russes ont plusieurs fois refusé l'accès des convois d'aide humanitaire à Alep, notamment au poste frontalier de Bab-el-Hawa, comme en a témoigné un responsable de l'ONU, ainsi qu'à plusieurs points de passage vers la ville. Cela revient de facto à anéantir la population de la ville.

Tout ce que nous demandons à la communauté internationale est de faire cesser le bain de sang que provoquent les bombardements des aviations russe et syrienne à Alep et dans toute la Syrie. Plusieurs solutions pourraient aboutir en ce sens : l'instauration d'une zone d'exclusion aérienne et l'interdiction pour les avions de cibler la population civile, par exemple. Le monde entier compatit avec Alep et la Syrie ; pourtant, aucune mesure n'a été prise pour que cesse ce bain de sang. Avant que M. Almawwas ne vous donne des statistiques plus précises, rappelons que derrière les chiffres se trouvent des êtres humains. Nous ne sommes pas des nombres ; nous appartenons à l'humanité.

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