Intervention de Pr Robert Barouki

Réunion du 11 octobre 2016 à 17h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Pr Robert Barouki, professeur de biochimie à la faculté de médecine de Paris Descartes :

Je suis très fier que, dans mon pays, un rapport sur l'épigénétique ait été établi à ce moment-là. Toutes les conclusions n'y figurent certes pas, ce qui, en science, est impossible. Mais c'est le moment opportun pour s'y intéresser et avoir une réflexion aussi complète.

En effet, l'épigénétique est un domaine extrêmement important qui va nous expliquer, d'une part, comment s'organisent les différentes cellules d'un organisme. D'autre part, l'épigénétique permet de voir comment un phénomène, qui apparaît au moment de la vie utérine et de la petite enfance, ne se traduira que plus tard par un diabète ou une obésité.

L'épigénétique n'apporte, certes, pas toutes les explications mais elle nous fournit des moyens prometteurs, comme le fait de coupler l'épigénétique à la notion d'exposome. Là encore, on peut s'en féliciter, d'autant que mes collègues étrangers sont très jaloux de ce que la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé consacre cette notion qui est encore plus récente que celle d'épigénétique. Elle y est très liée puisque, si des molécules sont ajoutées à un organisme vivant, des modifications apparaissent, qui sont des marqueurs génétiques. Des études effectuées chez l'homme montrent que des personnes ayant subi des actes de maltraitance durant leur enfance ont des profils épigénétiques qui en sont témoins. Ceci signifie qu'il existe des expositions chimiques, physiques, psychologiques ou sociologiques qui vont se traduire physiquement sur l'ADN et l'expression des gènes, ce qui nous interpelle parce que, comme l'a dit le président Bruno Sido, se pose la question des déterminismes sociaux.

Les phénomènes épigénétiques s'inscrivent dans la durée mais sont, dans le même temps, potentiellement réversibles parce que les marqueurs épigénétiques interprètent l'influence de l'environnement sur l'expression de nos gènes. Mais comme l'environnement peut changer, il existe une possibilité de réversion, même si elle n'est pas rapide. Ce qui permet d'espérer, dans la possibilité d'un changement des comportements, d'une façon ciblée, alors que les médicaments peuvent s'opposer aux marqueurs épigénétiques de façon générale, ce qui induit des effets secondaires. L'épigénétique connaît ainsi un réel essor avec un potentiel de diverses applications.

S'agissant de l'évaluation des chercheurs, je conviens que ces derniers sont évalués sur la base de leurs publications par les commissions des organismes de recherche. Toutefois, celles-ci oublient parfois que les chercheurs ont participé à l'innovation en déposant des brevets ou ont pu fournir leur expertise à des organes politiques. C'est pourquoi il importe effectivement d'encourager la valorisation, car il y a des pays où celle-ci est plus facile et plus rapide qu'en France.

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