Intervention de Danielle Auroi

Réunion du 12 octobre 2016 à 8h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Auroi, Présidente de la Commission :

Monsieur Van Middelaar, je vous remercie vivement, au nom de notre commission, d'avoir accepté notre invitation à participer à ce cycle d'auditions sur l'avenir de l'Union européenne. Il s'agit pour nous de prendre du recul dans une période troublée, notamment mais pas seulement par le Brexit. Votre regard d'historien et de philosophe, auquel s'ajoute une connaissance pratique des institutions, nous sera très utile dans cette démarche.

À la fin de votre ouvrage majeur, Le passage à l'Europe, paru en 2009, vous demandiez, de manière prémonitoire, ce qui se passerait si la population d'un État membre décidait vraiment, à la majorité, de sortir de l'Union européenne. Or la population du Royaume-Uni a vraiment décidé, à la majorité, de sortir de l'Union. Je vous retourne donc la question ! Que s'est-il passé à votre avis ? Comment inventer l'avenir de l'Europe, non plus à vingt-huit, mais à vingt-sept ? Le président Valéry Giscard d'Estaing a déclaré, en substance, qu'il n'y avait pas matière à négociations et que les Britanniques devaient sortir, un point c'est tout. Selon moi, les choses ne sont pas aussi simples : non seulement nous avons besoin des négociateurs désormais en place, mais nous devons nous poser des questions tous ensemble.

M. Enrico Letta, que nous avons auditionné dans ce même cadre la semaine dernière, nous a rappelé la rupture qu'avait constituée l'échec du traité constitutionnel en 2005. Nombre de vos réflexions portent sur la quête d'un « public européen ». Comment analysez-vous la profusion récente de référendums en Europe ? N'est-elle pas un signal de défiance vis-à-vis de la construction européenne ? Je pense notamment au référendum néerlandais sur l'accord d'association avec l'Ukraine, qui s'est soldé par une réponse négative, ou au référendum hongrois sur l'immigration, même si celui-ci n'a pas été un succès pour M. Orbán. Et je ne parle pas des nombreux référendums promis chez nous, en France, en cette période de précampagne présidentielle.

Dans Le passage à l'Europe, vous affirmiez qu'un État-providence européen était impensable. Qu'est-ce qu'un État-providence, de votre point de vue ? Au sein de cette commission, nous sommes attachés à l'État-providence et nous considérons que la perspective d'une « Europe qui protège » est sans doute la seule façon de réconcilier les citoyens avec la construction européenne. Que pensez-vous de cette approche ? Est-il possible d'être plus clair sur ce qu'est « une Europe qui protège » ? Peut-être pouvons-nous nous mettre d'accord sur la proposition suivante : le fait de ne plus parler d' « État-providence » n'empêche pas de travailler à la protection des citoyens. Est-ce une question que vous envisagez ? Est-elle ou non pertinente selon vous ?

Comment envisagez-vous la suite de la construction européenne ? Doit-elle se faire autour d'un noyau dur d'États souhaitant progresser vers davantage d'intégration ? Il s'agirait, en quelque sorte, d'une « Europe des avant-gardes », mais il faudrait bien sûr, dans le même temps, maintenir une approche à vingt-sept. Ou bien, faut-il une Europe à plusieurs vitesses, avec, éventuellement, un noyau de référence, qui pourrait être la zone euro ? La semaine dernière, lors de mon déplacement à Bucarest, accompagnée notamment de Christophe Caresche, ici présent, nos collègues roumains nous ont fait part de l'amertume que suscite chez eux la volonté de relancer l'Union européenne en créant un Europe à deux vitesses, avec un premier cercle plus intégré que le second, dont ils feraient partie. Ils sont notamment très fâchés de ne pas pouvoir adhérer, pour le moment, à l'espace Schengen. Comment pouvons-nous répondre à cette apparente contradiction ? Peut-être existe-t-il un moyen de gérer l'Union européenne de façon plus souple tout en restant unis ?

En tant que conseiller du président du Conseil européen Herman Van Rompuy, vous avez été un témoin privilégié de l'évolution des institutions européennes depuis la crise financière. Quelles sont les mesures souhaitables et possibles pour réformer à moyen terme ces institutions ?

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