Au sein de cette sous-déclaration, les affections périarticulaires et celles du rachis lombaire en lien avec le travail occasionnent pour l’assurance maladie une dépense estimée entre 80 et 100 millions. La dépense est de 100 millions pour les accidents du travail. Elle est de 280 à 729 millions – l’estimation est très difficile, il suffit de lire le rapport pour le comprendre – pour les cancers professionnels, dont le nombre explose. Elle est de 200 à 350 millions pour l’asthme, en forte augmentation, et les broncho-pneumopathies chroniques obstructives.
La santé au travail connaît et connaîtra des bouleversements liés à l’évolution des techniques, des organisations, à la révolution numérique, à la longévité des individus, avec la permanence de risques déjà identifiés et l’émergence de risques nouveaux.
Par exemple, les maladies psychiques liées se développent mais leur reconnaissance reste infinitésimale et très contrainte par le système complémentaire des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles, les CRRMP. Le rapport entre le nombre de maladies professionnelles d’origine psychique reconnues par les CRRMP et les estimations les plus réalistes atteint ainsi 1 pour 1 000. D’un côté, 315 maladies professionnelles reconnues en 2014, dont 243 dépressions, 39 troubles anxieux et seulement 33 stress post-traumatiques ; de l’autre, 400 000 cas d’épuisement professionnel, selon l’évaluation extrêmement sérieuse de l’IRDES, l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé.
J’en viens à trois sujets qui ont fait l’objet d’amendements.
J’en avais déposé un, portant article additionnel après l’article 39, qui visait à permettre aux infirmiers et infirmières de vacciner plus largement, sans prescription médicale. Actuellement, cette capacité, régie par l’article L. 4311-1 du code de la santé publique, se résume à la vaccination antigrippale au bénéfice des personnes de plus de 65 ans ou atteintes d’une affection de longue durée – un arrêté de juin 2011 précise quelles personnes peuvent en bénéficier. Hélas ! mon amendement a été déclaré irrecevable par la commission des finances, au titre de la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances. Il ne créerait pourtant aucune charge pour la Sécurité sociale en l’état du droit existant, puisque la vaccination n’est pas remboursée en l’absence de prescription médicale. On marche sur la tête ! Les remboursements du vaccin et de l’acte infirmier sont codifiés par la Sécurité sociale. Dès lors, une extension du droit à vacciner les adultes constitue au pire un simple transfert de charges, au mieux une source d’économie, puisque le coût unitaire d’une vaccination par une infirmière serait moindre. On pourrait ainsi améliorer la couverture vaccinale de certaines maladies qui n’ont pas disparu, comme la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite – heureusement, cette dernière n’est actuellement plus présente sur notre territoire –, pour lesquelles des revaccinations sont préconisées à 25 ans, 45 ans, 65 ans et, au-delà, tous les dix ans. Grâce au maillage territorial des infirmiers et infirmières, on pourrait peut-être améliorer la couverture vaccinale de notre pays. Au-delà du triste sort de cet amendement, madame la ministre, la profession attend surtout votre réponse sur cette question sensible.
J’ai déposé un autre amendement, recevable quant à lui, après l’article 44, qui traite d’un sujet tout aussi grave et sensible, la mort subite, dans le droit fil de nos récents débats sur la place du défibrillateur cardiaque dans la chaîne de l’urgence vitale. Grâce à un travail efficace entre l’Assemblée et le Gouvernement – je veux remercier à ce propos Jean-Pierre Decool –, nous avons voté à l’unanimité une mesure utile. À cette occasion, j’ai relayé certaines difficultés soulevées par les experts.
L’article 44 nous propose de reconnaître le transport des nourrissons décédés de cause médicalement inexpliquée comme un transport sanitaire vers les centres experts. C’est là une réelle avancée.
Dans le même temps, la mort subite touche environ un millier de sportifs par an, dont la moitié sur les stades ; dans la quasi-totalité des cas, ce sont les SMUR, les services mobiles d’urgence et de réanimation, qui interviennent. L’amendement vise à expérimenter le transport sanitaire de ces victimes, car elles doivent pouvoir faire l’objet d’une autopsie associant examen anatomo-pathologique, toxicologique et génétique, si possible dans des centres experts. C’est l’une des clés du dépistage des familles à très haut risque de mort subite.
J’en appelle aussi, madame la ministre, au renouveau nécessaire de l’autopsie, tombée en désuétude dans nos hôpitaux – je ne fais là que reprendre les conclusions d’un rapport de l’Académie de médecine publié en 2015.
J’en arrive au dernier point que je voulais examiner avec vous : la discussion d’un amendement adopté en commission et déjà évoqué par plusieurs orateurs, qui tend à instaurer un conventionnement sélectif des médecins dans des zones excédentaires en offres de soins – ces zones restant du reste à définir. Il ambitionne d’être une mesure incitative à l’installation dans des zones sous-dotées. C’est peu de dire que cet amendement a suscité depuis sa publication de vives réactions dans Landerneau.