Intervention de Philippe Vitel

Séance en hémicycle du 25 octobre 2016 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Vitel :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le 23 octobre 2012, il y a quatre ans presque jour pour jour, madame la ministre, à cette tribune, vous insistiez sur l’honneur qui était le vôtre de présenter le premier projet de loi de financement de la Sécurité sociale de gauche depuis dix ans. Vous proclamiez haut et fort votre « ambition de réhabiliter les mots mêmes de "protection sociale", dévoyés », selon vos dires « par cinq années de discours caricaturaux sur l’assistanat ». Vous déclariez alors : « Les efforts porteront sur le système, et non sur les assurés. Les Français ont besoin de protection, et non d’incertitudes. » Vous dissertiez sur l’« inexorable délitement du lien social », le « repli sur soi », la « peur du déclassement [des] classes moyennes », l’« accroissement des inégalités, au premier rang desquelles les inégalités de santé ».

Mais quel est votre bilan, quatre ans après ? Bien évidemment, aucune réforme structurelle n’est survenue. Bien sûr, il y a l’illusion de l’amélioration des comptes sociaux, mais à quel prix ? Au prix, madame la ministre, de tours de vis répétés, chaque année, sur l’assurance maladie, d’économies sur la pertinence des soins, d’une frénésie de l’ambulatoire, d’une obsession des marges de l’industrie pharmaceutique, au détriment de sa capacité d’investissement dans la recherche et l’innovation.

La prévention, elle, est passée en pertes et profits, au fil de grands discours jamais suivis de concret. Aujourd’hui plus que jamais, force est de constater que les addictions explosent. Quant aux grandes envolées sur la lutte contre la désertification, elles n’ont jamais dépassé le stade de l’incantation, aucune évolution positive ne pouvant être constatée. En de très nombreux endroits du territoire, une aggravation manifeste de la situation a même été constatée.

En dépit de votre vision « hospitalocentrée », l’hôpital public continue de voir son déficit exploser, malgré de gros efforts de productivité, avec une hausse de 60 % entre 2014 et 2015. L’hospitalisation privée continue de se voir imposer de nouvelles contraintes réglementaires très coûteuses et jamais compensées, et supporte, année après année, une pression économique de plus en plus énorme. Quant aux praticiens libéraux, ils continuent, année après année, à faire les frais des plans d’économies conjoncturels successifs du Gouvernement.

Mais tout cela ne vous empêche pas de continuer à théâtraliser vos interventions : « En 2017, le "trou de la Sécu" aura disparu », avez-vous déclaré – plus exactement, le déficit sera ramené à 400 millions d’euros. Votre ami Didier Migaud est circonspect quant à vos prophéties, qu’il qualifie d’« incertaines ». Comme il a raison ! Après 3,2 milliards d’économie en 2014, 3,2 milliards en 2015, 3,4 milliards en 2016, ce sont 4,1 milliards d’effort qui seront encore demandés cette année aux professionnels de santé, aux patients, une fois de plus les premiers sacrifiés, et à l’industrie pharmaceutique, comme de coutume.

Ce n’est pas l’annonce d’une augmentation de la consultation de 23 à 25 euros qui redonnera le sourire aux généralistes, madame la ministre, alors que vous vous opposez toujours à ne pas prendre en considération la technicité et la difficulté de certaines de leurs consultations.

Ce PLFSS est, de plus, construit à partir d’une insincérité totale : une croissance supposée à 1,5 %, malgré le consensus des économistes et le FMI – le Fonds monétaire international –, qui s’accordent sur 1,2 %, mon ami Bernard Perrut vient d’y insister.

La branche vieillesse est annoncée excédentaire de 1,6 milliard en 2017. Mis à part quelques pansements votés en 2014, c’est là le résultat de la très bonne réforme d’Éric Woerth de 2010, que vous aviez alors tant décriée et surtout que vous n’aviez pas votée.

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