Intervention de Dominique Tian

Séance en hémicycle du 25 octobre 2016 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Tian :

Cette année encore, vous demanderez un effort historique non seulement aux industries du médicament mais aussi aux cliniques privées. Je voudrais insister sur la nouvelle baisse du prix de journée du secteur hospitalier privé, qui atteint 2 % cette année : les tarifs du privé s’en trouvent ramenés sous de leur niveau de 2004, alors qu’ils sont déjà inférieurs de 22 % à ceux du public. Nous assistons là à une politique gouvernementale de destruction lente de l’hospitalisation privée, qui menace la pérennité d’un secteur d’excellence et met en péril de nombreux établissements. Il en va de même pour l’industrie du médicament.

Autre motif d’inquiétude que vous passez sous silence, madame la ministre : le montant de la dette sociale, dont il a été question il y a quelques instants. Cette dette s’élève à 152 milliards d’euros fin 2016. Cela signifie que vous avez renoncé, pendant cinq ans, à conduire les réformes nécessaires. Les générations futures devront payer ce laxisme généralisé.

L’article 9 du texte prévoit une réorganisation du RSI, ce que je juge totalement incompréhensible. Vous écrivez, à la page 42 de l’annexe 3 B au PLFSS : « Les actions et mesures engagées ces dernières années par les pouvoirs publics, le RSI et la branche recouvrement du régime général ont permis de rétablir une gestion normalisée du RSI. » Pourquoi, madame la ministre, vous lancez-vous dans cette réforme à marche forcée – puisque vous indiquez une échéance extrêmement brève, au début de l’année 2017 –, alors même qu’elle est qualifiée de « catastrophe industrielle » et que les commerçants, les artisans et tous les bénéficiaires du RSI s’en inquiètent beaucoup ? Lors des discussions en commission, certains ont d’ailleurs demandé, m’a-t-il semblé, que l’adhésion des professions libérales à ce régime soit retardée d’un an, à cause de l’impréparation de ce texte. Le monde artisanal se pose des questions très précises et craint une nouvelle catastrophe.

L’article 10 nous a beaucoup étonné car il porte sur l’économie collaborative, qui correspond plutôt à votre philosophie. De quoi s’agit-il ? Aux termes de cet article, les personnes louant, par exemple, leur voiture – voire leur camping-car ou leur bateau –, dont ils n’usent pas quotidiennement, devront s’affilier au RSI à partir de 3 860 euros de recette ou de chiffre d’affaires par an, c’est-à-dire presque rien. Vous exigez d’eux non seulement qu’ils s’affilient au RSI, mais aussi qu’ils deviennent des professionnels, alors que ces mécanismes de location de particulier à particulier correspondent aux besoins d’une économie moderne. Nous en avons beaucoup parlé en commission. Je pense que c’est très grave, car le statut général de la fonction publique interdit aux fonctionnaires d’exercer une autre activité professionnelle. Vous les mettrez donc dans une situation compliquée, de même que nombre de retraités. Pourquoi en faire des professionnels, dans la mesure où il s’agit de revenus d’appoint ? Pourquoi les soumettre à un seuil aussi bas que 3 860 euros par an ? Je crois savoir que ce seuil sera bientôt doublé, mais je ne vois pas comment nous pourrions nous satisfaire du principe même. C’est un problème juridique qui se pose : pourquoi considérer comme des professionnels des particuliers procédant à de petites locations, pour se procurer un complément de revenus ? Nous aurons d’importants débats à ce sujet car une vive inquiétude se fait jour.

Madame la ministre, pendant ces cinq années, vous n’avez pris aucune mesure d’ampleur pour assurer l’équilibre des comptes. De ce point de vue, malheureusement, ce projet de loi de financement nous déçoit, même si nous n’en attendions pas grand-chose. C’est aujourd’hui l’heure des bilans mais ce sera à nous, demain, d’effectuer le travail de redressement des comptes, comme cela a été fait dans la plupart des autres pays européens.

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