Avant 1998, le système fonctionnait avec quatre opérateurs : la caisse, qui était limitée à ce qu'on appelait le champ et qui intervenait essentiellement en matière économique et financière ; la direction du trésor, dont le domaine était la matière économique et financière hors champ ; la direction du développement, qui intervenait pour tout ce qui était culturel, scientifique et technique dans le champ ; la direction générale du ministère des Affaires étrangères. À l'époque, il était très difficile de comprendre ce fonctionnement. La réforme engagée en 1998 a permis de clarifier le système en ne conservant qu'un seul opérateur, même si un seul opérateur qui cumule des objectifs différents, cela reste un peu compliqué.
L'Agence ne détermine rien, nous sommes en discussion permanente avec nos tutelles, que j'ai d'ailleurs l'habitude de comparer à Shiva et ses douze bras. Nous passons notre temps à essayer de coordonner les instructions du ministère des affaires étrangères, de la direction du trésor. Nous sommes tributaires des arbitrages interministériels. Il n'y a rien là de choquant ou de gênant, même si cela complique la gestion au quotidien. Ce qu'il faut, c'est prendre de la distance par rapport à certaines crispations. Heureusement, notre POS 3 a été adopté au mois d'octobre et totalement validé par les nouveaux ministres. L'Agence ne décide pas toute seule, au point que nous sommes parfois dans un micro-management. D'ailleurs, la diversité de vos questions montre combien tout cela est compliqué.
Au Mali, nous n'avons pas déserté le terrain. Les événements sont survenus le 22 mars. Notre directeur d'agence, dont l'épouse travaillait au lycée français, a pris des vacances de printemps pour se familiariser avec sa nouvelle affectation en Martinique. Ce n'était pas une désertion. Puis la situation s'est compliquée, l'Élysée nous a donné instruction d'attendre. Pendant cette période, l'Agence a fonctionné avec des personnels locaux. Par la suite, à l'issue d'un appel à candidature, un nouveau directeur d'agence a été choisi qui, pour cause de maladie, a malheureusement été obligé de décliner l'offre. Après quoi est intervenue une instruction du quai d'Orsay recommandant de faire appel à un « géographique célibataire ». Or le deuxième candidat pressenti a refusé de partir sans son épouse. Aujourd'hui, nous avons enfin un nouveau directeur d'agence, qui sera autorisé à partir le 17 février.
Pour répondre à M. Mamère sur les différentes cultures, celles qui sont destinées à l'exportation sont indispensables pour avoir des cultures vivrières. Dans le schéma paysan africain, le cotonculteur a un champ pour moitié dédié à l'exportation et pour moitié réservé aux cultures vivrières. C'est grâce aux engrais que la société cotonnière lui donne pour la culture d'exportation qu'il fait son vivrier. Les deux sont intimement liés, on ne peut pas, il ne faut pas les opposer. C'est en aidant la culture du coton, tout en surveillant l'utilisation des engrais, qu'on aidera les cultures vivrières. Par ailleurs, je n'ai rien à dire s'agissant de votre remarque sur l'accaparement des terres sinon que c'est un véritable problème.
Le Mali n'est pas la seule problématique africaine, il y a aussi toute l'Afrique sahélienne et même l'Afrique francophone. Cette dernière va moins bien que l'Afrique anglophone où, d'ailleurs, nous intervenons plus en raison du plus grand nombre d'opportunités. Une véritable réflexion doit être menée sur l'Afrique francophone, et nous l'avons engagée avec nos autorités de tutelle à la lumière de l'élément particulier qu'est le Mali.
Nous ne sommes pas habilités à financer des projets culturels, c'est le domaine des SCAC. Néanmoins, nous veillons à la défense de la langue française, qui est l'un des axes principaux fixés à l'Agence depuis bien longtemps, à travers le financement de centres de formation professionnelle, par le biais desquels on améliore l'employabilité des populations. En finançant ces centres, nous permettons l'utilisation du français pour les normes techniques françaises. Là se trouve ce que j'appelle la capacité d'influence.
Comment, tout en maintenant notre mission de solidarité internationale, accompagner les entreprises ? Vous me dites recevoir de la part des entreprises à la fois des retours positifs et des plaintes. Je veux essayer de purger le sujet : une seule entreprise se plaint à propos de deux projets. Le premier est le barrage de Lom Pangar, au Cameroun, pour lequel nous finançons le déplacement des populations et le respect de la biodiversité afin que cela soit fait dans des conditions correctes. Nous ne finançons pas le génie civil qui a fait, du reste, l'objet d'une proposition plus chère de 70 % difficile à justifier. Le second projet concerne l'aéroport de Nairobi, avec la construction d'une troisième piste et d'une troisième aérogare. Pour ce projet qui n'implique rien que de très classique – bitume, bâtiment, ciment –, le maître d'ouvrage s'est fait assister de l'entreprise française Aéroports de Paris International : résultat, un surcoût de 95 % ! N'oublions pas que l'absence de déliement a été à l'origine de beaucoup de problèmes. Du reste, il est intéressant de constater que le CIAN, qui regroupe 1 300 entreprises impliquées en Afrique subsaharienne, ne demande surtout pas le reliement de l'aide, car ses entreprises bénéficient considérablement des financements des autres. C'est donc là un sujet sur lequel il faut savoir raison garder, en sachant que nous faisons le maximum pour que des entreprises françaises puissent participer à nos projets. À cet égard, le fonds d'expertise technique annoncé par le ministre de l'Economie et des Finances M. Pierre Moscovici est essentiel, car, quand nous finançons une expertise pour le plan de financement ou l'étude de faisabilité, nous structurons le travail avec le maître d'ouvrage dès le début. C'est de cette manière que nous allons essayer de ne pas perdre notre vocation de solidarité internationale.
L'Agence est impliquée depuis 2007 dans la croissance verte et solidaire. Le Gouvernement nous demande d'en faire plus ; ce n'est pas un problème, d'autant que cette démarche s'inscrit parfaitement dans notre approche des pays émergents. Nous avons été les premiers, en partenariat avec les Japonais, à financer un plan de lutte contre le changement climatique en Indonésie et à développer des outils sur ces problématiques, si bien que la Banque mondiale et la Banque asiatique de développement ont demandé à nous rejoindre. Toujours avec nos partenaires japonais, nous avons fait la même chose au Vietnam et une opération est en cours aux Philippines. Au Mexique, nous menons une action similaire mais seuls. Grâce à notre plan d'orientations stratégiques, qui commande différents cadres d'intervention, nous allons encore plus loin. Avec nos tutelles, nous avons arrêté un document sur l'énergie qui fait de l'efficacité énergétique un élément essentiel.
Nous intervenons en Inde et au Brésil principalement à travers le financement des transports urbains, ainsi qu'à Medellin où se développe un projet extraordinaire.
L'outre-mer est une zone très importante pour nous, puisque notre activité y est en croissance : nous avons atteint 1,4 milliard cette année, la tendance historique étant d'un milliard. Nous avons fait des offres de service à la BPI et à nos autorités de tutelle pour le secteur de l'habitat avec un plan habitat fondé sur les sociétés immobilières. Notre activité se développe aussi en outre-mer parce que les entreprises y sont confrontées à un vrai problème de financement.
Conformément à l'un de ses engagements de campagne, le Président de la République a décidé de doubler les subventions aux ONG. Nous sommes service instructeur du ministère des affaires étrangères et les crédits seront augmentés de 45 à 90 millions, à raison d'une augmentation d'un cinquième par an. Cela devrait nous permettre de répondre à une demande de projets par les ONG que nous n'étions pas en mesure de satisfaire. Nos critères, aussi bien pour les collectivités locales que pour les ONG, sont définis dans nos cadres d'intervention stratégiques arrêtés avec les tutelles. Si les projets proposés par ces collectivités locales et ces ONG rentrent dans ces cadres, nous les accompagnons. Les ONG sont très jalouses de leur indépendance, tout comme les collectivités locales qui l'ont réaffirmé hier, à la commission nationale de la coopération décentralisée. Notre participation financière repose donc sur un travail de dialogue. Dans ces conditions, il peut certes se poser un problème de coordination, mais c'est le corollaire de la liberté et de l'absence d'encadrement que réclament ces partenaires.
En matière de bilatéralisme et de multilatéralisme, l'important est que nous développions de plus en plus de partenariats. Nous sommes aujourd'hui, avec les Allemands, les plus grands bénéficiaires de l'aide européenne. Grâce à notre réseau, notre présence sur le terrain est reconnue par Bruxelles, au point qu'on nous confie des crédits. C'est ainsi que nous avons conduit notre action de développement de périmètres irrigués sur les fleuves Niger et Sénégal, au Mali, au Sénégal ou en Guinée-Conakry sur des crédits européens, et que notre intervention sur la troisième ligne de métro du Caire s'appuie également en partie sur des financements de même origine. Nous avons aussi des accords de coopération avec la BEI et la KfW.
Pour ce qui est de l'ajustement monétaire de la Chine, l'Agence ne peut pas porter toutes les problématiques de la gouvernance internationale.
Nous travaillons étroitement avec Ubifrance.