Je remercie CARE France de nous avoir conviées à cette visite d'étude de quatre jours qui nous a permis d'appréhender toutes les problématiques en Côte d'Ivoire. Je vais vous parler de l'égalité entre les femmes et les hommes et du développement économique.
Nous avons découvert « l'école des maris », où les hommes s'impliquent dans l'amélioration de la santé des femmes en ayant un rôle majeur puisqu'ils vont porter la bonne parole et sensibiliser la communauté à la santé maternelle. Ainsi, lorsqu'une femme attend un enfant, ces hommes vont parler aux maris pour leur expliquer qu'elle doit arrêter les travaux dans les champs à sept mois de grossesse, par exemple.
À ce jour, les femmes sont particulièrement vulnérables : le rôle des hommes est aussi d'expliquer que la violence et les discriminations doivent être proscrites et que, lorsque des femmes veulent travailler, il faut leur laisser la possibilité d'avoir une activité.
Ce sont des objectifs ambitieux : si l'égalité entre les hommes et les femmes est un droit fondamental, le chemin sera très long, et ce changement passera impérativement par les hommes.
Le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) soutient ce projet. C'est pour moi la clé pour plus de justice, plus d'égalité ; impliquer les hommes dans la promotion de la santé, c'est aussi favoriser le changement qui est d'autant plus nécessaire que de nombreuses jeunes filles n'ont pas le droit d'aller à l'école car elles n'ont pas été déclarées à la naissance, d'où l'importance de l'information.
Nous avons eu des témoignages de femmes et de maris qui apprécient ce changement. Parmi les messages très forts sur la santé maternelle, il y a la régulation des naissances – très importante pour la famille et l'avenir des enfants car beaucoup de mères meurent en couche.
Dans un village, nous avons fait une belle rencontre d'agricultrices réunies en coopératives. Ces femmes se prennent en main en faisant face à de nombreuses difficultés : l'accès à la terre n'est pas évident, elles ont peu accès à la formation et aux matériaux agricoles pour subvenir aux besoins de leur famille – elles utilisent toujours la faux et la binette –, elles travaillent très dur et souvent avec un enfant sur le dos ou en étant enceinte. Je trouve ces femmes extraordinaires : elles cultivent, elles vendent et peuvent ainsi mettre un peu d'argent de côté, elles se soutiennent et augmentent leur productivité, et ce dans un but ultime qui est la scolarité de leurs enfants.
Nous avons également rencontré une association villageoise d'épargne et de crédit, dans la périphérie d'Abidjan, qui permet de financer les activités génératrices de revenus – un peu comme l'économie sociale et solidaire chez nous. L'argent épargné permet aux femmes d'investir dans des matériaux et d'acheter des semences. Le fait de mener leur projet permet aux femmes d'avoir une meilleure estime d'elles-mêmes, de mieux comprendre leurs droits, ce qui contribue à leur émancipation et à leur participation aux espaces de décision.
L'« homme champion » dans le village, membre de la « commission genre », exerce un rôle de médiateur au sein de la communauté. Les femmes participent ainsi aux « causeries » grâce auxquelles elles peuvent s'exprimer, parler de leurs difficultés. Ces hommes champions interviennent lorsqu'un mari interdit à sa femme de participer à une activité.
Nous avons également rencontré Leadinvest, un groupe de femmes soutenu par l'ONG locale LeadAfricaines qui est avant tout un observatoire des inégalités de genre dont la mission est d'apporter aux femmes et aux filles les plus défavorisées les ressources nécessaires pour devenir autonomes et acquérir les savoirs, sous l'angle de plusieurs thématiques : accompagnement, autonomisation, formation, capitalisation des bonnes pratiques, information, orientation, réseautage pour l'intégration du genre, plaidoyer, sensibilisation… L'autonomisation est un levier extraordinaire pour renforcer les droits des femmes et constitue la clé du développement.
LeadInvest est donc un groupe de femmes qui investissent en bourse afin de financer leur activité professionnelle sans devoir passer par un prêt de la banque, souvent difficile à contracter. Ces femmes, leaders en quelque sorte, contribuent à l'émergence de modèles ou de références, et elles communiquent auprès des jeunes générations pour soutenir l'idée que les femmes sont actrices de leur vie.
En conclusion, je dirai que les barrières culturelles sont très fortes : ces femmes n'ont pas le droit de choisir leur propre vie. Une forte mobilisation des ONG est donc indispensable, tout comme l'aide publique au développement, qui doit servir cette ambition de l'égalité des sexes et de l'autonomisation des femmes. Le travail en faveur du changement se fera avec l'accord des hommes. Les gouvernements ont donc un rôle à jouer. La France a salué l'adoption de l'agenda 2030 qui fixe les objectifs de développement durable (ODD) pour la planète. Il faut donc lutter contre la pauvreté – l'objectif d'éradiquer la pauvreté est-il atteignable ? –, et notre expérience en Côte d'ivoire nous a montré que le chemin pour y parvenir sera très long. La France doit apporter tout son soutien à la poursuite de toutes ces expériences réalisées en Côte d'Ivoire et plus généralement en Afrique. C'est pourquoi nous faisons partie des députés qui soutiennent fortement l'enjeu de l'aide au développement.