Mes chères collègues, merci pour cette présentation qui illustre parfaitement des thématiques évoquées dans ce rapport d'information sur « L'aide publique au développement : une opportunité pour les femmes », qui comporte les actes du colloque organisé par la Délégation aux droits des femmes le 5 juillet 2016.
Ce rapport souligne que la pauvreté est fondamentalement sexiste, que 70 % des personnes vivant avec moins de 1 dollar par jour sont des femmes, que les deux tiers des adultes analphabètes sont des femmes. Il évoque également les problématiques de la scolarisation, de la contraception, des droits sexuels, de l'absence de structures d'accueil et les écarts salariaux. Ces inégalités ont un coût économique important pour les pays. C'est dire si l'autonomisation des femmes est une condition du développement.
Au cours de la précédente législature, Mme Danielle Bousquet avait organisé un colloque à l'Assemblée nationale sur le thème « Filles et développement », qui a montré que deux à trois ans d'alphabétisation supplémentaires des filles représentaient plusieurs points de produit intérieur brut (PIB) pour les pays. Autrement dit, si les filles allaient plus longtemps à l'école, cela permettrait d'augmenter les capacités des pays ne serait-ce qu'en termes de développement.
L'aide publique au développement représente 0,37 % du revenu national brut, soit 8,3 milliards d'euros, alors qu'elle devrait atteindre, c'est ce que nous souhaitons, 0,7 %. Mais elle va augmenter cette année.
L'efficacité de notre aide au développement est un enjeu majeur. Je compte sur vous pour faire aboutir nos demandes. Je vais demander à M. Jean-Marc Ayrault, ministre des Affaires étrangères et du Développement international de mettre sur pied la nouvelle stratégie « Genre et développement » pour 2017-2020 – stratégie qui est normalement fléchée « femmes ». Le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCEfh) est chargé d'évaluer la stratégie « Genre et développement », et nous analysons le budget de l'APD sous cet angle avec un fléchage des aides vers les filles.
L'ensemble des projets doivent être examinés sous le prisme du genre, et il a été fixé l'objectif de 50 % de projets marqués genre d'ici 2017, c'est-à-dire soit du chiffre 1, soit du chiffre 2. Le chiffre 1 concerne les projets intégrant l'égalité des sexes comme un objectif significatif. À titre d'exemple, on peut financer un transport collectif pour une route qui mène à une école de filles : on aura atteint l'objectif si les filles peuvent monter dans le bus et continuer à aller à l'école en toute sécurité. Le marquage 2 concerne les projets ayant l'égalité pour objectif principal. Ce peut être un dispensaire, un centre de planification, l'accueil de la petite enfance, l'aide aux femmes entrepreneures, etc.
Or, d'après le dernier rapport du HCEfh, la part d'aide bilatérale marquée genre n'est que de 17 % en 2015 (marqués 1 ou 2), et seulement 0,16 % d'engagements, représentant 9 millions d'euros, ont été marqués 2. C'est dire si des progrès restent à accomplir. Le rôle des parlementaires, en lien avec les ONG, est de demander continuellement la façon dont est réparti le budget de l'APD.
D'après ce que j'ai compris, la demande d'augmentation du budget de l'APD serait acceptée. En plus des vôtres, je déposerai deux amendements : un amendement global sur les politiques interministérielles, afin que les documents de politique transversale (DPT) annexés au projet de loi de finances soient réellement genrés – ces annexes doivent en effet permettre de voir quelles aides vont aux femmes et quelles aides aux hommes – ; un second amendement tendant à réaffirmer l'objectif de 50 % : les mesures doivent être détaillées dans le cadre de la mise en oeuvre de la stratégie nationale « Genre et développement ».
Il s'agit ainsi d'un sujet très important, et nous ne devons pas baisser la garde. Lors de la COP 21, nous avons souligné que la lutte contre le changement climatique passerait par les femmes. Ce sont elles qui font l'économie, ce sont elles qui vont aux champs, y compris lorsqu'elles sont enceintes. Il faut leur donner les moyens d'accéder à la terre – elles doivent donc être déclarées civilement –, d'obtenir l'accès à la succession – elles doivent donc pouvoir devenir propriétaire –, de disposer de semences durables, de vendre leurs produits, etc. L'aide au développement doit être ciblée, et il faut le souligner à nouveau : aucun budget n'est neutre, il est forcément genré.
Félicitations encore, mesdames, pour votre travail.