Nous examinons un budget primordial, qui doit répondre aux enjeux majeurs de la pression migratoire accrue et de l'accueil des réfugiés.
Plus de 80 000 demandes d'asile ont été présentées en France en 2015, soit une hausse annuelle de 23,6 %. Cette hausse se poursuit en 2016, avec plus de 54 000 demandes présentées de janvier à août.
Ce budget doit être à la hauteur de ce qui constitue, pour la France et l'Europe, une urgence humanitaire et un devoir moral : accueillir sur la période 2015-2017, dans le cadre de nos engagements européens et internationaux, plus de 30 000 demandeurs d'asile et réfugiés issus des zones de conflit. Ce chiffre de 30 000 est à rapprocher du million de réfugiés accueillis en Allemagne.
Avec près de 1,1 milliard d'euros de crédits demandés pour 2017, le budget consacré à l'immigration, à l'asile et à l'intégration affiche une hausse de 12 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2016 ; c'est une bonne chose.
La réduction des délais de traitement des dossiers et le respect des règles de sortie des CADA pour les personnes déboutées et les bénéficiaires d'une protection internationale sont évidemment nécessaires pour améliorer la fluidité du dispositif d'hébergement.
Les outils créés par la loi du 29 juillet 2015, tels que l'allocation pour demandeur d'asile (ADA), ont permis d'améliorer la gestion de l'afflux des demandes d'asile. Nous notons à ce titre la hausse du budget consacré à l'ADA, de 138 millions à 220 millions d'euros. Pour autant, l'OFII sera-t-il en mesure de remplir la nouvelle mission consistant à détecter la vulnérabilité des demandeurs d'asile ? Je pense qu'il y a un trou dans la raquette à ce sujet.
L'augmentation de près de 12 millions d'euros de la subvention pour charges de service public versée à l'OFPRA par rapport à la LFI 2016, et la création de quarante équivalents temps-plein sont à saluer. En effet, le respect des délais prévus par la loi impose d'allouer des moyens supplémentaires, dans le contexte d'un flux de demandes qui ne tarit pas.
Pour autant, d'année en année, l'objectif de réduction du délai moyen de traitement d'un dossier par l'OFPRA, de même que l'objectif d'augmentation du nombre de décisions rendues, semblent très optimistes. L'an dernier, l'objectif était de réduire le délai moyen de traitement d'un dossier par l'OFPRA, actuellement de 200 jours, à 140 en 2016 puis à 90 en 2017. Or, le document budgétaire précise qu'en 2015, le délai moyen de traitement d'un dossier était de 216 jours.
Dans le rapport d'information que Mme Jeanine Dubié et moi-même avons présenté, nous indiquons par ailleurs que l'objectif d'un délai moyen de jugement de cinq mois et cinq semaines devant la Commission nationale du droit d'asile (CNDA) ne pourrait être atteint à l'horizon 2017 sans moyens supplémentaires.
En dépit des efforts réalisés pour accélérer la création de places en CADA et des crédits supplémentaires alloués pour créer des hébergements d'urgence, l'afflux des migrants et la mise en oeuvre d'engagements européens successifs pèsent sur le dispositif d'hébergement, même si la hausse de crédits de 118 millions d'euros en 2017 est à saluer. Cette augmentation de places – certes importante – couvrira-t-elle pour autant tous les besoins en termes d'hébergement ? Une meilleure prévision à moyen terme des besoins en places d'accueil et d'orientation est nécessaire, afin d'éviter les surcoûts liés à l'équipement en urgence de locaux non adaptés – pour ne pas dire plus. En effet, les programmes budgétaires 303 et 177 sont régulièrement sous-dotés, nous le disons chaque année sans que rien ne change.
En matière de lutte contre l'immigration irrégulière, après une baisse constante des crédits consacrés à cet objectif, les crédits de paiement devraient augmenter cette année de 13 millions d'euros. Nous ne pouvons que nous féliciter.
Néanmoins, ce budget est aussi destiné à permettre la mise en oeuvre de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France. Or nous craignons notamment les conséquences d'un assouplissement excessif des conditions de délivrance de la carte de séjour pluriannuelle, ou encore celles de l'élargissement de l'accès à la procédure de séjour pour les étrangers malades et de l'autorisation de séjour de plein droit pour le parent d'un enfant malade.
Pour terminer, je souhaite appeler votre attention sur la différence d'appréciation de la situation des Afghans entre la France et l'Allemagne. Les Allemands les considèrent comme des migrants économiques alors que nous les considérons comme des demandeurs d'asile. Nous nous interrogeons fortement à ce sujet.