Intervention de Jean-Claude Fruteau

Réunion du 26 octobre 2016 à 16h20
Commission élargie : finances - affaires économiques - développement durable - affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Claude Fruteau, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour les crédits des transports aériens et de la météorologie, et pour le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » :

Le projet de budget annexe « Contrôle et exploitation aériens »pour 2017 confirme que l'activité de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) poursuit sa dynamique vertueuse de désendettement et d'investissement. Les recettes, à 2 milliards d'euros, sont maintenues à un niveau suffisant, mais leur croissance est contenue afin de ne pas peser sur le secteur du transport aérien. L'encours de dette diminue : il est désormais inférieur au niveau de 2008, l'année de la crise du transport aérien.

Je m'interroge sur la recette supplémentaire provenant de l'affectation au budget annexe de la totalité du produit de la taxe d'aviation civile, dont une partie allait, jusqu'à l'an passé, au budget général. Ce supplément de recette d'environ 26 millions d'euros figure en « surexécution » dans le budget de l'exercice en cours. Envisagez-vous, monsieur le secrétaire d'État, d'utiliser cette somme pour accélérer encore le désendettement de la DGAC ?

Je souligne le niveau élevé d'investissement, de 250 millions d'euros, conformément à la programmation pluriannuelle de près de 1,4 milliard d'euros. Ces investissements sont nécessaires pour parvenir aux meilleurs standards techniques européens.

Compte tenu du protocole social 2016-2019, signé le 19 juillet dernier avec la majorité des syndicats des personnels de la DGAC, ce budget prévoit également un nouvel investissement dans les ressources humaines. Le protocole demande des efforts importants aux agents de la DGAC. Ils devront adapter leurs modes de travail à la mise en place des nouveaux systèmes informatiques de navigation aérienne ainsi qu'aux nouvelles contraintes du trafic. Les contrôleurs aériens, par exemple, devront modifier leurs cycles de travail afin d'accroître l'offre de navigation en périodes de pointe, particulièrement en été. Cela permettra de diminuer les retards et d'augmenter les recettes de redevances de la DGAC. Les contreparties financières sont importantes, mais elles ne seront pas automatiques. Elles dépendront de la mise en oeuvre des réformes selon une approche « donnant-donnant », primes contre productivité. Comme autre contrepartie, le schéma d'emploi prévoit, en 2017, 2018 et 2019, le remplacement de tous les départs en retraite, alors que l'aviation civile a supprimé 10 % de ses effectifs entre 2007 et 2015. Je forme le voeu que l'application du protocole permette à toutes les catégories de personnels de la DGAC de bénéficier de perspectives de progression, car elles contribuent toutes à la chaîne de sécurité de l'aviation civile.

Mes autres interrogations concernent les mesures en faveur de la compétitivité du transport aérien français. De nombreux leviers de redressement sont à la portée des acteurs eux-mêmes, comme l'attestent les efforts importants engagés par la compagnie Air France, mais l'État peut intervenir utilement.

La réussite du projet du Charles-de-Gaule (CDG) Express est un enjeu majeur pour l'attractivité de l'aéroport de Roissy et celle de notre pays. Je salue la détermination sans faille des responsables du projet. Toutefois, la taxe sur les passagers aériens qui serait susceptible de compléter le financement de ce dernier représenterait une charge supplémentaire difficile à absorber pour le secteur. Monsieur le secrétaire d'État, avez-vous défini des financements alternatifs ? À défaut, une compensation peut-elle être envisagée en supprimant ou en réduisant certains prélèvements indus sur le transport aérien ? Le rapport sur la compétitivité du transport aérien français, présenté par notre collègue Bruno Le Roux il y a deux ans, comporte des propositions en ce sens qui me paraissent toujours d'actualité.

La Cour des comptes a récemment proposé de supprimer l'écrêtement actuel de la taxe de solidarité. Au-delà du montant de 250 millions d'euros attribués au Fonds de solidarité pour le développement, le produit de cette taxe est aujourd'hui reversé au budget général. La Cour des comptes propose de diminuer les tarifs de la taxe pour alléger la charge sur le transport aérien. Quelles sont les intentions du Gouvernement à cet égard ?

Enfin, je souhaite alerter sur les risques que présente, pour le transport aérien français, le détournement du droit européen relatif au détachement des travailleurs à des fins de dumping social. Afin d'échapper à notre droit social, certaines compagnies bien connues utilisent massivement des travailleurs détachés pour des activités basées exclusivement en France. Elles invoquent le droit européen pour faire échec aux contrôles des administrations françaises et à des décisions de justice qui les ont pourtant condamnées à acquitter des cotisations qu'elles refusent de payer. Comment le Gouvernement entend-il faire valoir auprès de la Commission européenne la nécessité de lutter contre les détachements abusifs ? La menace ne doit pas être sous-estimée ; elle présente un risque mortel pour toutes les compagnies du pavillon français qui acquittent leurs contributions sociales en France.

Monsieur le secrétaire d'État, vous êtes intervenu avec votre collègue allemand, pour engager une stratégie commune contre les détachements frauduleux dans le transport routier. Envisagez-vous la même initiative pour le transport aérien ? Comment entendez-vous peser sur les grands équilibres de la directive européenne en préparation, qui modifiera les textes actuels, sources d'abus ?

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