Intervention de Jean-Claude Buisine

Réunion du 26 octobre 2016 à 16h20
Commission élargie : finances - affaires économiques - développement durable - affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Claude Buisine, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour la sécurité et les affaires maritimes, la pêche et l'aquaculture :

Le programme 205, qui regroupe les crédits consacrés à la sécurité maritime, à la formation des marins, au développement durable du littoral et aux aides à la pêche et à l'aquaculture, bénéficiera, en 2017, d'une hausse de 9 %, pour atteindre un montant total d'environ 200 millions d'euros en crédits de paiement et autorisations d'engagement.

L'augmentation significative du montant des crédits par rapport au budget 2016 est liée aux dispositions de la loi du 20 juin 2016 pour l'économie bleue, dont l'article 43 a élargi l'exonération des charges dites « non-ENIM » – en référence au régime géré par l'Établissement national des invalides de la marine – à l'ensemble des navires de transport et de services maritimes battant pavillon français, soumis à la concurrence internationale. Je me félicite de cette mesure qui permettra d'améliorer l'employabilité de nos marins et la compétitivité de nos armements. Le marin français a trop souvent été pointé du doigt pour son coût excessif par rapport aux conditions d'emploi des marins étrangers. Dans quelle mesure exactement ces nouvelles exonérations seront-elles bénéfiques aux marins et aux armateurs français ? Je souhaiterais que nous puissions disposer d'éléments de suivi précis de cette mesure adoptée dans le cadre de la proposition de loi portée par notre collègue Arnaud Leroy.

En ce qui concerne le volet « pêche », à l'heure actuelle, la principale difficulté du secteur reste le phénomène de mortalité massive qui touche la mytiliculture pour la troisième année consécutive – on enregistre dans ce secteur un taux de mortalité de 70 % en moyenne. Le Gouvernement a annoncé qu'il compléterait les aides conjoncturelles du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) en mettant en place une exonération des redevances domaniales pour les mytiliculteurs concernés en 2016. Monsieur le secrétaire d'État, pourriez-vous nous confirmer cette annonce et nous apporter des précisions à ce sujet ?

Je souhaite appeler l'attention sur les conséquences que pourrait avoir pour la pêche française le départ du Royaume-Uni de l'Union européenne. Tout dépendra des revendications formulées par le Royaume-Uni une fois qu'il sera libéré des obligations de la politique commune des pêches (PCP). Les conséquences pourraient se révéler considérables et menacer un secteur déjà fragile économiquement. Le premier port de pêche français, Boulogne-sur-Mer, pourrait être fortement touché, sachant qu'en 2015, 44 % des 11 000 tonnes de poissons débarquées sur ses quais provenaient des eaux britanniques. La remise en cause potentielle de tels volumes aura nécessairement un impact sur l'emploi, aussi bien en mer qu'à terre. La plus grande attention doit être accordée au volet « pêche » dans la négociation qui va s'engager avec le Royaume-Uni. Pour éviter des décisions dommageables à l'ensemble de la filière, les sujets de pêche ne devront pas être négociés isolément, d'autres devront probablement être mis en balance. Des discussions sur ce point sont-elles en cours à Bruxelles ? Si tel est le cas, quelle en est la teneur ?

J'en termine avec un sujet qui me tient particulièrement à coeur : le financement de la société nationale de sauvetage en mer (SNSM). En tant qu'élu du littoral, j'insiste sur l'immense chance qu'a l'État de pouvoir compter sur une association de bénévoles aussi performante, compétente et engagée que la SNSM pour l'accomplissement de la mission pourtant hautement régalienne qu'est la sauvegarde de la vie humaine en mer. J'ai le plaisir de côtoyer fréquemment les sauveteurs en mer et je connais leur grande valeur. Nous devons avoir conscience de la fragilité de ce modèle fondé sur le bénévolat, et, paradoxalement, de la force que cet engagement implique. L'État bénéficie largement de l'existence d'une organisation dont le transfert au secteur public a été évalué, a minima, à une centaine de millions d'euros. Pourtant, la SNSM est actuellement confrontée à une réelle difficulté de financement de ses futurs investissements. En comparaison, les ressources de la Royal National Lifeboat Institution (RNLI) sont presque dix fois supérieures à celles de la SNSM.

La SNSM doit pouvoir disposer des moyens nécessaires à la réalisation du plan de modernisation de ses moyens hauturiers, et à la charge croissante que représente sa mission de formation. Le rapport que notre collègue Chantal Guittet a remis au Premier ministre, au mois de juillet dernier, sur la pérennisation du modèle de la Société nationale de sauvetage en mer, suggère une augmentation de la contribution de l'État à hauteur de 25 % du budget de fonctionnement de la SNSM, soit un peu plus de 7 millions d'euros annuels. Nous en sommes loin ! Ce rapport présente également de nombreuses pistes pour un financement sur le long terme, la plupart visant à augmenter la contribution des plaisanciers, premiers bénéficiaires des actions de la SNSM. Sachant que des discussions sont en cours avec les acteurs concernés, je n'ai pas déposé d'amendement sur la délicate question de la pérennisation du modèle de la SNSM. J'insiste néanmoins pour que l'accent soit mis sur la recherche de fonds et regrette qu'aucune mesure n'ait été présentée dans le cadre de ce projet de budget, hormis l'inscription de la subvention supplémentaire d'investissement que l'État a accordée en 2015 et 2016 à la SNSM, portant à 3,7 millions d'euros la dotation accordée sur le programme 205. Les parlementaires doivent être davantage associés au processus décisionnel.

Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous indiquer les principales pistes actuellement à l'étude et nous dire où en sont les réflexions sur ce sujet ? Je sais que vous comptez sur le prochain comité interministériel de la mer (CIMer), prévu le 4 novembre prochain à Marseille, pour effectuer des annonces à ce propos. J'espère que ce CIMer ne décevra pas les attentes et qu'il sera l'occasion d'effectuer les choix politiques urgents qu'il convient désormais de ne plus reporter.

J'émets un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 205.

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