« Toutes les grandes personnes ont d'abord été des enfants, mais peu d'entre elles s'en souviennent », écrivait Saint-Exupéry dans la dédicace du Petit Prince. Nous ne dirons jamais assez que tous les efforts que nous faisons en faveur de l'enfance et la jeunesse sont des paris gagnés sur l'avenir.
Nous pouvons affirmer aujourd'hui avec force que le budget de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) est redevenu prioritaire sous cette législature : dès 2013, la nouvelle majorité a mis un terme à la diminution des moyens consacrés à la PJJ, malgré un contexte tendu et le légitime souci de redresser nos finances publiques. La politique de baisse drastique des moyens mise en oeuvre antérieurement avait porté un coup préjudiciable et, parfois, fatal à la vitalité du secteur associatif, qui assume une part très importante des missions dévolues à la PJJ, notamment en matière de diversification des modes de prise en charge des mineurs.
Ainsi, au total, entre 2012 et 2017, le budget consacré à la PJJ aura connu une augmentation notable, passant de 785 millions d'euros dans la loi de finances pour 2013 à 835 millions dans le PLF pour 2017, soit une hausse de 6,3 % au cours des cinq dernières années, ce qui est considérable. Le budget pour 2017, qui bénéficie du renforcement des moyens de lutte contre la radicalisation, est de nouveau en progression, de 5 % en autorisations d'engagement et de 4 % en crédits de paiement. Cette augmentation bénéficie à plusieurs actions, surtout à l'action 1 « Mise en oeuvre des décisions judiciaires », qui concentre 85 % des crédits du programme, mais aussi à l'action « Formation ». Les crédits de l'action 1 augmentent de 5,2 % par rapport à 2016 et de près de 3 % hors masse salariale. Rappelons que la question des délais est très importante s'agissant du traitement des mineurs.
Grâce à l'effort entrepris depuis 2012, le plafond d'emplois de la PJJ retrouvera et, même, dépassera en 2017 son niveau de 2008. Trente psychologues seront affectés dans les zones où apparaissent des risques de radicalisation. Cent quinze nouveaux éducateurs seront mobilisés, en plus de ceux qui ont déjà été recrutés en vertu des deux plans de lutte contre la radicalisation et le terrorisme. Ce budget donne donc à la direction de la PJJ les moyens de développer des actions à la fois pour prévenir la radicalisation des mineurs et pour prendre en charge des mineurs déjà radicalisés.
Une mission nationale de veille et d'information sur les phénomènes de radicalisation a été mise en place au sein de la direction de la PJJ dès le 1er avril 2015 et, l'an dernier, nous avons voté la création d'un réseau de 69 référents « laïcité et citoyenneté » afin d'aider l'ensemble des professionnels de la PJJ, qui nous avaient appelés au secours. Les nouveaux moyens accordés dans le cadre du PLF pour 2017 se traduisent par l'affectation de 145 nouveaux emplois au renforcement des équipes d'éducateurs, de psychologues et d'assistants des services sociaux.
Je note avec beaucoup d'intérêt que la direction de la PJJ s'est fixé l'objectif de former l'ensemble des professionnels, tant du secteur public que du secteur associatif, à la connaissance du phénomène de radicalisation, afin qu'ils en appréhendent mieux les mécanismes, qu'ils puissent le prévenir et qu'ils disposent d'outils efficaces pour intervenir. Celles et ceux d'entre nous qui ont visité récemment les services de la PJJ ont pu apprécier à quel point cet effort était important, d'autant que les personnels sont démunis par rapport à ce nouveau phénomène. En septembre 2016, 6 000 des 9 000 agents qui relèvent de la PJJ avaient déjà été formés.
Dans l'esprit de la note d'orientation du 30 septembre 2014 de Mme Catherine Sultan, directrice de la PJJ, dont les axes clés sont l'individualisation de la prise en charge ainsi que la cohérence et la continuité du parcours éducatif, je me suis intéressée plus particulièrement à la diversification des modes de prise en charge des mineurs relevant de la PJJ, en mettant plus particulièrement en avant les « séjours de rupture » ou « de transition », que propose aujourd'hui un secteur associatif dynamique, imaginatif et très volontariste. Ces séjours sont destinés à remobiliser le mineur autour de valeurs positives, propices à sa réinsertion, et de projets constructifs. Ils permettent l'apprentissage du « vivre-ensemble ». Ils sont fondés sur un programme de prise en charge globale et pluridisciplinaire. Ce dispositif, qui a été très critiqué, est désormais très encadré sur les plans juridique, éducatif et sanitaire.
Selon moi, il mériterait d'être développé, à trois conditions : que l'on procède à son évaluation, par exemple au moyen d'une mission d'information parlementaire ; que l'on encourage les séjours de ce type dans le cadre pénal ; que l'on accroisse les possibilités d'accueil. Je fais même un lien direct entre les efforts du ministère en matière de déradicalisation des mineurs et ces séjours de rupture, qui permettent un travail de déconstruction et de reconstruction : ce dispositif ne pourrait-il pas, monsieur le garde des sceaux, être étudié, évalué et adapté afin d'agir efficacement et durablement contre la radicalisation ?
Enfin, au fil des années, je continue à m'interroger sur la place que l'on doit accorder ou non aux centres éducatifs fermés (CEF) dans la chaîne du traitement de la délinquance – secteur public, secteur associatif habilité. Serait-il possible d'en faire un bilan objectif, qui fasse la part des choses entre les chiffres dont nous disposons, les critiques qui sont formulées et les résultats qui ont été obtenus ?