Intervention de Vincent Ledoux

Réunion du 27 octobre 2016 à 21h00
Commission élargie : finances - affaires économiques - affaires culturelles - développement durable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVincent Ledoux, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, pour la recherche :

Le dernier budget de la recherche de cette législature offre, comme Janus, un double visage. On aimerait pouvoir n'en retenir que la face riante ; seulement, comme le montre le Prince Sou-Chong quand il chante tristement le fameux air Toujours sourire, c'est à la retenue qu'invite ce budget que je commenterai sans vous infliger une interprétation hasardeuse de l'opérette Le Pays du sourire. À première vue, le budget consacré à la recherche paraît être en hausse : les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » croissent de 3,1 % et, en son sein, les crédits de la recherche augmentent de 3,2 % en autorisations d'engagement et de 2,1 % en crédits de paiement par rapport à la loi de finances pour 2016.

Ayant choisi la recherche médicale pour la partie thématique de mon avis, je peux sourire à la vue des crédits alloués à la recherche universitaire. Mais mon sourire perd un peu de son éclat à la lecture du programme 192, qui montre que les crédits affectés aux pôles de compétitivité diminuent. Dans la région Hauts-de-France, nous nous interrogeons sur le portage et l'avenir de nos six pôles majoritairement financés par l'État, les entreprises et les collectivités locales. Créés en 2004 dans le cadre de la nouvelle politique industrielle, ces pôles ont fait la preuve de leur efficacité pour l'innovation et le soutien de la croissance et de l'emploi sur les marchés porteurs. Je serai heureux de vous entendre préciser quel sera le devenir de ce dispositif majeur qui a permis de renforcer le lien entre recherche et industrie – même si l'on ne peut s'exonérer d'une évaluation complète.

De même, la stabilité affichée pour certains programmes masque la persistance de la contrainte budgétaire imposée aux organismes considérés. Je pense notamment à IPF Énergies nouvelles et à la recherche duale, dont les crédits reconduits à l'euro près traduisent en réalité la perpétuation d'une diminution de 12 millions d'euros portée par le CNES et le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Pour la recherche duale comme pour les pôles de compétitivité, tout un réseau de PME risque de subir les conséquences de la baisse de l'effort de l'État. Une fois encore, c'est un coup porté à une politique mise en oeuvre en 2005, qui visait, je le rappelle, à optimiser la recherche technologique militaire de la défense.

Ce budget n'est donc pas satisfaisant. Plus encore, l'exécution budgétaire de l'année passée laisse craindre une augmentation de façade rapidement compensée, en cours d'exercice, par des ponctions opérées sur les crédits des organismes de recherche. Je rappelle en effet que le Gouvernement avait tenté, en juin dernier, de soustraire 256 millions d'euros au budget de la recherche, ce qui avait d'ailleurs soulevé un tollé dans le monde scientifique et avait conduit à ce que la commission des finances donne un avis défavorable sur ce point au décret d'avance qui lui avait été présenté.

Je crains également que ces augmentations ne soient pas tout à fait financées pour l'avenir. Je pense notamment à l'augmentation des crédits de l'Agence nationale de la recherche qui, au sein du programme 172, voit ses crédits augmenter de 118 millions d'euros en autorisations d'engagement, mais de seulement 49 millions d'euros en crédits de paiement. Je m'interroge sur l'existence d'un tel écart entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement, qui n'était pas aussi important au cours des exercices passés. On constate ainsi cette année un écart de 64 millions d'euros, contre quelques millions les autres années. Est-il justifié par l'éventuelle pluri-annualité des décaissements de l'ANR ?

Bien que ce budget augmente cette année, il n'efface ni les trois précédents exercices budgétaires, qui ont fait peser d'importantes contraintes sur les organismes de recherche – dont les dépenses, notamment de personnel, augmentent pourtant tendanciellement –, ni les craintes que j'ai exprimées quant à l'exécution future de ces crédits. Aussi, je donnerai un avis défavorable lors du vote des crédits de la mission.

Je souhaiterais enfin m'arrêter un instant sur le budget de la recherche médicale, en particulier sur la maladie d'Alzheimer. Un plan « maladies neurodégénératives » a été récemment engagé, qui prend la suite du troisième plan Alzheimer jusqu'en 2019. Je n'ai toutefois pas eu connaissance de financements supplémentaires accordés à la recherche par ce biais : pourriez-vous nous indiquer si de tels financements sont actuellement engagés ou à l'étude ? Sans cela, il me semble que ce plan ne serait pas à la hauteur des plans précédents, notamment celui lancé par le Président Sarkozy en 2008, qui ont permis à la recherche de faire des progrès considérables et à la France d'être un pays leader dans ce domaine, et non plus le pays du sourire qu'il semble être aujourd'hui devenu !

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