Intervention de Daniel Boisserie

Réunion du 28 octobre 2016 à 9h30
Commission élargie : finances - lois constitutionnelles - défense nationale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Boisserie, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour la gendarmerie nationale :

Je ne dirai que quelques mots du budget prévu pour 2017, pour me concentrer sur mes questions et remarques.

Il s'agit d'un bon budget, avec des crédits de paiement en augmentation de 3,5 %. Il s'agit surtout d'un budget nécessaire et mérité, compte tenu de l'intensité opérationnelle et de l'engagement que les pouvoirs publics et les Français exigent de nos gendarmes.

Ma première question, monsieur le ministre, porte sur la fin de gestion 2016. Je crois savoir que 100 millions d'euros environ sont encore gelés. Au regard du contexte sécuritaire et de la mobilisation sans faille qui est demandée aux forces de l'ordre, je pense qu'il faudrait dispenser du gel l'ensemble des programmes qui participent à la sécurité des Français. Ils disposeraient alors de l'ensemble de leurs ressources dès le début de l'année, ce qui me semble la moindre des choses. Y êtes-vous favorable ?

À plus long terme, je m'interroge sérieusement sur une modification de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Il faut permettre au Gouvernement d'appliquer des taux de mise en réserve différents, en fonction des contraintes pesant sur les différentes administrations, mais aussi, et surtout, en fonction des priorités décidées par le politique. Je suis sûr que l'ancien ministre chargé du budget sera sensible à une telle suggestion...

Ma deuxième question concerne la directive européenne sur le temps de travail, dont la transposition aux forces de l'ordre et aux forces armées constitue un sujet de préoccupation majeur.

Ses dispositions relatives aux périodes minimales de repos sont totalement incompatibles avec l'exigence de disponibilité inhérente au statut militaire et avec la réalité opérationnelle. Est ainsi prévu un repos quotidien de onze heures toutes les vingt-quatre heures. Autre exemple, la durée maximale hebdomadaire de travail ne doit pas excéder quarante-huit heures, heures supplémentaires comprises.

Je comprends l'objectif de protection minimale qu'il s'agit de garantir à l'ensemble des travailleurs européens. Je ne veux évidemment pas nier tout droit social aux acteurs de la sécurité publique et de la défense. Mais concrètement, de telles dispositions sont inapplicables dans ces deux domaines. Les opérationnels sont d'ailleurs les premiers à le souligner.

Une exemption de principe avait été prévue pour les forces de sécurité et les forces armées. Mais, en 2006, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) lui a pratiquement ôté toute portée en interprétant les textes de manière trop restrictive. La transposition pourrait avoir un impact de l'ordre de 3 % à 5 % des effectifs totaux de la gendarmerie, sans compter les difficultés en termes d'organisation du travail.

Ma suggestion est la suivante : les États membres ne pourraient-ils pas s'accorder entre eux et avec la Commission européenne pour suspendre le processus de transposition ? Je rappelle que la saisine de la Cour de justice pour manquement n'est qu'une possibilité, pas une obligation. Les États pourraient ensuite renégocier certaines dispositions du texte, cette fois, de manière suffisamment précise. Cela éviterait qu'une interprétation de la Cour de justice vienne fragiliser un régime spécifique qu'il est indispensable de maintenir pour les forces de l'ordre et les forces armées.

Le contexte sécuritaire global auquel font face l'ensemble des pays européens, et notamment la France, plaide en ce sens. Notre pays pourrait prendre la responsabilité d'une telle initiative. Cette fois, c'est peut-être l'ancien ministre chargé des affaires européennes qui sera sensible à cette suggestion !

Je ferai au passage deux courtes observations, très pratiques, sur lesquelles je souhaiterais avoir votre sentiment. Il me semble que les zones de compétence des forces de l'ordre doivent dépasser les limites administratives et s'adapter à la réalité des bassins de vie, et donc, de délinquance. Je pense notamment aux pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (PSIG) en zone rurale. Cela nécessiterait une coordination avec la Chancellerie pour adapter la compétence territoriale des tribunaux. Une telle souplesse opérationnelle me paraît indispensable et urgente.

Pour finir, un mot sur les polices municipales. Elles montent en puissance et sont sans doute amenées à jouer un rôle plus important à l'avenir. Il faudrait approfondir leurs relations avec la gendarmerie nationale, notamment au niveau de la formation. Certaines initiatives existent, mais je pense qu'il faudrait développer les protocoles d'accord entre la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) et le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT). La gendarmerie pourrait alors assurer tout ou partie de la formation des effectifs de police municipale travaillant en zone rurale.

Enfin, je veux saluer les derniers engagements du Gouvernement, qui sont dans le prolongement et l'amplification d'une politique résolue pour la sécurité de nos concitoyens.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion