Intervention de Pierre Morel-A-L'Huissier

Réunion du 28 octobre 2016 à 9h30
Commission élargie : finances - lois constitutionnelles - défense nationale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Morel-A-L'Huissier, rapporteur pour avis de la commission des lois pour la sécurité civile :

Le programme « Sécurité civile » nous permet, cette année encore, de rendre hommage aux sapeurs-pompiers, qui risquent leur vie au service de la communauté et font preuve, au quotidien, d'un dévouement, d'un altruisme et d'un courage éminemment admirables. En 2015, les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) ont réalisé près de 4,5 millions d'interventions et traité près de 4 400 départs de feux.

Les crédits du programme « Sécurité civile » sont en hausse de près de 7,9 % dans le projet de loi, s'établissant à 476 millions d'euros. Toutefois, en excluant les nouvelles dépenses liées à la mise en oeuvre du pacte de sécurité, ces crédits sont, en réalité, en baisse de 1,3 %.

Le modèle français de sécurité civile repose sur le volontariat et le maillage territorial de ses centres d'incendie et de secours. Mais ces deux piliers paraissent aujourd'hui s'éroder considérablement. Force est de constater que de nombreux centres d'incendie et de secours ont fermé au cours de la dernière décennie : 121 centres ont encore disparu au cours de l'année 2015. Entre 2002 et 2015, ce sont 1 700 centres qui ont fermé.

Aucune modification du maillage territorial de ces centres ne devrait être décidée brutalement, sur la seule base des économies budgétaires qu'elle est supposée dégager. Il est ici question de garantir à tous, et notamment aux populations rurales, un service de proximité pour les soins urgents. Je propose que soit obligatoirement recueilli l'avis de la Conférence nationale des services d'incendie et de secours (CNIS) avant une fermeture décidée conjointement par le préfet et le président du conseil départemental.

Force est de constater également que les effectifs de sapeurs-pompiers volontaires ont fortement diminué au cours de la dernière décennie et qu'ils ont stagné en 2015, malgré toutes les actions entreprises – je rappelle la loi de 2011, dont j'ai été l'initiateur –, dans le cadre de l'Engagement national pour le volontariat, que j'ai moi-même signé au nom de l'Association des maires de France (AMF).

L'objectif de 200 000 sapeurs-pompiers volontaires en 2017, annoncé par le Président de la République, est aujourd'hui inatteignable. Est-il nécessaire de rappeler que les sapeurs-pompiers volontaires représentent plus de 80 % des effectifs de sapeurs-pompiers français, qu'ils réalisent près de 70 % des interventions, mais qu'ils représentent seulement 15 % de la masse salariale ?

Quelles mesures prendrez-vous, monsieur le ministre, pour permettre une meilleure reconnaissance matérielle des pompiers volontaires, au-delà de la réforme du financement de la prestation de fidélisation et de reconnaissance (PFR) et de la simplification de la procédure de revalorisation annuelle de l'indemnité horaire ?

Par ailleurs, de nombreux volontaires éprouvent des difficultés à concilier leur mission avec les impératifs de leur vie professionnelle. Ces contraintes sont souvent mises en avant pour expliquer le non-renouvellement d'un engagement. De plus, les employeurs considèrent trop souvent encore les pompiers volontaires comme une charge financière.

Quelles mesures incitatives entendez-vous prendre, monsieur le ministre, en faveur des employeurs, notamment lorsqu'il s'agit de petites communes, de petites entreprises ou d'artisans ? La loi relative au mécénat n'est pas suffisante. Elle est complexe, et Bercy est incapable de dire quels sont les crédits d'impôt dégagés au niveau des employeurs pour les aider à laisser partir des jeunes en mission.

En outre, les dépenses d'investissement des SDIS ont régulièrement diminué au cours des dernières années. C'est notamment le cas en Lozère, où le département refuse de financer le remplacement urgent de véhicules vétustes. La faiblesse des investissements dans les équipements menace l'efficacité des secours et met en danger la vie des citoyens et celle des pompiers.

Si j'en crois ce qu'il s'est passé dans l'Hérault, on s'interroge aujourd'hui sur la vétusté des camions. Le décès d'un homme et les trois blessés graves interpellent fortement sur le renouvellement des flottes.

La loi de départementalisation a vingt ans : il devient indispensable de financer le renouvellement des équipements des SDIS.

Sur les 30 millions d'euros économisés grâce à la réforme de la PFR, 20 millions serviront au financement de nouveaux investissements des SDIS. Ces 20 millions seront consacrés à de grands projets structurants, notamment au système national de gestion opérationnelle, qui paraît prioritaire et qui est mené par le préfet Lambert. Mais rien n'est prévu, s'agissant des investissements dans des équipements de proximité, comme le renouvellement des véhicules de sapeurs-pompiers.

Les 10 millions d'euros restants pourront-ils être réaffectés au titre du Fonds d'aide à l'investissement (FAI), afin de permettre le renouvellement de l'équipement des centres d'incendie et de secours ?

Par ailleurs, l'utilisation de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) pour le renouvellement des véhicules vous paraît-elle envisageable dans les zones rurales ? J'en ai fait la demande expresse au préfet de mon département, mais, pour l'instant, je n'ai pas de réponse. Je souhaiterais avoir la position du ministre sur ce sujet.

Plus généralement, s'agissant du financement des services départementaux d'incendie et de secours, envisagez-vous, monsieur le ministre, de leur verser directement, et non plus par l'intermédiaire des départements, la contribution de l'État issue de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA), afin que l'intégralité de cette dotation leur revienne ?

J'en arrive à la concurrence entre les flottes héliportées des établissements de santé et de la sécurité civile. Quelles mesures allez-vous prendre, monsieur le ministre, pour mieux encadrer et coordonner les implantations et les activités des hélicoptères de la sécurité civile et des établissements de santé ? Là aussi, cela pose problème. Le ministère des affaires sociales et de la santé a interrogé les agences régionales de santé (ARS), lesquelles interrogent à leur tour les établissements de santé. Un peu de coordination serait nécessaire.

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