Si la politique de la précédente majorité a consisté à créer 13 000 emplois dans un premier quinquennat pour les supprimer dans un second, il faudra m'en expliquer la cohérence et l'intérêt !
Pour notre part, nous en créons 9 000, et notre objectif est de continuer d'en créer, sans jamais en supprimer, car nous considérons que l'état du pays, les formes de violence auxquelles nous sommes confrontés, et la lutte contre le terrorisme le justifie.
Vos questions portaient sur les charges indues qui incombent aux services. Les tâches concernées sont de plusieurs types.
Les gardes statiques ont vocation à sécuriser les locaux de certaines organisations et institutions. Nous voulons leur substituer des gardes dynamiques. Ces dernières sont d'abord beaucoup plus efficaces dans la lutte contre le terrorisme et en termes de protection policière, car le terroriste peut craindre à chaque instant de tomber sur une patrouille, alors qu'il sait où sont postées les gardes fixes. Elles permettent ensuite de dégager 220 équivalents temps plein afin de renforcer le dispositif de présence sur le terrain. J'ai d'ores et déjà donné des instructions pour que, devant certains édifices publics comme les préfectures, la substitution entre garde statique et garde dynamique s'effectue dès la semaine prochaine.
Aujourd'hui, les forces de sécurité sont aussi dans l'obligation d'assurer le transfèrement vers les hôpitaux des gardés à vue en cas d'ivresse manifeste. J'ai dégagé un crédit qui permettra de passer une convention avec la médecine de ville et avec SOS Médecins afin que les médecins se déplacent dans les commissariats. Je souhaite que ce dispositif conventionnel se mette en place dans les meilleurs délais. J'ai donné hier des consignes aux préfets et aux directeurs départementaux de la sécurité publique (DDSP) pour qu'ils prennent contact avec la médecine de ville dès le début de la semaine prochaine afin que nous puissions dégager des ressources rapidement.
Par ailleurs, chaque semaine, en France, on compte quelque 300 hospitalisations de détenus. Chacune d'entre elles mobilise deux policiers. Sur ce point, l'évolution ne peut pas être aussi rapide que sur les deux précédents, mais un travail de plus long terme doit être mené avec le ministère de la santé pour que les dispositifs de soins dans les locaux des hôpitaux soient moins mobilisateurs de forces de l'ordre. Nous pourrons progresser sur ce sujet en 2017.
Concernant les transfèrements, un dispositif conventionnel a été mis en place avec le ministère de la justice. Il porte sur un total de 1 200 équivalents temps plein, et traite du cadencement du transfert et de la capacité du ministère de la justice à ne plus faire appel à celui de l'intérieur. Une inspection générale commune aux deux ministères a été commandée sur le sujet. Le garde des sceaux a réaffirmé, devant les organisations syndicales de la police et devant l'instance de dialogue de la gendarmerie, que nous étions favorables à l'accélération de la mise en oeuvre de l'accord passé entre nos deux ministères sur ce sujet.
Un accord existe également concernant le nouveau palais de justice de Paris. On sait que trois cent soixante policiers et gendarmes seront mobilisés pour assurer sa sécurité, alors que l'ancien palais conservera une partie importante de son activité – celle des assises sera même amenée à augmenter. Cela nécessitera le maintien des deux tiers des effectifs chargés de la surveillance du site de l'île de la Cité. J'ai demandé un audit à l'Inspection générale de l'administration (IGA) sur le transfert du Palais de justice : je considère que le volume d'effectifs nécessaire pour assurer la sécurité des deux palais n'est pas supportable par le ministère de l'intérieur, compte tenu de ma préoccupation relative aux charges indues. J'ai en conséquence demandé un complément d'étude à l'IGA sur les conditions dans lesquelles nous pourrions avoir recours à de la sécurité privée de manière à maintenir la disponibilité des effectifs de police à Paris pour des missions qui relèvent de nos priorités, comme la lutte contre le terrorisme.
Madame Descamps-Crosnier, nous avions mis en place en avril 2014, avec la garde des sceaux de l'époque, un dispositif de lutte contre la radicalisation. Depuis cette date, la plateforme de signalement, adossée à une plateforme téléphonique gérée par l'unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT), qui se trouve au ministère de l'intérieur, a enregistré 5 600 signalements. Le nombre de signalements effectués par ailleurs par les services de renseignement intérieur ou par le renseignement territorial à partir des enquêtes qu'il diligente sur les territoires est légèrement supérieur. Au total, nous avons donc « en portefeuille » un peu plus de 10 000 cas de personnes radicalisées.
Le dispositif en place consiste, dès le signalement, à transmettre les identités des personnes concernées au procureur de la République et au préfet du département de résidence des individus radicalisées. Un comité se réunit autour du préfet et du procureur de la République mobilisant l'ensemble des acteurs ministériels et locaux en vue d'engager des actions de déradicalisation. Jusqu'à présent, elles ont été mises en oeuvre pour 2 000 personnes.
Nous avons décidé de mettre en place des équipes mobiles qui se déplaceront sur le territoire pour assurer la formation des agents des collectivités ou des associations qui oeuvrent à la déradicalisation, ce qui augmentera le nombre de dossiers traités. Dans le cadre des prochains contrats de ville, nous avons aussi souhaité qu'un volet « déradicalisation » permette de financer l'action des associations ou des acteurs de santé mentale qui peuvent accompagner l'État dans le plan d'action contre la radicalisation et le terrorisme, présenté par le Premier ministre au mois de mai dernier.
Madame la députée, des dispositions relatives à l'expérimentation de l'usage des « caméras piétons » ont été adoptées dans la loi du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale. Nous avons saisi la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) ainsi que le Conseil d'État du décret en préparation sur ce sujet. J'ai rencontré hier le nouveau président de la section de l'intérieur du Conseil d'État de manière à ce que nous ne perdions pas de temps dans l'avancement de ce dossier.
Vous m'interrogez enfin sur les données dont nous disposons dans la lutte contre l'économie souterraine dans les zones de sécurité prioritaire (ZSP). Nous mobilisons dans ce combat l'ensemble des services de chaque direction départementale de la sécurité publique (DDSP), comme les comités opérationnels départementaux anti-fraude (CODAF). En 2015, les services ont été très sollicités pour lutter contre les trafics de stupéfiants, avec des résultats très positifs puisque 1 516 interpellations ont eu lieu cette année-là, au lieu de 1 400 en 2014. Les saisies de drogue, en particulier de cocaïne, ont fortement augmenté, ainsi que celles d'avoirs criminels, en hausse de 16,67 %. Les premières remontées relatives à l'année 2016 prouvent que l'effort se poursuit, et qu'il s'inscrit dans la durée avec des résultats toujours très positifs. La lutte contre la délinquance dans les quartiers doit reposer sur la coopération très étroite entre l'ensemble des services du ministère de l'intérieur, notamment la police judiciaire, la sécurité publique, et le renseignement. Nous tentons aussi de faire en sorte que les délégués à la cohésion police-population, qui sont répartis dans les ZSP, soient bien présents. La communication entre la police et la population constitue un élément essentiel de la lutte contre ces trafics et contre l'économie souterraine qui en résulte.
Monsieur Morel-à-l'Huissier, la réponse que j'ai apporté à votre question relative à la DETR vous déçoit, mais elle est conforme à ce que prévoient les textes. Malgré mon immense désir de vous être agréable, je ne peux pas vous dire que je ferai ce que les textes m'interdisent. Je ne peux pas vous donner satisfaction sans les modifier, ce qui serait très lourd pour atteindre un objectif qui peut l'être autrement. Le financement pourrait, par exemple, provenir des 20 millions d'euros de la PFR. Les textes ne me permettent pas de vous faire une autre réponse que celle-là.
Je vous ai indiqué les mesures que nous avons prises pour parvenir à un effectif total de 200 000 sapeurs-pompiers volontaires. Il faut que nous continuions à travailler sur les divers viviers de recrutement. Nous devons notamment progresser du côté des femmes qui ne représentent aujourd'hui que 17 % des sapeurs-pompiers volontaires. Des outils, comme les cadets de la République, doivent aussi permettre de faire en sorte qu'à terme, le nombre de sapeurs-pompiers volontaires soit plus élevé. Nous y travaillons, et les campagnes de communication apportent aussi une aide en la matière.
Vous m'avez interrogé, ainsi que Mme Dalloz, sur la dotation d'investissement aux services départementaux d'incendie et de secours, d'un montant de 20 millions d'euros. Ces fonds sont destinés à des projets structurants d'équipement qui permettront aux SDIS, confrontés à des risques majeurs, de renouveler leurs matériels. L'État prendra sa part dans le débat qui aura lieu à ce sujet, car il souhaite que ces 20 millions ne fassent pas l'objet d'un saupoudrage, mais qu'ils aillent bien au renouvellement d'équipements dont les SDIS ont besoin pour remplir au mieux leur mission de sécurité publique. Parce que les départements rencontrent des problèmes financiers, il est essentiel que nous parvenions à flécher les sommes que nous mobilisons pour les aider à remplir leurs missions, afin qu'elles soient utilisées dans des conditions optimales.
Monsieur Goasdoué, dans le cadre de la mise en oeuvre du « pacte de sécurité », le bureau de déminage voit ses effectifs augmenter de 36 personnes sur deux ans, soit 30 démineurs et six renforts administratifs. Les recrutements prévus pour 2016 ont été effectués. Des crédits sont aussi mis à la disposition des services de déminage pour la sécurisation de leurs propres sites. Nous sécurisons également le système d'information opérationnel destiné à assurer l'intégrité des communications des démineurs. J'ai par ailleurs demandé une réorganisation des implantations des centres de déminage. Cette décision qui a parfois fait l'objet de débats, vise à ce que l'octroi d'effectifs supplémentaires s'accompagne d'une organisation du service permettant une intervention plus efficace, compte tenu du nombre de sollicitations.
Monsieur Lebreton, vous m'interrogez sur la mutualisation de la maintenance des hélicoptères de la gendarmerie nationale, de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC), et du ministère de la santé. Nous avons pris des dispositions avec la ministre des affaires sociales et de la santé visant à réarticuler l'intervention de ceux que l'on appelle les « rouges » et les « blancs », afin d'éviter les conflits entre intervenants. Je suis convaincu que des progrès considérables peuvent encore être accomplis. La mutualisation de la gestion des flottes d'hélicoptères constitue une source d'économies significative alors que l'éparpillement des centres de maintenance est une perte en termes d'efficience.
En matière de secours en montagne, je tiens également à ce qu'une bonne coordination soit assurée afin que les acteurs de la sécurité civile, notamment les sapeurs-pompiers, ne soient pas éloignés des secours en montagne là où se trouvent des forces de sécurité intérieure. Une articulation efficace doit permettre que personne ne soit écarté.
Monsieur Aboubacar, nous avons engagé, comme vous l'avez rappelé, une action très volontariste à Mayotte. Vous avez appelé de façon extrêmement forte l'attention du Gouvernement à plusieurs reprises sur la nécessité d'une hausse des moyens dont dispose l'archipel. Nous vous avons entendu, et, dans le cadre de l'élaboration d'un dispositif de sécurité global concernant Mayotte et associant les collectivités territoriales, de nouveaux effectifs viendront rejoindre ceux ont déjà été renforcés. Entre juin et septembre 2016, 76 policiers et 26 adjoints de sécurité sont arrivés à Mayotte. Cela aboutira, au sein de la DDSP, à la création d'un groupe de sécurité de proximité, et la compagnie départementale d'intervention recevra le renfort de cinq policiers. Une brigade canine sera également créée en 2017, et une étude technique relative à la construction d'un nouvel hôtel de police à Mamoudzou sera lancée. Je tiens beaucoup à ce projet, et j'aimerais que les fondements en soient posés avant la fin du quinquennat.
En termes d'effectifs, les engagements que j'avais pris ont été tenus, et même dépassés. J'avais annoncé 102 arrivées ; on en compte 106. Ces efforts seront poursuivis afin que la totalité du plan que j'ai présenté avec la ministre des outre-mer, qui s'est rendue à Mayotte le mois dernier pour confirmer ces engagements, soit scrupuleusement appliquée. Je n'exclus pas de me rendre moi-même de nouveau à Mayotte, avant la fin de la législature, non seulement pour examiner les conditions dans lesquelles ces engagements sont tenus, mais aussi pour constater comment nous avons modernisé l'administration et les moyens de la politique d'accueil et de traitement des étrangers sur ce territoire.