La discussion engagée par Daniel Gibbes est très intéressante : elle renvoie à la fiscalité et à l'article 74 de la Constitution. Cet article pose clairement problème au regard du pacte républicain et de la solidarité nationale – je le dis comme je le pense. Sur le fondement de l'article 74, on considère que dès lors qu'on a demandé l'autonomie, on est tenu d'entrer dans un processus où l'on se finance soi-même, totalement ou partiellement. Je ne partage pas cette interprétation. S'il est possible de tenir ce raisonnement, c'est parce que cet article est bâtard et, je le dis comme je le pense, néocolonial. La solidarité et la péréquation, mais aussi la mise à disposition d'outils statistiques permettant de bien calculer les dotations, relèvent d'une responsabilité que l'État doit assumer, y compris pour les collectivités régies par l'article 74. Lorsqu'on vous octroie le statut prévu par l'article 74 et qu'on vous laisse dans l'embarras, c'est une faute. Lorsqu'on vous laisse vous débrouiller pour l'inventaire foncier et bâti et que vous perdez deux ans pour la perception de la fiscalité, c'est une responsabilité que l'État n'assume pas. Quand vous commencez à vivre et qu'on vous empêche de respirer en vous mettant une pince sur le nez, on vous tue !
C'est en cela que je ne partage pas du tout cette conception de l'autonomie selon l'article 74 : l'État doit assumer un minimum de compétences régaliennes, y compris financièrement. L'autonomie ne veut pas dire la séparation. Même les autonomistes comme moi, qui sont pour l'égalité et la prise en compte de la différence – non pas au sens communautaire, mais la différence dans les politiques de développement – ne s'y retrouvent pas. On le voit avec la Polynésie : les Polynésiens qui sont extrêmement fiers de leur pays sont obligés de se tenir la main pour obtenir un financement pour un hôpital. Cela devient ridicule. L'article 74 mérite une clarification. Tout le monde se reporte sur l'article 73 qui est un processus hyper-assimilant et un peu aliénant – je ne parle pas seulement d'assimilation culturelle, mais aussi économique. Une des premières émancipations que nos territoires doivent obtenir, c'est l'émancipation économique. Certains n'aiment pas qu'on emploie cette expression : dès qu'un élu de droite à Saint-Martin, ou à la Martinique comme M. Monplaisir, entend parler d'émancipation économique, il commence à courir partout. Mais cela n'a rien à voir avec l'indépendance. L'émancipation économique, c'est le développement local, l'ingénierie locale, la construction d'un nouveau modèle. Je partage le point de vue de Daniel Gibbes. Il faudrait peut-être ouvrir ce débat.
Madame Pires Beaune, vous avez dit quelque chose qui m'a semblé tout à la fois audacieux et inquiétant : les EPCI aujourd'hui bénéficient d'une DGF qui transite par la commune.