Madame la ministre, j'accueille, comme sans doute l'ensemble des parlementaires réunis ce soir, votre budget 2017 pour les outre-mer avec un certain soulagement, mais aussi avec des interrogations.
Sur le plan strictement comptable, votre budget progresse très légèrement par rapport à la loi de finances 2016, grappillant quelque 16 millions d'euros supplémentaires – plus 2,8 % en autorisations d'engagement, plus 0,7 % en crédits de paiement. D'où mon soulagement : en très légère augmentation par rapport à l'an dernier, ce budget préservé montre qu'en cette période budgétaire extrêmement contrainte, le Gouvernement a toutefois conscience des urgences auxquelles restent confrontés nos territoires ultramarins.
Votre budget, madame la ministre, présente plusieurs motifs de réelle satisfaction, sur lesquels j'aurai l'occasion de revenir, mi-novembre, lors des débats en séance publique. Mais il comporte également de vrais points d'achoppement. Nous ignorons comment seront financées les mesures qui seront votées dans le cadre de la loi « Égalité réelle outre-mer ». Nous sommes aussi inquiets de la baisse du budget de l'action 01 « Soutien aux entreprises ». Nous souhaiterions, par exemple, connaître le détail du financement et obtenir une estimation des retombées espérées de la future Cité des Outre-mer, qui n'est pas exposée dans le bleu budgétaire.
Permettez-moi, à présent, d'appeler votre attention, ce soir, sur un point particulier, qui concerne très directement ma circonscription et que mon collègue Aboubacar a évoqué, ce dont je le remercie. Nous avons eu l'occasion d'en discuter à plusieurs reprises, et tout récemment, lors de l'examen du projet de loi relatif à l'égalité réelle outre-mer : il s'agit de l'urgence, pour la collectivité d'outre-mer de Saint-Martin, d'obtenir des statistiques fiables.
Pour rappel, Saint-Martin forme, depuis 2007, une entité distincte de la Guadeloupe. Toutefois, sur le plan statistique, les données concernant l'île font, quand elles existent, l'objet d'amalgames. Elles sont, en effet, soit noyées dans les chiffres de l'archipel de la Guadeloupe dite « continentale », ou par le regroupement des informations concernant les deux collectivités de Saint-Martin et Saint-Barthélémy, sous le vocable historique d'« îles du Nord ». Telle est la règle pour le taux de chômage rendu public par Pôle emploi, par exemple, ou pour les prestations servies par les caisses de Sécurité sociale ou d'allocations familiales.
Il est, en outre, particulièrement difficile de disposer d'une vision globale de la situation économique de Saint-Martin, le système statistique actuel ne permettant pas d'en connaître le produit intérieur brut.
La seule donnée actuellement disponible est une estimation du PIB de l'année 1999, réalisée en 2005 par le partenariat « Comptes économiques rapides de l'outre-mer » (CEROM), réunissant l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM) et l'AFD. Dans ce cadre, le PIB de Saint-Martin avait été évalué à 421 millions d'euros, soit environ 14 500 euros par habitant.
L'État et la collectivité doivent pouvoir disposer d'une connaissance précise du territoire et de sa population. Il s'agit là d'informations indispensables à la détermination et à la mise en oeuvre des politiques publiques, mais également à l'intervention des fonds structurels européens. Organiser la collecte, le traitement différencié et la publication de l'ensemble des données statistiques relatives au territoire de Saint-Martin est, j'en suis conscient, un travail coûteux et de longue haleine.
Dans l'attente de cette nécessaire mise en oeuvre, madame la ministre, à laquelle je sais que vous êtes attentive, pouvez-vous mettre en place, pour Saint-Martin, un nouveau CEROM, dont l'enquête porterait sur le produit intérieur brut par habitant, le taux de chômage, les écarts de revenu par habitant et le seuil de pauvreté, ces indicateurs illustrant objectivement la situation économique et sociale de Saint-Martin ? Quel pourrait être le calendrier de cette enquête ?
Enfin, comme nous l'avons indiqué, avec le rapporteur spécial, s'il existe des motifs de satisfaction concernant ce budget, il n'en demeure pas moins que des zones d'ombre persistent.
Pour ces raisons, madame la ministre, le groupe Les Républicains s'en tiendra à une position d'abstention constructive. Nous regrettons qu'en dépit d'une stabilité comptable, le budget baisse si l'on tient compte des transferts de crédits.