M. le rapporteur spécial Laffineur a appelé notre attention sur l'article 7 du PLFSS qui prévoit de réformer le dispositif d'exonération des cotisations sociales des travailleurs indépendants. Il fixe un plafond de 96 000 euros à partir duquel une dégressivité sera applicable. Nous sommes en train d'étudier un amendement déposé par Philippe Naillet visant à rendre la dégressivité applicable à partir de 1,5 PASS – plafond annuel de la sécurité sociale –, solution à laquelle nous sommes plutôt favorables même si nos réflexions ne sont pas encore stabilisées.
S'agissant des différents dispositifs de crédit d'impôt, il est peut-être un peu tôt pour en évaluer l'efficacité dossier par dossier. Le taux de consommation de la LBU en tout cas a augmenté de dix points par rapport à l'année dernière, ce qui est plutôt une bonne nouvelle. Il faut toutefois poursuivre nos efforts dans plusieurs directions : fluidifier la circulation des informations entre la direction générale des outre-mer (DGOM) et la direction générale des finances publiques (DGFIP), sécuriser les dispositifs de défiscalisation de l'impôt sur les sociétés, mieux articuler l'action de BPIfrance afin d'obtenir des garanties en matière de préfinancement.
Pour l'indemnisation des victimes des essais nucléaires en Polynésie, une analyse du dossier de chaque malade a été menée en fonction des critères fixés par la loi de 2010, qui avait provoqué une insatisfaction parmi les demandeurs. Le Président de la République, lors de son déplacement en Polynésie française en février dernier, a annoncé que le décret d'application de la loi serait modifié. En cours de finalisation, il prévoit un changement du seuil de risque afin de répondre le mieux possible aux demandes des malades.
Des questions ont porté sur le passage à l'euro en Polynésie française, sur lequel l'assemblée de la Polynésie française avait rendu une résolution en 2006. Il faut avoir à l'esprit que l'introduction de l'euro n'est pas seulement du ressort de la France, mais relève d'une décision collective des dix-neuf pays de la zone euro. Par ailleurs, nous estimons que ce basculement vers l'euro n'aurait de sens que si les trois collectivités françaises dans le Pacifique engageaient une démarche globale à ce sujet.
Monsieur Letchimy, comme je l'ai indiqué dans mon propos liminaire, il n'y a pas de coup de rabot : le Gouvernement ne réformera pas en 2017 le dispositif des exonérations de cotisations sociales pour les salariés. Ce sont les effets mécaniques des réformes des années précédentes, notamment le recentrage sur un certain niveau de salaire, qui ont entraîné une diminution de consommation de l'ordre de 60 millions d'euros ; mais cette tendance peut être appelée à s'inverser dans les années qui viennent. Au-delà, nous menons une réflexion globale pour déployer des outils qui ne seraient pas uniquement fiscaux. Nous voulons encourager le retour des jeunes gens qui reçoivent une formation de haut niveau hors de leur territoire d'origine. Nous avons pris des mesures en faveur de ce retour des cerveaux dans la loi pour l'égalité réelle outre-mer – j'ai eu l'occasion d'en rencontrer à la Martinique, qui s'installent dans le secteur privé. Il faut poursuivre cet effort dans le cadre d'un plan jeunesse ou encore de l'« Erasmus océanique » qu'il faut amplifier. C'est cette volonté que nous avons manifestée dans la loi EROM.
Plusieurs interrogations ont porté sur les périmètres. Sur les crédits du programme 123, outil important pour le développement des outre-mer, il faut noter une augmentation, qu'il s'agisse des autorisations d'engagement ou des crédits de paiement.
Le financement de la loi sur l'égalité réelle a suscité plusieurs questions, notamment de M. Gibbes et de Mme Bello. La presse s'interroge beaucoup à ce propos. Je peux vous rassurer : cette loi sera financée. Les mesures sociales seront financées par les comptes sociaux ; les mesures spécifiques seront financées par les crédits dédiés à l'outre-mer – 70 millions au titre de la mobilité, 3 millions pour la jeunesse ; quant aux mesures fiscales, elles seront supportées par le budget de la nation. Je sais qu'un amendement a été déposé en commission des finances pour supprimer la mesure concernant le fonds d'investissement de proximité outre-mer contenue dans la loi sur l'égalité réelle. Mais tant qu'elle existera, cette disposition sera financée par le budget de la nation en tant que mesure fiscale.
Madame Bello, vous avez évoqué la révision du Règlement général d'exemption par catégorie (RGEC), qui constitue un enjeu important. Il y a un mois, je me suis rendue à Madère pour assister au congrès des présidents des régions ultra-périphériques de l'Union européenne. Nous avons pu fédérer l'ensemble des exécutifs autour d'une position très claire : la France continue à réaffirmer son souhait de voir introduit un quatrième critère, l'ensemble des surcoûts admissibles mesurables, qui devrait être selon nous apprécié par secteur et non par entreprise bénéficiaire. Nous continuons à nous battre en gardant cette ligne. Pour l'heure, rien n'est tranché. Très prochainement, j'entamerai une démarche pour être reçue par la commissaire européenne à la concurrence, Mme Vestager. Qui plus est, notre position s'est vue confirmer par la dernière jurisprudence qui concerne Mayotte.
Les SIDOM, madame Bello, constituent une question délicate. Permettez-moi de vous rappeler les considérations à l'origine de notre décision. La première d'entre elles concerne la gouvernance, domaine dans lequel l'État n'était pas particulièrement performant. La Société nationale immobilière (SNI), quant à elle, est un acteur reconnu du domaine du logement social : elle a en charge la gestion d'un parc de plus de 187 000 logements sociaux, dont 70 000 logements très sociaux, répartis sur l'ensemble de la France. Elle a su gérer la transformation de l'ex-SONACOTRA en ADOMA. Il n'y a pas à craindre la disparition de la présence des pouvoirs publics : l'État maintient intact son pouvoir de décision à travers la LBU ; les collectivités restent présentes au sein des SIDOM et continuent d'être des acteurs majeurs pour ce qui concerne la territorialisation de la construction de logements sociaux. Ajoutons que la SNI, constituée uniquement de capitaux publics, est une filiale à 100 % de la Caisse des dépôts et consignations. Le débat se poursuivra, y compris au Sénat, mais je tenais à vous apporter d'ores et déjà ces éléments.
Pour ce qui est de l'habilitation législative, je n'ai pas changé d'avis. Je le dis clairement, il est extrêmement regrettable pour l'île de La Réunion qu'elle ne puisse pas disposer des pouvoirs dont tous les autres départements sont dotés. Lorsque je siégeais à la commission des lois, j'avais effectué un travail autour d'une future révision constitutionnelle destinée à mettre fin à cette exclusion. Nous n'avons pas eu la chance de pouvoir le mener au bout ; quoi qu'il en soit, la réflexion technique et politique avait été préparée et présentée.
Sur la codification du droit outre-mer, vous avez raison, il s'agit d'un enjeu important, qui a fait l'objet d'un travail remarquable mené par les chambres de commerce et d'industrie outre-mer. Je veux en particulier saluer la démarche initiée par le président de la chambre de commerce de Martinique pour la codification du droit des entreprises outre-mer, démarche accompagnée par Mme Pau-Langevin. Nous devrions poursuivre ce travail de codification sur certains sujets, en créant au besoin des chaires universitaires.
S'agissant de Saint-Martin, monsieur Gibbes, j'aimerais rappeler certains éléments. Tout d'abord, dans le PLF 2017, l'État prévoit de consacrer 67 millions d'euros en autorisations d'engagement à ce territoire, soit une hausse de 2,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2016. On ne saurait parler d'abandon de l'État.
Sachez que je partage plusieurs de vos préoccupations.
En matière de sécurité, si les crédits sont en hausse, le territoire de Saint-Martin n'en reste pas moins exposé à des problèmes de délinquance et de trafics. C'est la raison pour laquelle nous y avons aussi déployé le plan « sécurité outre-mer ». Nous accordons aussi des moyens à la lutte contre la délinquance des jeunes.
En matière de souveraineté, les enjeux sont anciens. Je suis très attentive à la question de la frontière maritime.
Enfin, nous le savons, l'équilibre budgétaire de la collectivité est affecté par le RSA. Malgré la position du juge à ce sujet, le taux de couverture des dépenses sociales est assez faible par rapport aux compensations nationales. C'est même l'un des taux les plus bas de France. Saint-Martin nécessite une intervention et un soutien de l'État. Soyez assuré, monsieur Gibbes, que je m'emploierai à défendre ce dossier.
Pour la Nouvelle-Calédonie, nous constatons une hausse des crédits de la mission « Outre-mer » mais aussi de l'effort financier global de l'État. Une intervention sur la filière nickel a été décidée à juste titre. Le projet de loi organique ouvre, entre autres évolutions, la possibilité de créer de nouvelles entreprises publiques locales (EPL). J'ai pu constater lors du congrès des EPL que celles qui sont déjà implantées mènent des expériences très intéressantes. Enfin, je soulignerai la poursuite du programme « Cadres avenir » qui a inspiré celui que nous mettons en place à Mayotte.
Sur l'évolution statutaire de Saint-Pierre-et-Miquelon, je serai rapide : les discussions se sont arrêtées en cours de route et il appartient aux élus de décider de les reprendre ou pas.
Quant à Wallis-et-Futuna, son régime institutionnel a été modifié en 2003 afin que ce territoire devienne une collectivité d'outre-mer. Une actualisation des dispositions statutaires est envisagée dans le projet de loi organique afin de mettre au point un statut plus adapté aux évolutions juridiques, sociales, économiques et environnementales de cette collectivité. Il est prévu notamment une évolution destinée à affirmer clairement le statut organique de la collectivité ; il s'agira également de clarifier la répartition des compétences entre l'État et la collectivité, de préciser les modalités d'association de la collectivité avec des réformes conduites par l'État ainsi que de garantir le rôle de la coutume, élément indispensable au développement économique maritime.
Mme Sage a évoqué les accords de Papeete. Les discussions n'ont pas encore abouti, il est donc compliqué d'intégrer leurs résultats dans le présent budget. Ils seront néanmoins pris en compte dans le projet de loi de finances rectificative. Nous travaillons à ce que les accords soient signés assez rapidement.
Les terres australes et antarctiques françaises (TAAF) constituent à n'en pas douter un enjeu extraordinaire. Je tiens à vous rassurer sur l'effort global consenti par l'État dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017 : 22 millions d'euros leur sont consacrés, à un niveau stable. Une subvention exceptionnelle a été attribuée à l'Initiative française sur les récifs coralliens (IFRECOR). Une mission de rationalisation de la flotte océanographique sera confiée à l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer. Par ailleurs, un financement est prévu pour la jouvence du Marion Dufresne, assurée via un partenariat avec l'IFREMER.
J'avais déjà répondu concernant le prêt à taux zéro. L'équivalent fonds vert s'élève à près de 25 millions d'euros, avec un effet levier de 100 millions, peut-être 18 millions dans la partie « intervention de protection du réchauffement climatique ». La question de Maina Sage était un peu différente et nécessiterait peut-être un travail particulier : nous pourrions nous rencontrer afin d'affiner les choses et de vérifier si une intervention directe serait possible ou pas. Pour l'instant, ce n'est pas le cas : il s'agit d'un dispositif d'effet levier sur des prêts à taux zéro auprès de l'Agence française du développement (AFD) mais ma porte est toujours ouverte, madame la députée, vous le savez.
Il n'y a pas d'effort de rationalisation sur le RSMA qui pourrait être de nature à affecter la qualité de sa prestation. C'est précisément parce que nous avons un taux de sortie positif extrêmement intéressant que nous continuons le programme RSMA 6 000.
Je répondrai à présent à Mme Chapdelaine.
La loi sur l'égalité réelle nous a beaucoup mobilisés et nous savons que les efforts devront être poursuivis. Ce texte n'est pas une fin mais juste un début. Nous posons une nouvelle pierre – en termes de démarche, d'efforts, de méthode et de finalité. Nous devons maintenant continuer à suivre notre chemin et maintenir l'effort nécessaire, car les populations attendent.
Nous sommes effectivement en Nouvelle-Calédonie dans un processus très respectueux des parties. Les accords de Nouméa sont respectés. Nous préparons le prochain comité des signataires et les choses se passent plutôt bien. Le devoir de la France est de veiller au respect des procédures et des accords de Nouméa et de faire en sorte que le dialogue continue et que la transparence soit assurée. La procédure est en cours. Nous serons en réunion au début du mois de novembre pour continuer ce travail. Entre-temps, des experts en mission interviennent. C'est un travail sérieux. Le Gouvernement est là où il doit être pour assurer le bon déroulement des choses, le respect de la parole donnée et la transparence.
La Cité des outre-mer sera dotée de 10 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 1,5 million en crédits de paiement pour les études préalables au lancement de l'opération.
M. Gibbes a attiré mon attention sur la question des données chiffrées – absolument nécessaires pour mener des politiques publiques de qualité et pour pouvoir continuer à bénéficier du Fonds européen. Je vous confirme, monsieur le député, avoir demandé à mes services d'étudier la possibilité de mobiliser le CEROM (Comptes économiques rapides de l'outre-mer) pour apporter, en lien avec les DOM, l'INSEE et l'AFD, les premiers éléments de réponse aux besoins que vous avez exprimés.
M. Serville enfin a évoqué un problème de logement mais aussi, au-delà, un problème de fond : l'impact de la migration sur le département de Guyane. Sur le phénomène migratoire proprement dit, je vous propose d'associer le ministère de l'intérieur à nos échanges. Je vous répondrai pour ma part sur l'effort à engager pour démultiplier l'offre de logement sur le territoire guyanais : la LBU est répartie en fonction de critères démographiques qui, pour l'instant, ne vous sont pas forcément favorables mais qui sont pondérés par d'autres critères – le niveau de richesse notamment. La Guyane a de ce fait la possibilité de mobiliser un peu plus que prévu dans ce budget. Et quoi qu'il en soit, il s'agit de fonds fongibles, de sorte que cette année, la Guyane a pu bénéficier de la non-consommation des crédits d'un autre département. Cela ne répond pas, sur le fond, à votre question : la LBU ne permettra pas de répondre à une demande d'une telle ampleur. C'est pourquoi nous avons entrepris des démarches particulières – je pense au Pacte d'avenir avec la Guyane dans le cadre duquel est mis en oeuvre le Plan logement. L'effort en faveur du logement social est important mais il ne réglera pas, il est vrai, le problème du poids que représente le phénomène migratoire sur votre territoire. Il ne s'agit pas pour moi de dire que ce sera possible. Il faudra donc engager des démarches très particulières sur les deux sujets que vous avez soulevés.