Intervention de Dominique Orliac

Réunion du 3 novembre 2016 à 21h00
Commission élargie : finances - affaires économiques - affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Orliac, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, pour l'hébergement, le parcours vers le logement et l'insertion des personnes vulnérables :

Les crédits pour 2017 du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » sont en très nette progression cette année et je ne peux que m'en féliciter. Cette augmentation est essentiellement destinée à l'hébergement d'urgence : il s'agit de répondre aux besoins conjoncturels, notamment à ceux directement liés à la crise migratoire.

À cet égard, je tiens une nouvelle fois à souligner avec force que, contrairement à une idée reçue, il n'existe aucune concurrence entre les personnes sans abri et les migrants. Ceux qui stigmatisaient hier les sans-abri les opposent aujourd'hui aux migrants, en stigmatisant ces derniers. Cette hiérarchie de la misère est intolérable. Je constate que les opinions et les actes se durcissent vis-à-vis des plus fragiles, et je trouve cela inadmissible. J'ai été très choquée par le terme de « pauvrophobie», utilisé avant-hier par un grand quotidien, tout autant que par le titre qui l'accompagnait : « Face à la pauvreté, on sent un vent mauvais ». De même, je ne peux que regretter que la vague d'expulsion des logements juste avant la trêve hivernale ait été une nouvelle fois significative.

Si les crédits destinés à l'hébergement d'urgence sont indispensables cette année, je ne voudrais pas que l'on oublie pour autant les autres segments de réponse qui permettent d'accompagner les personnes vers du logement pérenne, et je constate à cet égard une moindre augmentation – récurrente – des crédits destinés au logement accompagné.

Les crédits destinés à faire face à l'urgence sont, cette année encore, trop mobilisés au détriment des dispositifs permettant une insertion plus durable des personnes dans le logement : c'est une logique de réaction à l'urgence et à l'actualité, qui prime sur une vision à plus long terme.

Pensez-vous, madame la ministre, qu'il sera un jour possible de mettre fin à ce clivage persistant, entre la réponse à l'urgence d'une part, et l'accompagnement vers l'insertion d'autre part ? Un effort plus important d'accompagnement vers le logement, en direction des personnes en situation précaire, est-il envisagé ?

Je souhaiterais par ailleurs faire une suggestion concernant la maquette de performance du programme 177. En effet, les services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO), dont l'existence juridique a été consacrée par la loi ALUR, sont présentés comme les nouveaux leviers essentiels – pour ne pas dire l'alpha et l'oméga – du pilotage des politiques d'hébergement et de logement. Or la maquette de performance du programme 177 ne comprend aucun indicateur qui permette d'évaluer leur montée en puissance. L'indicateur intitulé « taux de réponse positive du SIAO aux demandes d'hébergement et de logement » mesure la capacité des SIAO à répondre aux demandes qui leur sont adressées, mais pas la croissance de la part des demandes d'hébergement qui transitent par eux. Afin d'évaluer la montée en puissance des SIAO, je propose donc la création d'un tel indicateur de performance, dont le numérateur comporterait le total des demandes d'hébergement ou de logement adapté ayant transité par les SIAO, et le dénominateur le nombre total des demandes d'hébergement ou de logement adapté. Ce nouvel indicateur de performance vous semble-t-il pertinent ?

Au-delà de l'aspect purement budgétaire, j'ai choisi cette année de consacrer la partie thématique de mon avis à la problématique cruciale des questions de santé en hébergement d'urgence : une prise de conscience des besoins est nécessaire, afin que nous puissions commencer à remédier au déficit de réponses en la matière, notamment s'agissant de la santé psychique, qui est très peu prise en compte, alors que des troubles en ce domaine se rencontrent beaucoup plus fréquemment chez les personnes en situation de précarité. Dans les centres d'accueil et d'orientation (CAO) pour les délocalisés de Calais par exemple, aucun accompagnement à la souffrance psychique n'est prévu, alors qu'un parcours migratoire semé d'embûches et l'exil laissent inévitablement des traces. Parmi les pistes d'action possibles afin de remédier à cette défaillance, figurent la création de postes de professionnels de santé au sein des CAO ou des autres structures, ou un élargissement de la formation des professionnels. Quelles mesures comptez-vous prendre afin de mieux accompagner la souffrance psychique, de mieux prendre en compte les addictions et les maladies chroniques ?

Dans mon avis budgétaire, je propose quelques pistes de réforme en matière de santé et d'hébergement des personnes vulnérables. Il me paraît souhaitable de mettre l'accent sur la prévention, de mieux former les professionnels et de décloisonner les dispositifs d'hébergement et ceux de la santé. Sur ce dernier point, quelles mesures pensez-vous mettre en oeuvre pour une meilleure coordination entre les secteurs de la santé et du social, afin d'améliorer les chances de réinsertion ?

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