Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du 2 novembre 2016 à 21h10
Commission élargie : finances - défense nationale - affaires étrangères

Jean-Yves le Drian, ministre de la défense :

Mesdames, messieurs les députés, je suis heureux de vous retrouver dans cette configuration pour l'examen du dernier budget du quinquennat afin de répondre à vos questions.

Avant de traiter celles des rapporteurs, permettez-moi de faire le point sur l'exécution des crédits pour le second semestre de l'année 2016. Cette présentation semestrielle constitue une obligation en application de l'article 8 de la loi du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019, disposition introduite par voie d'amendements d'origine parlementaire. J'ai eu l'occasion, le 5 juillet dernier, de faire un point devant la commission de la défense sur l'engagement des crédits pour le premier semestre de l'année. S'agissant du second semestre, un rapport vous a été communiqué dont je ne commenterai que trois aspects relatifs à la trajectoire en matière de ressources humaines, à la trajectoire capacitaire et industrielle, et à la trajectoire financière. Cela me permettra de répondre à une partie des questions qui m'ont été posées.

En matière de ressources humaines, la loi de finances initiale pour 2016 prévoyait une augmentation des effectifs du ministère de 2 300 emplois, qui résultait, d'une part, d'une augmentation de 6 800 postes pour répondre aux besoins prioritaires de la force opérationnelle terrestre, de la cyberdéfense, et du renseignement, et, d'autre part, de la suppression de 4 500 postes dans le cadre de la poursuite des efforts de rationalisation du ministère. Nous avions constaté un retard de 640 postes à la fin de l'année 2015, et les prévisions de réalisation des engagements pour 2016 accusent encore, au moment où je vous parle, un sous-effectif de 378 emplois. Ce retard, moindre que celui enregistré à la fin de l'année dernière, doit être relativisé compte tenu de la masse des recrutements. Il se résorbe, et les emplois concernés ne sont pas perdus : ils seront ajoutés au schéma d'emploi pour 2017.

Les rapporteurs n'ayant pas appelé l'attention sur ce point, il me semble utile de préciser que l'année 2016 est une année de recrutement historique, en particulier pour l'armée de terre – M. François Cornut-Gentille parlait d'« hagiographie » : pour ma part, ce qui m'intéresse, ce n'est pas la vie du ciel, mais bien ce qui se passe sur terre. Les objectifs de recrutement de l'armée de terre en 2016 sont deux fois plus élevés qu'en 2014, et une fois et demie plus élevés qu'en 2015. En 2016, sont ainsi prévus 15 000 recrutements de militaires du rang, et 4 000 recrutements de sous-officiers. Au point où nous en sommes, je peux donc dire que les cibles de recrutement seront réalisées à environ 99 %. Certains s'interrogeaient sur notre capacité à faire en la matière : la capacité à faire est au rendez-vous.

Je profite de ces considérations relatives au recrutement et aux effectifs pour faire quelques remarques sur les logiciels de solde Louvois et Source Solde. J'ai lu dans vos rapports des interrogations justifiées sur ce sujet. Nous cherchons à améliorer en permanence les procédures de détections des dysfonctionnements en amont du paiement effectif de la solde pour réduire les nouveaux indus versés. La prévision annuelle des indus versés en 2016 s'élève à 30 millions d'euros, en nette amélioration par rapport aux années précédentes. C'est encore de l'artisanat, du coup par coup, mais je vous rassure sur la mise en oeuvre du nouveau dispositif Source Solde. Il sera mis en service à la fin de l'année 2017 pour la marine, avant de l'être progressivement pour les autres armes. Depuis le mois de mars, nous sommes en phase d'expérimentation avec des essais qualitatifs qui dureront un an et demi. Après le désastre que nous avons connu, je souhaite que nous mettions en place un dispositif extrêmement robuste, incontournable et incontestable. La mise en oeuvre dans chacune des armées se fera avec un système de double commande pour éviter les gestions erratiques antérieures.

Pour ce qui est de la trajectoire capacitaire et industrielle, la réalisation des programmes d'armement se poursuit avec le lancement de programmes majeurs prévus par la LPM en 2016 – à ceux déjà cités j'ajouterai le programme d'entraînement des pilotes de chasse FOMEDEC, qui prend un peu de retard mais qui va être réalisé très rapidement ; sans oublier l'acquisition du C-130J et le remplacement du FAMAS. J'en profite pour signaler que, alors que l'acquisition de ravitailleurs était repoussée d'année en année, au point que ceux en service étaient considérablement vétustes – ce qui était d'autant plus ennuyeux que la force de dissuasion en était affectée –, j'en ai commandé douze nouveaux, le premier devant être livré en 2018. J'entends donc apaiser vos inquiétudes : ce dernier programme se réalise conformément aux engagements pris.

En outre, en plus des dispositions prévues par la loi de programmation militaire, nous avons commandé 500 véhicules légers tactiques polyvalents pour remplacer les véhicules P4, plus particulièrement à destination de l'opération Sentinelle, mais aussi des gilets pare-balles. Enfin, nous avons décidé d'acquérir un avion léger de surveillance et de reconnaissance et de remettre à niveau le stock des roquettes des LRU (lance-roquettes unitaires).

Tout cela fait partie du supplément capacitaire du second semestre 2016 par rapport aux engagements de la loi de programmation militaire actualisée l'année précédente.

En ce qui concerne la trajectoire financière, mes observations porteront sur deux points.

Je commencerai par relever la bonne disponibilité des crédits de la loi de finances. Le bilan semestriel qui vous a été remis mentionne 2,7 milliards d'euros de crédits réservés. Ce montant n'est pourtant plus à l'ordre du jour puisque j'ai obtenu, il y a quelques jours, un premier dégel de 770 millions d'euros. Mais, pour assurer la qualité de la trajectoire financière, il nous faudra obtenir le dégel de l'ensemble des crédits jusqu'à présent indisponibles, soit 1,9 milliard d'euros, afin que le report de charges reste au niveau initialement prévu par la loi de programmation militaire. Ces discussions sont en cours et je m'y emploie avec la détermination que vous me connaissez.

Certains d'entre vous se sont interrogés sur la couverture réelle du financement des surcoûts nets OPEX et OPINT, dont le montant qui approchera 830 millions d'euros pour l'année 2016. Je rappelle à cet égard qu'il y a deux écoles – qui d'ailleurs transcendent les clivages politiques, ce que j'ai également pu constater au Sénat.

Certains, en effet, voudraient qu'on évalue avec suffisamment de précision les OPEX afin que le chiffre de leur financement soit le plus cohérent possible ; ce chiffre, dès lors, ne correspondrait plus aux 450 millions d'euros inscrits dans le budget, mais, pour ce qui est de l'année 2016, serait de 1,2 milliard d'euros.

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