Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du 2 novembre 2016 à 21h10
Commission élargie : finances - défense nationale - affaires étrangères

Jean-Yves le Drian, ministre de la défense :

Reste que cette orientation n'est pas favorable pour l'heure au ministère parce que tout dépassement d'une provision pour OPEX par rapport au socle prévu par la loi de programmation militaire – comme cela s'était également pratiqué antérieurement, en 2010-2011, à ceci près que le chiffre était de 650 millions alors que les opérations étaient quasiment aussi nombreuses – ne serait plus partagé et seul le ministère de la défense devrait l'assumer sur ses différents chapitres et vraisemblablement au détriment de ses acquisitions et de sa trajectoire capacitaire. Bref, je ne crois pas qu'il s'agisse de la bonne méthode.

Celle prônée par la seconde école me paraît meilleure, sous réserve bien sûr, que les surcoûts soient entièrement identifiés et que leur couverture interministérielle soit totalement assurée. Cela a été jusqu'à présent le cas : l'ensemble des surcoûts liés aux OPEX a été pris en compte par un financement interministériel depuis 2012. Je partage néanmoins une observation de M. de La Verpillière : il faudrait mieux identifier les éléments qui font partie du surcoût OPINT, il peut sur le sujet exister une marge d'appréciation. Le surcoût est estimé cette année à 145 millions d'euros, vous l'avez rappelé, contre 176 millions en 2015 – en raison de coûts d'aménagement et d'installation significatifs. Vous avez fait état, monsieur de La Verpillière, de la mission de l'inspection générale des finances (IGF) et du contrôle général des armées (CGA) : elle livrera ses conclusions à la mi-décembre, conclusions dont j'ignore pour l'heure la teneur et que je suis prêt à diffuser en temps voulu afin que vous puissiez les commenter. Quoi qu'il en soit, le surcoût des OPEX devrait être de l'ordre de 830 millions d'euros en fin d'exercice et, jusqu'à présent, la couverture interministérielle ne m'a jamais manqué.

Je rappelle en outre que je m'étais engagé à ce que vous soyez pleinement informés des conséquences, pour la programmation militaire, de l'ensemble des décisions prises par le Président de la République depuis le 13 novembre 2015 et singulièrement depuis la réunion du conseil de défense du 6 avril 2016. J'avais proposé de remettre à la commission de la défense un rapport triennal décrivant toutes les conséquences physiques et financières pour la période 2017-2019, étant entendu que la loi de programmation militaire a été actualisée et que plusieurs inflexions y ont été apportées après les attentats les plus récents et les décisions du Président de la République. Le rapport en question trace les perspectives en matière d'effectifs, de besoins capacitaires et de conditions militaires. Il prend en considération l'effort nécessaire pour la fin de la période couverte par la loi de programmation militaire, de 2017 à 2019. Ce rapport est désormais sur la table, monsieur Cornut-Gentille : à vous d'apprécier la portée de la trajectoire proposée qui engage le Gouvernement et garantit la soutenabilité du budget de la défense à 1,8 % du PIB.

M. Bridey observait que tout le monde entend porter le budget de la défense à 2 % du PIB. Cet objectif figure dans la loi de programmation initiale et fait partie des engagements pris au sommet de l'OTAN de Newport en 2014 et renouvelés au sommet de Varsovie en 2016. Le seul problème est qu'aucune date butoir n'a été fixée. Il est indispensable en tout cas que nous nous inscrivions dans cette trajectoire, mais il n'est pas moins indispensable que nous mobilisions 20 % de nos budgets au volet capacitaire. Nous sommes, de ce point de vue, dans les clous – ce qui n'est peut-être pas le cas de l'ensemble des membres de l'OTAN. Reste qu'il ne suffit pas d'affirmer la volonté de porter le budget de la défense à 2 % du PIB ; encore faut-il établir un échéancier et intégrer la nécessité d'un effort singulier concernant le « paquet » dissuasion qui se trouve aujourd'hui en « creux » de financement puisque les programmes ont été engagés – et ce seul fait conduira mécaniquement à une progression des crédits de défense dans les années 2020-2022.

Je reviens au budget pour 2017 d'abord pour rappeler ce que j'ai évoqué devant la commission de la défense : le PLF pour 2017, concernant la défense, est en hausse de 600 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2016. Le besoin financier des armées et des services de la défense avait été évalué, pour 2017, à 775 millions d'euros supplémentaires par rapport aux prévisions de la LPM actualisée.

Je signale au passage, monsieur Cornut-Gentille, que si l'hagiographie est parfois le monde du rêve, le monde dans lequel j'évolue est celui de la dure réalité du sol : ce qui m'amène à vous rappeler que la LPM prévoyait un budget de 31,6 milliards d'euros pour 2017 alors qu'il sera de 32,7 milliards d'euros.

Je viens d'indiquer que les besoins financiers des armées et des services de la défense étaient de 775 millions d'euros. Nous les couvrons d'abord par 417 millions d'euros de crédits budgétaires et de recettes de cessions immobilières supplémentaires, crédits constitués de 317 millions d'euros de crédits budgétaires et de 100 millions d'euros de droits de tirage supplémentaire sur le compte d'affectation spéciale « Immobilier ». Le solde, soit 358 millions d'euros, est couvert par le redéploiement de marges de manoeuvre internes au ministère, qui résultent de trois causes distinctes : 205 millions d'euros de nouveaux gains sur les coûts des facteurs ; 50 millions d'euros prélevés sur la trésorerie du compte de commerce des essences, fortement accrue du fait de l'évolution favorable du prix des carburants ; enfin, un peu plus de 100 millions d'euros qui proviennent de l'actualisation fine des échéanciers financiers des programmes d'armement.

Nous avons eu un débat, à mon avis très utile, sur le coût des facteurs. Lors de l'actualisation de la loi de programmation militaire, en juillet 2015, je vous avais indiqué une augmentation des ressources supplémentaires de 3,8 milliards d'euros. Auparavant, nous avions quasiment gommé le recours aux ressources exceptionnelles, exception faite du CAS « Immobilier ». J'avais également indiqué que la LPM actualisée intégrait 1 milliard d'euros de gains sur les coûts des facteurs dont 275 millions d'euros en 2017, contre 210 millions d'euros en 2016. Le débat auquel je viens de faire allusion, et dans lequel M. Lamour s'était particulièrement impliqué, était de savoir comment identifier le coût des facteurs, à savoir la différence entre l'évaluation du contexte économique au moment du vote de la loi, à l'été 2013, et la situation de 2016 – soit 263 millions d'euros.

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